Cinéa (1921)

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cinea Sèment se passer de la clientèle de l'Amérique — elle s'en est passée jusqu'ici, certains films ont constitué de brillantes opérations commerciales en ne se souciant pas du marché américain, — mais elle ne peut pas se passer de la clientèle des autres pays. On objectera que ces pays ne produisent pas assez en général pour alimenter leurs protectionnistes les plus sévères, acheter des films à leurs concurrents. Admettons l'objection. Alors voye/.-vous, là encore, les Etats-Unis triompher? car eux seuls, en offrant de la marchandise déjà amortie dans leur pays, pourront demander à leurs clients étrangers des prix tellement bas que, malgré les droits protectionnistes, le film américain demeurera encore le meilleur marché de tous, le seul importable ! Nous serons encore battus par le poids lourd... par le grand pays aux 35.000 établissements... Le vrai protectionnisme La seule mesure protectionniste que nous puissions prendre sans danger consiste, à mon avis, à appliquer, en le développant encore, le principe fiscal que nous trouvons dans une loi proposée en ce moment au vote de la Chambre, loi concernant le dégrèvement des exploitants. Savoir : Dégrèvement proportionné à la place faite par les exploitants dans la composition de leur programme à la production nationale. Par l'application de ce principe, on favorise le film français sans avoir recours à des taxations douanières prohibitives, taxations qui ne manqueraient pas de nous attirer de nos clients étrangers des représailles aux conséquences dangereuses. Qu'on me permette de signaler un autre danger, conséquence de la fermeture de notre frontière à toute importation. En contraignant l'exploitant à ne plus passer d'autres films que des films nationaux, nous donnerions trop de sécurité de vente à nos producteurs. Ceux-ci, sûrs désormais d'écouler leurs produits, quelle qu'en «oit la qualité — puisque débarrassés de toute concurrence — feraient preuve de moins d'émulation dans le soin à apporter à leur fabrication, tendraient à une économie mal comprise dans le prix de revient, et la valeur artistique du film baisserait rapidement. On verrait le public délaisser peu à peu le cinématographe. On aurait tué la poule aux œufs d'or. N'oublions jamais le principe vital : la concurrence est l'âme de tous progrès industriel et artistique. Ce sujet brûlant d'actualité, et qui passionne à juste titre tous les esprits, m'a entraîné un peu loin de mes notes de voyageur; j'y reviens. Je ne voudrais pas ramasser toujours les mêmes phrases sur l'écoulement de nos produits là-bas. Dans une lettre écrite de New-York et qui fut publiée ici même, il y a quelques semaines, je faisais entendre un appel que je ne craignais pas d'appeler, à juste titre, je crois, un véritable cri d'alarme! J'exprimais l'amertume que peut éprouver un Erançais vivant à l'étranger lorsqu'il constate que chaque jour, à chaque heure, nos gouvernants et nos commerçants préparent le triomphe de nos ennemis sur le terrain économique. Et cela parleur veulerie, leur esprit rétrograde, leur ignorance des nécessités industrielles modernes. Je n'ai pas grand'chose à ajouter à ce que j'écrivais alors. Un dangereux état d'esprit Je résume ainsi mon avis sur la question écoulement de nos films en Amérique : Ne dites plus : « J'ai dépensé deux millions pour faire mon film; donc, il faut que les Américains crachent la forte somme pour l'avoir! » Ne dites plus : « Mon film a eu un succès prodigieux devant la presse corporative et quotidienne, qui a déclaré que c'était la plus belle œuvre cinématographique éclose à cette heure; donc, si les Américains veulent tàter de cette merveille, il faut qu'ils préparent copieusement leurs dollars ! » (Notons que ce ne sont jamais les directeurs (metteurs en scène) qui émettent ces prétentieuses théories, mais les services commerciaux pour lesquels ils travaillent). L'Américain... ou le Chinois, ou n'importe quelle sorte de client... vous répondra : « Je vous paierai votre film, si chargé de millions et de gloire qu'il puisse être dans votre pays, le même prix que le film de même valeur commerciale que vient m'offrir votre concurrent allemand, suédois, anglais ou italien, car vous n'êtes pas seul, monsieur, à m'offrir de la marchandise. » Or, on l'a dit et redit : le Suédois, l'Allemand, l'Anglais et l'Italien, impatients de faire connaître leurs produits au fort client américain, font intelligemment d'énormes sacrifices pour se faufiler en plus grand nombre possible par l'entrebâillement de la porte laissée entr'ouverte à la production étrangère par l'Américain à court de films. Eaites donc comme les autres, faufilez-vous avec de meilleurs films que vos concurrents, consentez des sacrifices analogues aux leurs et montrez vos échantillons au public de là-bas. « Mais, miséricorde, vous n'y songez pas. J'ai dépensé deux millions, vous dis-je, parce que je comptais sur l'Amérique pour m'amortir mon négatif. » Qui diable vous a dit que l'Amérique vous amortirait votre négatif? Vous êtes bien mal renseigné... mais à qui la faute ? Vous avez dépensé deux millions, dites-vous ; vous êtes un hardi champion de l'industrie nouvelle. Vous n'avez pas craint de commettre une héroïque imprudence... Mais alors, vous n'avez pas fait une affaire, monsieur, vous avez tenté un coup de bourse ! Ça ne réussit qu'une fois par hasard, ces coupslà... Au fait, faut-il vraiment vous féliciter de votre audace?... Ça n'est pas sûr! Des esprits aussi... aventureux risquent de faire, j'en ai peur, plus de mal que de bien à l'industrie cinématographique de votre pays! Sur quels principes techniques devons-nous nous appuyer pour établir nos films au goût du public américain ? Voilà bien la question type, qui ne comporte la possibilité d'aucune réponse. Envoyez vos directeurs s'imprégner des conceptions de toutes les races où s'élaborent des films suffisamment cérébraux et surtout amusants. Inutile pour cela de les faire voyager en Suède ou en Amérique. Recommandez-leur seulement de ne pas trop aimer leur coin du feu et leurs pantoufles, et de ne pas craindre de se rendre le plus souvent possible au « ciné » de leur quartier pour y voir des films suédois, américains... et même français. Qu'ils tirent des conclusions, si faire ils peuvent, du bâillement de leur voisin de gauche et des réflexions de leur voisine de droite. Je suis convaincu d'ailleurs que