Cinéa (1921)

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12 cinea Et maintenant, les Films Suédois ! Il paraît que le cinéma français va se décider à être français. Nous le croirons quand cela sera. Il n'est point cinéma du tout dans ses adaptations toutes théâtrales d'ceuvre.s théâtrales, — et il n'est point français dans ses adaptations timorées de la somptueuse et forte technique américaine. Et pas davantage le cinéma français ne serait-il français en adoptant —adoption, adaptations, ou parodie I — l'art muet des Suédois. Le style d'écran des Américains reste pour le moment la formule quasi parfaite en sa netteté du drame cinégraphique. Les films suédois n'ont pas cette verve directe que nous avons aimée avec Hart, Hayakawa, Chaplin, Norma Talmadge, Ince, Griffith, Mac Sennett et leurs pairs. Le style d'écran des Nordiques participe plutôt du roman et n'atteint que par un détour ses vertus propres. Mais il comporte tant de soin, de goût, d'intelligence, il est servi par de tels talents, par de tels esprits, que sa force l'impose. Et les noms deSvenska et Skandia menacent d'éclipser ceux, illustres, de Goldwyn, Selzniek, Paramount, BigEiveou Robertson Cole. Mais ce n'est pas l'incroyable mise au point de cet effort d'art qui lui livra notre admiration. Nous avons aimé chez les Suédois leur sens de l'intimité, de l'âme, de la pensée, de toute la vie intérieure. Une atmosphère nuancée et profonde rend le scénario presque inutile. Vivre avec des gens et les connaître, quelle impression I Et comme les voilà tout soudain stylisés parce que nous sentons (autrement que par des actes) leur pensée. L'image animée devient autre chose que de l'imagerie. La psychologie la plus simple, la plus souple, la plus vivante et naturelle, se développe devant nous et envahit nos yeux d'abord. Les Proscrits, ce film importe à l'art muet, comme, en leur temps. Pour sauver sa race ou David Garrick. C'est le premier duo d'amour entendu au cinéma. Un duo qui est toute une vie, qui nous fait vivre toute une vie. Est-ce un drame ? Que s'est-il passé? Je ne sais. Se passe-t-il quelque chose dans Roméo et dans Tristan ? Des gens s'aiment et vivent. C'est tout. Nous avons eu souvent cette impression aiguë de vérité et d'étude humaine dans les films suédois. Le Trésor d'Arne est un beau poème. Ceux qui l'ont vu l'ont adoré. Mais peu l'ont vu. Car les directeurs de cinéma n'aiment pas les films suédois. Pourtant (ne serait-ce que pour mettre en relief Judex et Tue-laMortT) ils gagneraient à offrir aux spectateurs ces pages lumineuses. Je ne pense pas que le public ait boudé au Monastère de Sendomir, qui n'a pas la pureté séduisante du Trésor d'Arne, mais dont l'atmosphère a tant de chaleur. Ahl l'atmosphère I Rappelez-vous la délicieuse intimité grisaille de la Montre brisée, la grâce prenante de la Petite Fée de Solbakken, et même du trop ingénieux Mariage de Joujou. La Vengeance de Jacob Yindas a déplu aux Parisiens, mais leur déplaira toujours ce qui touche à la religion sans lyrisme, comme naguère le Cl} rétien, puissant film anglais, et la Rédemption de Panamint, émouvant film américain. Les Français préféreront le Rêve, et sa plus solide poésie. On nous annonce d'autres, beaucoup d'autres productions suédoises. Ne les négligez pas. Elles apportent des merveilles. Encore une fois, que les cinéphiles de France ne se trompent point. La beauté impérieuse de ces films n'est point due à la photographie, aux projecteurs, aux caches, fondus, et autres trucs de l'opérateur. Ce sont là accessoires de prix et de luxe, mais rien de plus. Le goût, le tact, la mesure, l'intensité en profondeur, et surtout l'humanité, cette humanité avec quoi les Américains nous firent parfois pleurer et qui, chez les Suédois, filtrée par une culture et une délicatesse inouïes, nous touche au plus secret du cœur. Sans humanité, vous ne serez que des photographes et des cabots. Il y a autre chose, que nous réclamons. Et cela n'empêche pas de constater la virtuosité visuelle, photographique ou picturale de ces œuvres, ni de saluer la sobre autorité des interprètes. Nous n'avons pas vu ailleurs ce Siostrom, violoncelle troublant des thèmes de Selma Lagerloff (les Proscrits, la Montre brisée), cette Tora Teje, sensuelle et précise d'expression (le Monastère de Sendomir, la Montre brisée), Renée Bjorling, Richard Lund, et surtout Mary Johnson, lumière vivante du Trésor d'Ame, et il nous reste à voir Harriett Bosse, la grande star des écrans de Stockolm, et Jenny Hasselquist, l'illustre ballerine, à peine entrevue dans Wolo, d'harmonieuse mémoire, et tous les collaborateurs de ces Kappelmeisters photogéniques : Maurice Stiller, Ivan Hedquist, Siostrom, etc. Voilà des interprètes de cinéma. Voilà des hommes de cinéma. Voilà du cinéma. Loi is Delluc. La crise du français Les critiques qui ont assisté à une présentation récente ont pu lire ce qui suit sur le programme qui leur était distribué : « Andrew, fils de la première femme de l'illustre maison de Cudlestone, cherche pour faire face à des dettes criardes et pour satisfaire à ses nombreuses passions, de ruiner moralement dans l'esprit de Lord Cudlestone son père, son demi frère, George, officier dans le régiment de la Reine, afin de s'approprier des biens familiaux ». Lu peu plus loin, ils ont trouvé ceci : « Il va en exiger le payement immédiat lorsqu'il apprend que Lady Elsie Gorton, pupille d'Andrew, qu'elle vient de lui signer un chèque afin qu'elle liquide sa situation ». Quelques jours auparavant, dans un film dont les détails étaient fort soignés et même raffinés, ils avaient vu, en lettres plus ou moins onciales, qu'encadraient des fruits, des fleurs, des feuilles et des branches, ces mots: « Elle tâchait à lui persuader... » Où diable les maisons d'édition vont-elles chercher leurs rédacteurs? Que ne font-elles appel aux licenciésès-lettres qui, nous dit-on, sont obligés de prendre des postes de graisseurs d'essieux ? Comment veut-on que le public prenne au sérieux des œuvres qui lui sont présentés avec une telle négligence ? L. L.