Cinéa (1921)

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0 cinéa Etesvoue satisfait8 de l'organisation actuelle de la publicité? On croit avoir tout fait en versant aux journalistes quelques louis pour qu'ils prononcent les mots : « Sensationnel... magnifique*., enfoncée, l'Amérique... triomphe national, etc., etc. » Ces blagues-là ne portent plus. Les exploitants eux-mêmes n'y croient plus. Les journalistes indépendants ont l'ait plus pour le relèvement de la cinématographie française avec leurs critiques et leurs sévérités que les dociles fabricants de prospectus, pleins de bonnes intentions, mais non dépourvus de maladresse. Ne nous plaignons pas. 11 y a un grand progrès. Je connais des hommes, pourtant besogneux, qui pour beaucoup d'argent n'écrivaient pas du bien d'un film qu'ils ont trouvé idiot Et l'ensemble de la presse française du cinéma s'est nettoyée, assainie, a pris un ton correct et assez franc qui peut avoir sur nos travaux la plus heureuse influence. Il n'est même plus besoin de parler des derniers spécimens des temps barbares du chantage qui s'attardent parmi nous. Envoyez-leur quelques francs, ils vous baiseront les pieds. Mais à quoi bon ? Haïs, vieillis, écœurés d'eux-mème, victime de la pourriture physique qui parachève leur pourriture morale, ils vacillent déjà, c'est la fin, ils vont s'abattre dans le ruisseau nataloù ilscrèveront. Adios. • Quand le cinéma a commencé d'exister, on a improvisé toutes ces choses, comme dans les campements de l'Ouest Américains en 1820. Mais à la place de la ville de toile s'est élevée une cité de pierre et de fer, et tous les détails hâtivement adoptés ont besoin, sous peine de dures catastrophes pour notre industrie, d'être mis au point et adaptés aux nécessités de notre art commercial. • Méfiez-vous de la vieille formule classique : « Satisfaire le public. » J'entends souvent tel ou tel exploitant dire « Mon public demande ceci. Mon public veut ceci. » Mais trop souvent vous confondez la volonté du public avec ses habitudes. Ce n'est pas parce que le spectateur est habitué à voir une chose qu'il est bon de la lui redonner à perpétuité. Et s'il ne parle pas, s'il ne proteste pas, s'il n'exprime pas son avis avec autorité, c'est que la foule française 1 n'aime pas le scandale. Leur seule critique est la retraite. Plus d'un directeur a pu en faire l'expérience. . Croyez-vous que le spectateur est content du genre d'affiche que vous ne voulez pas abandonner? Il est indigné, le spectateur, et si je vous citais toutes les affiches qui l'ont mis en colère, la page n'y suffirait pas. Vous ne vous rappelez donc pas le succès des images coloriées de Cabiria, de certains placards de Barrére, de Hecan, de Don, de Norman ? La belle affiche est une arme de victoire, et vous la négliger. Quoi de plus commercial? Demandez aux administrateurs de Thermogène, de Dubonnet, de Cinzano, ce que leur a rapporte laffiche de Cappiello, et aux directeurs de théâtre ce que vaut une composition de Sem, de Roubille ou d'Iribe ? Attention à vos affiches. • Croyez-vous que le spectateur est content de vos orchestres? Le nombre de musiciens n'importe pas, ni le solo de violon en deuxième partie. La magnificence des partitions choisies est secondaire. Ce qu il faut, c'est que la musique s'adapte au film. Quelle que soit la qualité de votre public, sachez qu'il est venu pour le film et qu'il ne doit pas être gêné par une musique trop absurde ou trop remarquable. Qu'elle soit juste! Mais il faut que le chef et aussi les exécutants voient au moins deux fois les films, une fois sans répéter ni même prendre des notes, une autre fois pour répéter le premier ensemble. Attention à vos orchestres. Je ne dis pas: « Attention aux salles ». Elles sont ou seront très bien. Il s'est élevé depuis un an des palais luxueux, mais intelligemment équilibrés, où l'on a compris qu'il fallait de grands plans, des tons clairs, des lignes amples et pas trop de dorures, et surtout beaucoup d'air. Il faudrait que les directeurs de quelques vieilles salles aient le courage de fermer un mois ou deux pour remanier la forme, l'aérage, la couleur, l'intelligence de leur installation. Xous avons trop de monde pour interrompre, disent-ils. Oui, mais si le spectateur brusquement va chez le voisin, que diront-ils? Ecoutez toutes les remarques du spectateur. • Méfiez-vous aussi de cette autre vieille formule : « Un film doit plaire à tout le monde. » Un bon film, oui, mais il n'en est pas que de bons, et il y a des nuances bien marquées dans les diverses classes de spectateurs. Arrivez, arrivez vite à ne pas imposer n'importe quel programme à n'importe qui. Si vous saviez quelle quantité d'habitués peut perdre une salle où l'on s'est trompé sur les goûts du public. Que de fois nous l'avons dit! Et comme le comprendront cruellement un jour ceux qui ne s'y seront pas pris à temps T Beaucoup de commerçants du cinéma ne tiennent compte que du public populaire. C'est injuste. Il est énorme et intéressant, mais il n'est pas le seul. Inquiétez-vous plus souvent de l'opinion de l'élite française et ne la fâchez pas. Les artistes, les intellectuels, les savants sont venus difficilement au cinéma. Est-ce pour être déçus? Leur concours est précieux. Ils dirigent 1 opinion, guident les capitaux, portent le fanion du pays. Vous ne pouvez trouver de meilleur soutien que ce petit publiclà. Je sais une salle où nous avions amené une douzaine de notabilités politiques, littéraires, financières, ce qui n'avait d'ailleurs pas été si commode. Le directeur est tout surpris de ne pas les revoir. Que ce directeur relise la liste des films qu'il a donné depuis six mois : il comprendra peutêtre. Ces spectateurs-là préfèrent tel ou tel petit cinéma de faubourg où un directeur compose ses programmes avec amour. Les salles qui ont l'affreux programme « en série » connaîtront plus d'une défection. • Comment? Des vérités de la Palisse? Je le sais. Mais l'évidence n'est pas évidente pour tous, et il faut répéter longtemps Deux et deux font quatre pour que cela se sache. Nous le répéterons. Louis Delluc