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250 HISTOIRE DU CINEMA
Henry Bataille : Le Songe d'un soir d' Amour, etc.), mais Louis Delluc le traite, ce theme, sans la moindre litterature : il en fait un poeme visuel,. compose des images les plus depouillees, les plus directes que l'ecran ait jamais accueillies, les plus emouvantes aussi dont Leon Moussinac a dit : « Nos yeux subissent ces images comme on subit l'elan d'un poeme ou d'une melodie. Jeu profond des blancs et des noirs... Un tel film cree surtout un etat dame et j'en sais peu qui, ainsi, suggere da vantage. L'image souleve en nous le sentiment, l'ebranle, le pousse et il ira de la sorte aussi loin que nous voulons qu'il aille. La visite du pare
— « le vieux pare solitaire et glace » — ou une femme se heurte a chaque pas a un souvenir ancien, attiree comme une somnambule, parl'attrait d'un reveil sentimental ; la montee en vertige de l'escalier ou l'etreinte se denoua autrefois pour la fuite eperdue ; la route de passion douloureuse balayee par le vent, d'ou vient et par ou s'en va le drame, constituent des morceaux de photogenie remarquable. » C'etait la premiere fois qu'un scenario aussi pauvre en complications materielles — il n'y avait meme pas le coup de revolver constituant le denouement de Silence — mais aussi prodigue de nuances psychologiques etait porte a l'ecran. Ces nuances, Delluc avait reussi a les rendre sensibles en tirant de l'ombre tous les gestes, tous les regards, toutes les expressions de ses interpretes — Eve Francis, Gine Avril, Roger Karl, Andre Daven (i)
— et aussi tous les aspects, tous les details des choses... Ah ! ce n'est pas dans les images composees par Louis Delluc pour La Femme de nulle part que la nature peut etre, sur le mode romantique, accusee d'impassibilite. La critique — la presse commencait a en posseder une — avait accueilli La Femme de nulle part avec un enthousiasme raisonne : le mot « chef-d'oeuvre » etait tombe de plusieurs plumes qui n'etaient pas stipendiees, notamment de celle de Marcel Achard — et peut-etre est-ce bien a La Femme de nulle part au moins aussi justement qu'a Fievre que ce mot peut etre applique — mais le public s'enferma dans une reserve assez surprenante et qui ne trouve d'explication que dans la rupture que Delluc lui imposait quant aux habitudes qu'il avait si facilement prises en presence de l'ecran ; le sujet de La Femme de nulle part ne repondait-il pas, en effet, fort exactement a la sentimentalite a laquelle ce public s'abandonnait lorsqu'il se trouvait dans une
(i) Andre Daven, apres quelques incursions dans le journalisme cinematographique, partit pour Hollywood. II y tint quelques petits roles notamment dans Monsieur Beaucaire puis il devint le manager de Rudolph Valentino, collabora a V installation de la Paramount d Paris et se lanca dans la production. Dans le meme film parut pour la premiere fois unjeune acteur, Michel Duran qui renonca bientot a I' interpretation et ecrivit pour le theatre et le cinema.