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cinea
Inutile et brutale aussi la phrase de Hedwick d'où résulte le dénouement:
« D'ailleurs ma mère va s'absenter». S'il en est ainsi, le moment est mal ehoisi pour amener Iliana chez elle î A qui fera-t-on croire qu'une femme assez large d'esprit pour recueillir l'enfant malade de la danseuse n'autorisera pas sa mère à venir le voir? Et enfin si ce fils respectueux rougit d'introduire Sibitla sous le toit de sa mère, il ne peut lui échapper qu'il est beaucoup plus incorrect de l'y amener en son absence!
Cette parole d'une cruauté gratuite et choquante sert à amener un dénouement qui n'est peut-être pas conforme à la vérité et à la vie. En fait Sibilla ne mourrait pas ; elle remonterait sur ses tréteaux ; elle recommencerait à vendre sa salade — ou à tourner sa meule — sans avoir l'affreuse angoisse de sentir que son enfant meurt faute de soins — sans avoir le soutien moral que lui donnait sa présence. Et ainsi le cercle se fermerait, le drame aboutirait à l'éternel recommencement. Mais si M. Marcel L'Herbier avait adopté ce parti, nous n'aurions pas eu l'atroce et torturant plaisir de voir mourir Sibilla. C'est donc l'occasion d'appliquer l'adage qu'entre deux solutions la meilleure est celle qui a réussi, et de constater que celle-ci a réussi.
Alors que M. Marcel L'Herbier nous donne la sensation un peu enivrante et troublante d'un voyage de découverte et de conquête tout à la fois, d'une lutte renouvelée et heureuse pour asservir la lumière, annexer et utiliser les symboles, Mme Eve Francis, au contraire, nous montre ce que peut une artiste qui, sans chercher à créer un langage nouveau, s'assure d'une absolue maîtrise sur celui dont elle dispose. Pas une de ses attitudes qui ne soit juste et harmonieuse, pas un de ses gestes qui ne porte, pas une de ses expressions qui n'émeuve. Pour elle, la vie n'apparaît point selon l'enchaînement apparent de ses aspects extérieurs, mais selon la logique intense de son évolution profonde. Elle s'est identifiée à Sibilla, amante abandonnée, mère, danseuse ; elle a créé véritablement un être humain dont la silhouette seule lui était donnée. Qu'elle danse, qu'elle se venge, qu'elle étreigne désespérément son enfant,
elle n'est pas une danseuse, une amante, une mère quelconque, elle est Sibilla. Et il faut aller voir comment elle meurt.
On pouvait craindre que le relief, même donné à ce personnage — et a celui muet, mais non point immobile, de l'Alhambra — fit de l'œuvre une sorte de double concerto, restreignit les possibilités d'expression des autres interprètes. Il n'en est rien. Le personnage d'Hedvsick permet à M. Jaque Catelain de se montrer plein de jeunesse, de tendresse chaste et réservée, et pourtant assez viril pour échapper au risque d'afféterie auquel l'avaient exposé certains rôles antérieurs. Quant à Mlle Marcelle Pradot, elle a su créer un type de jeune fille très personnel — aussi virginal et beaucoup moins conventionnel que celui dont nous recevons d'Amérique des exemplaires sans cesse renouvelés ; et l'ayant créé, elle sait le faire vivre, le renouveler, le développer à chaque nouvelle création. — Qu'on le voie lui-même, ou son ombre, la silhouette de M. Hériat est hallucinante. M. Paulais est un échantillon réussi de nouveau riche, Mlle Rhéal une duègne amusante, encore que son rôle soit un peu chargé, et Mlle Claire Prelia à l'air assez Scandinave pour pouvoir être la mère de M. Jaque Catelain.
Ainsi le film français s'affirme, à la fin de cette saison, par trois œuvres notoires. Nous parlerons prochainement de l'Atlantide, qui vaut plus par la matière que par l'interprétation ; si l'on rapproche les deux autres œuvres, La Fièvre, et El Dorado, on est surpris que deux œuvres conçues dans le même milieu artistique, placées dans des atmosphères analogues, jouées par la même interprète, révèlent des tendances aussi divergentes. Et ceci est excellent, et le dieu du Cinéma doit être satisfait de constater qu'il y a plusieurs demeures dans sa maison.
Lionel Landry.
ISart consiste à choisir, l'éducation artistique à oublier ££■£££
[CHRONIQUE DU] iCINÉ ALLEMAND]
Le film allemand aime le grand spectacle et les reconstitutions historiques.
Une des choses les plus remarquables est Le Comte de Caçjlio-<lro, entièrement pris au palais de Schonbrunn : on y voit des photographies du plus haut intérêt.
La principale protagoniste Hilde Woerner raconte dans un article, qu'elle a joué son rôle dans le lit de Marie-Thérèse, qu'elle s'est déplacée dans les carrosses impériaux authentiques. Toutes les curiosités de cette belle histoire et de Schonbrunn même, anciens uniformes, œuvres d'art et même une soirée au théâtre du château éternisent l'histoire d'une façon irréprochable. Dans ce domaine, le film allemand a atteint une belle mal trise.
Le Richard-Os wald-Film lance deux nouveaux films d'aventure, attendus avec impatience en Allemagne. L'un s'appellera Lady Hamilton l'autre Le Problème de la Mort, dont le texte est écrit par Erwin Gepard.
Le Deulig-Film vient de donner Le Grand et le Petit Monde, film à grand spectacle, où sont engagés de premiers artistes de Rheinhardt : Alfred Abel, Ilka Gruning. Max Xack est un célèbre régisseur.
On apprend que Pola Negri, la grande étoile allemande, très appréciée en Amérique, vient d'être engagée par une grande société polonaise.
L'événement le plus curieux des! derniers temps est le film Hamlet, dont le principal rôle est tenu par une femme, la grande Asta Nielsen, la plus brillante Etoile du Nord, danoise d'origine.
Ce film, très adroitement tiré d'une forme primitive de la légende par le poète Erwin Gepard, a été réalisé au Danemark même, aux endroits historiques.
Ce film est déjà vendu en Amérique, en Italie et dans tous les pays
neutres.
I. G.