Cinéa (1923)

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cinéa 3 NAZmOVA dans LR DKME AUX CRWELIRS Je ne veux point voir ici Marguerite Gautier telle que nos esprits pénétrés de l'œuvre de Dumas se la représentent; c'est-à-dire, habillée de cette^faeon surannée et un peu ridicule pour nous, qui fut la caractéristique de la mode à cette époque. D'ailleurs, n'eut-il pas été paradoxal de voir Alla Nazimova en robe bouffante, coiffée avec ces bandeaux plats et ces boucles ordonnées que l'on aimait alors? Je veux seulement parler des costumes portés par la vedette russe au seul point de vue «décoratif » — ce qui, dans les créations de Nazimova a grande importance — et de la valeur que prennent ces toilettes dans les décors modernes, presque futuristes, de Natacha Rambova. « Grande et mince jusqu'à l'exagération, elle possédait au suprême degré l'art de faire disparaître cet oubli de la nature par le simple arrangement des choses qu'elle revêtait »... nous dit l'écran lumineux, reproduisant la phrase qu'écrivit Dumas. Alors, apparaît sur les marches d'un large escalier de théâtre, la svelte et pure silhouette emprisonnée dans un brocart qui jette des feux d'argent comme une armure. Avec une lente souplesse, Nazimova avance. Elle traîne, magnifique, un manteau plein de nuit qui, partant des épaules, s'étend majestueux et lourd derrière elle ; des camélias clairs stylisés, sont brochés dans l'étoffe, et tout ce ruissellement splendide vous éblouit. Marguerite Gautier et son charme subtil disparaît. Il ne reste plus que la grâce exotique et fragile de Nazimova, son cou délicat, ses grands yeux obliques, ses courts cheveux bruns étonnamment frisés, et surtout son corps qui devient ainsi un prétexte à parure et qui se marie si bien à ce surprenant costume que l'on ne saurait concevoir l'un sans l'autre. C'est atteindre, il me semble, au suprême degré, l'art de se vêtir. Nous retrouvons Nazimova dans « l'intérieur » qui représente l'appartement de Marguerite Gautier. Au milieu des meubles droits, des murs sombres et unis, des lourdes tentures et des immenses baies vitrées en forme de rotonde, sa silhouette, délivrée du manteau fabuleux, s'harmonise si complètement avec ce décor amusant, qu'on en éprouve une sensation savoureuse et bizarre. CL. AI II h RT ALLA NAZIMOVA et RUDOLF VALENTINO dans La Dame aux Camélias, Je ne saurais oublier le relief saisissant que prit sa longue taille étroite emprisonnée de brocart, lorsque — au cours du souper — debout, dans l'ombre des noirs rideaux, une coupe aux doigts, elle se renversa, les bras levés, la coupe au bord des lèvres. Dessin fantasque, il n'existait plus qu'une palme féerique, frémissante et mystérieuse. Puis voici les scènes de bonheur et d'amour à la campagne. Dans un jardin vaporeux, sous les arbres légers, heureuse et lente, penchant un peu la tête comme une fleur fatiguée, elle flotte toute, aux plis d'un frêle tissu, et paraît séduisante d'une façon inattendue et nouvelle. La lecture de Manon Lescaut, dans ce jardin de rêve, donne l'occasion d'évoquer quelques images du temps de la poudre et des mouches. Devant nos yeux étonnés et ravis, Nazimova en perruque blanche et robe à paniers possède la douceur d'une estampe ancienne. Mais quittant Manon, les falbalas et les tendres paysages qui ne sont que prétextes à jolie reconstitution, nous allons revenir, non pas à la véritable Nazimova — car, en vérité, qui pourrait dire quelle est la vraie — mais à l'interprète de Marguerite Gautier. Chez Olympe, dans la salle de jeu où derrière un vitrail blanc apparaissent les ombres de danseuses nues, où les robes de soie et les satins brillants jettent des notes claires, la Dame aux Camélias, vêtue d'un fourreau de velours noir, cache son pâle visage derrière un éventail de plumes; comme un chaud serpent, une fourrure s'enroule autour de son cou. Voilà une composition de costumes merveilleusement trouvée. Marguerite triste et malade est la seule note sombre parmi cette gaîté. Le moindre mouvement qu'elle imprime à son corps forme une ligne de mélancolie. Et dans le petit salon (?) aux rideaux de perles où trois chaises blanches et noires sont alignées contre un mur gris, Nazimova prostrée, son bras nu pendant le long du fourreau droit est d'une accablante tristesse. Regretterons-nous de n'avoir pas vu sous le scintillement des lustres, dans un salon aux meubles impersonnels, les jupes aux larges volants, les manches bouffantes et les bandeaux plats ?