Cinéa (1922)

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cinéa UN CHEVEU DANS LES PELLICULES M. Millerand est bien ennuyeux. Le film du voyage au Maroc est un enchantement de villes, de paysages, de costumes, de types — il y a des burnous étonnants et des chevaux indescriptibles mais il y a M. Millerand. Ah ! M. Millerand où aehete/.-vous vos binocles ?qui est votre coiffeur? et voire chausseur? et votre chapelier ? et votre tailleur ? Ah I la silhouette du président de la République n'en mène pas large devant les caïds aux souples impassibilités. Nous regrettons Félix Faure, ma foi, et Paul Deschanel. Heureusement, parait Fairbanks. Nette, simple, jeune, gaie, elle a le sens de la scène autant que de l'écran. 11 paraît que ses camarades disent volontiers qu'elle est « au-dessous de tout ». Possible.Moi, je les ai tous trouvés au-dessous d'elle. Dans Stella Lucente, M. d'Auchy a mis de bien charmantes images de Venise dont l'atmosphère aurait rendu le drame tout a fait agréable, si — si le metteur en scène avait songé quelles robes du cinéma doivent être photogéniques. • Dans un récent film, Mlle Robinne représentait une aristocrate russe et, entendant un grand virtuose violoner à sa fenêtre, elle s'écriait : — Ah J un air de mon pays... Et aussitôt l'orchestre attaquait une valse de Rodolphe Berger. • Eh bien ! Pearl White est charmante. Le Casino de Paris ne lui a pas l'ait la part joyeuse. Son sketch est un paradoxe. Du moins eomporte-t-il de charmantes images de cinéma (pas la promenade en avion par exemple) et sa bonne humeur d'actrice improvisée est sympathique comme tout. Le rythme du film est joli. Pas pressé mais bien filé, allègre dans son parti pris d'attardement, il est fait du détail poussé à fond, sans hâte, précisément, et brusquement disparu une seconde avant de nous lasser. Vous verrez de charmantes scènes comme l'arrivée des émigrants, l'adoption par Jackie d'un père sympathique (remarquablement interprété par G. Gillingwater), le déjeuner de Jackie, le tub de Jackie et la joyeuse aventure du montreur de singe pour qui, rêvant de faire une belle quête, Jackie déploie toute l'imagination vocale, mimique, chorégraphique d'Ethel Levey ou de Nina Payne. Oui, oui, c'est du cinéma. Vous avez vu Mon Gosse ? Ce petit Jackie Coogan, trop célèbre déjà, n'est pas encore insupportable. Il n'a pas de talent, mais ne « fait » pas du tout cabot, comme il arrive d'ordinaire à tous les sales moutards que le cinéma rend populaires. Gentil, gai à voir, follement gauche quand il essaie de reproduire ces grimaces tristes où Chaplin lui avait mis un peu de son sacré génie, il divertit le regard mieux que n'importe qui de ses petits rivaux et vous séduira surtout par sa démarche cocasse et son assurance — peut-être encore (pas pour longtemps) inconsciente. On ne parlera probablement pas du réalisateur de ce film et ça n'a pas grande importance puisqu'il a, lui, beaucoup de talent. Il a obtenu une atmosphère délicieuse. Vous retrouverez cette manière de gris si léger, de lumière fluide bien dosée, de cette touche photographique dont on ne souligne pas l'art et la chimie, dont nous sentons le charme. Ce style discret, si nettement persuasif, c'est celui du Petit Lord Fauntleroij, de Dans les Bas-Fonds, du Loup de dentelles, de pas mal d'autres films, car il suffit de dire que ce style-là est bien cinéma. L'Excentrique et Fairbanks, ça aussi, c'est du cinéma. Voilà un film. Evidemment, il y a des gens qui, après Phi-Phi et Dèdè, trouvent ceci mesquin, mais au moins L'Excentrique est une chose qui se laisse beaucoup aimer et qui, je crois, ne se laisserait pas détester. C'est un film, voilà, un film, c'est-à-dire une espèce de machine qui ne provoque pas de discussion supérieure, ou idiote, sur « la mise à l'écran du roman historique », « l'utilité de tourner dans de vrais intérieurs », « l'intérêt de remplacer le plein air par du décor », « l'infériorité du cinéma en regard du théâtre ». etc., etc. L'Excentrique ne fait peut-être pas penser les gens. Que penseraientils ? Pour une fois ils ne pensent même pas à parler... Louis Delluc.