Cinéa (1921)

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cinea LE SYNCHRONISME MUSICAL Le cinématographe, né en France, de parents français, s'est expatrié très vite pour aller chercher fortune en Amérique. La science française ne lui a pas tenu rigueur de cette ingratitude. Elle a continué à s'occuper secrètement de l'enfant prodigue et à se consacrer à son éducation artistique qui avait été jusqu'ici un peu négligée. Elle lui fait présent, aujourd'hui, d'un petit appareil fort ingénieux qui va lui apprendre sans fatigue la musique, la danse et les belles manières, et lui donner des leçons de maintien. Cette petite machine mystérieuse, qui se place sur n'importe quel appareil ordinaire de projection, a été baptisée assez bizarrement par son inventeur du nom gréco-latin de « visiophone ». C'est un appareil de synchronisation basé sur un principe nouveau. Depuis les débuts du cinématographe, on a cherché vainement une solution élégante au problème du synchronisme : l'intérêt d'une concordance parfaite entre la vision animée et le commentaire musical qui l'accompagne n'est plus à démontrer. Le film qui se déroule avec le petit grésillement monotone de son appareil de projection, ne saurait se passer de musique. Il faut que, dans la salle obscure, la fantasmagorie lumineuse qui retient l'attention de l'œil soit complétée et équilibrée par le déroulement parallèle d'ondes harmonieuses qui bercent l'oreille, arrachent le spectateur aux réalités quotidiennes et le livrent sans défense aux suggestions de l'écran. A cette fascination purement physique, la musique ajoute l'éloquence précise d'un commentaire qui souligne et explique l'action et en développe le caractère poignant, tendre ou joyeux. Pratiquement, cet accord n'a jamais été complètement réalisé. Les chefs d'orchestre s'appliquent à suivre, de leur mieux, la vision animée en exécutant îles partitions-macédoines, de vastes « pots-pourris » où ils s'efforcent de faire coïncider, tour ;'i tour, les valses lentes et les marches funèbres avec les situations heureuses ou tragiques; mais, mal gré toute leur attention et leur dextérité, ils n'arrivent pas à éviter les « bavures » de la musique au moment où se succèdent à l'écran les rapides métamorphoses de l'action. Le lamento empiète parfois sur la scène joyeuse et il faut à chaque instant étouffer brusquement un allée/ ro qui s'était jeté étourdiment en pleine tragédie. La couleur musicale « déborde » constamment les contours de la réalisation plastique et donne une impression de déséquilibre aussi gênante et aussi irritante qu'une gravure en couleurs dont le repérage a été défectueux. • On a proposé bien des procédés pour remédier à cet intéressant «décalage » musical, mais la plupart des recherches procédaient d'un point de départ trompeur. On a fabriqué d'ingénieux dispositifs rendant la rotation d'un disque de phonographe étroitement solidaire du déroulement de la pellicule. Mais, outre que le phonographe ne saurait remplacer, dans un commentaire symphonique, la voix persuasive de l'orchestre, cette conception rigoureuse ne peut satisfaire les artistes. L'automatisme dans la synchronisation n'est pas un idéal : c'est, au contraire un ècueil à éviter î Même dans le cas où la solution de l'instrument de musique mécanique serait écartée, l'idée de river le bras du chef d'orchestre à l'appareil de projection n'est pas heureuse. La coïncidence la plus parfaite, obtenue dans ces conditions, sera toujours insuffisante. Car, dans ces deux rythmes que l'on s'efforce de superposer, l'un est exact et l'autre faux. Et c'est ce dernier qui triomphe I Le rythme faux, chose singulière, est celui de la machine et le rythme exact est celui de l'homme. L'erreur est à l'écran et la vérité à l'orchestre. Tout le problème est donc à renverser : au lieu de forcer la musique à s'asservir automatiquement aux déformations de l'écran, il faut corriger les déformations rythmiques de la vision animée pour l'amener, régularisée, disciplinée et assouplie, a s'inscrire exactement dans les limites précises du cadre musical. Ainsi la coïncidence n'exclura pas la souplesse, l'exécution conservera sa liberté et son aisance, lors de toute contrainte mécanique, et ne renoncera pas au privilège de « l'équation personnelle » de l'interprétation humaine. C'est sur cette base rationnelle que repose l'invention du visiophone. Prenons un exemple. Vous voulez cinématographier un rythme élémentaire : celui d'un régiment en marche. Les soldats marquent le pas avec régularité, aux accents d'une musique militaire conduite avec une parfaite précision de mesure. Tournez votre prise de vue avec tous les soins désirables, développez, tirez et projetez sur l'écran : vous n'arriverez pas à reconstituer le rythme du défilé. Les soldats avancent par saccades, trop vite ou trop lentement, et, malgré toute son adresse, le chef d'orchestre n'arrivera pas à « plaquer » la marche militaire sous les pas de ces bataillons indisciplinés. Vous avez constaté cent fois cette anomalie. En voici l'explication. Le cinéma vous a apporté trois graves éléments de déformation rythmique. Tout d'abord, un ciel gris, un nuage qui passait devant le soleil, une heure défavorable ont parfois obligé l'opérateur à ralentir le déroulement de la pellicule vierge pour lui laisser le temps de s'imprégner d'une lumière trop faible premier coefficient d'erreur. Ensuite, malgré ses soins, l'opérateur n'est pas absolument maître de ses réflexes musculaires : ses tours de manivelle ne sont pas rigoureusement égaux entre eux. Les forces d'inertie provenant de l'épaisseur différente de telle ou telle marque de pellicule ou du poids variable de la bobine qui s'allège à mesure que se dévide le film, viennent encore multiplier entre elles ces irrégularités. Deuxième source de déformations. Enfin, lorsque vous projetez ce film, où les rythmes sont déjà faussés, vous aggravez encore ces imperfections. Car votre moteur, alimenté