Cinéa (1922)

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16 cinéa Cependant que passe le Film à épisodes... Reprenant, adaptant la formule de Stevenson, qui montre comment l'innovation du romantisme a été de placer les être décrits dans un cadre, de les envelopper d'une atmosphère, on saisit immédiatement le passage logique du romantisme au naturalisme, puis l'aboutissement normal à l'art, essentiellement romantique et naturaliste, du cinéma. Mais ce fond, ce cadre, cette atmosphère, il y a plus d'une manière de les concevoir. Tantôt ce seront de pures suradditions, sans rapport nécessaire avec le sujet — ainsi les « beaux paysages » des films « Côte d'Azur » — tantôt l'évocation d'un entourage banalement exact qui n'ajoutera rien à la portée de l'action (comme il est advenu trop souvent pour les mises en scène « naturalistes » à l'Antoine). Pour que le cadre existe artistiquement, il faut qu'il vive et réagisse sur les personnages ; c'est le mérite commun d'œuvres aussi divergentes de tendance que Les Proscrits, Fièvre, L'Atlantide et Caligari. • En principe le cinéaste n'est pas astreint à l'unité de lieu, et son œuvre peut en tirer une vie, une souplesse inconnues au théâtre. Mais ici interviennent les considérations d'ordre mercantile. En Amérique où les grandes firmes sont organisées pour tourner elles-mêmes, le studio comporte assez d'emplacements variés pour que chaque scène se localise adéquatement. En France, le réalisateur, obligé de passer sous les fourches caudines des loueurs de studios, s'efforcera de réduire le nombre des décors ; si, à la rigueur, il peut situer dans la salle à manger la scène qui normalement devrait se passer dans le 8alon, c'est cinq mille francs d'économisés. Et ainsi le film français est, bon gré, mal gré, refoulé vers le théâtre, dont il a tant de peine à se dégager. • En France, les grandes firmes cinématographiques cherchent moins à gagner de l'argent en faisant du cinéma qu'à gagner de l'argent sur ceux qui font du cinéma. Le budget général du cinéma comporte exclusivement deux natures de recettes : les sommes définitivement perdues par les commanditaires — il vaut mieux à tous points de vue que cet apport ne soit pas trop important — et les prix de places versés par les « cochons de payants ». Tout l'effort de publicité devrait donc tendre à attirer le public, à l'amener ou à le ramener vers l'écran, beaucoup plus qu'à persuader les exploitants — lesquels savent parfaitement à quoi s'en tenir — que les films de la maison X. sont d'une qualité supérieure. • Ceci paraît une vérité élémentaire ; en fait les maisons d édition commencent seulement à le comprendre. Et telle firme qui dépensera des sommes considérables pour annoncer se» productions, ne prêtera qu'en rechignant ses clichés au critique qui désirera les faire connaître gratuitement. • L'analjse des détails e8t, au cinéma, une source d'effets variés et amusants. Mais elle doit rester un moyen ; un art qui y verrait une fin deviendrait rapidement aussi monotone et stérile que celui des élèves de Michel Ange, sacrifiant tout au muscle, à la draperie et au raccourci. • Le sifflet d'une locomotive est chose utile à montrer quand il donne le signal d'une séparation ; le marchepied d'un wagon, quand le pied de l'Attendue, descendant du train s'y posera d'un geste hésitant. Mais le cinéaste qui, dès qu'il est question d'un vo3'age, évoque les bielles, les cylindres et les freins westinghou8e0 me rappelle le turc d'Eothen qui, chaque fois qu'on parlait du chemin de fer, proférait avec admiration des « tch., tch., tch. » • Il est curieux de noter tous les gestes expressifs — photogéniques — qui interviennent dans la littérature précinématique, et dans des œuvres dont la conception apparaît au premier abord comme aussi éloignée que possible de l'esthétique de l'écran : par exemple, dans la Princesse de Clèves, 1 instant où la jeune femn regarde le portrait de M. de Nemours; dans Dominique le mouvement de Madeleine s'en veloppant de son écharpe. • Pourquoi un sujet, imaginé et traité par un auteur de talent, riche en vie, en émotion ou en gaieté, fournirait-il un moins bon thème de film qu'un scénario sortant de l'imagination souvent pauvre ou inculte, d'un metteur en scène ? La vérité, c'est que les films tirés de chefs-d'œuvre littéraires ou dramatiques s'exposent à un risque redoutable que ne courent pas les autres : la comparaison avec l'œuvre Je constatais avec mélancolie qu'en passant de France en Angleterre un film pouvait s'alléger de 40 0/0 de ses sous-titres : d'où il résulte que l'intelligence cinématique des Anglais est, par rapport à celle des Français, comme 5 est à 3 : voilà qui est dur pour le peuple le plus spirituel de la terre. Mais voici qui est encore plus dur. En Amérique, The old Swimn hole ne comportait pas un seul soustitre. L'éditeur français annonce triomphalement qu'il a pu n'en mettre que 40 î 40 contre 0 I J'aime mieux ne pas essayer de tirer la proportion. • La modulation à la sous-dominante dans le premier morceau de la neuvième symphonie, à la reprise du' début... Sur l'écran, une modulation lumineuse devrait pouvoir éclater avec autant de puissance. Mais voilà : de tels effets, on les j gaspille à nous montrer un monsieur qui rentre dans sa chambre pour chercher un mouchoir oublié. Lionel Landry. Ce que VouVrage peut montrer, le titre ne doit pas le dire. £ £ £