Cinéa (1922)

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cinea man dramatisé qui puisse concourir avec les œuvres de Molière ou de Shakespeare, car, ces génies ont tellement bien conçu leurs œuvres pour la scène qu'un autre mode d'expression eut été impraticable pour eux. Essayez de vous représenter Hatnlet en roman ou en film! Sous cette dernière forme, l'essai a été tenté par le grand interprète shakespearien Forbes Robertson. Devant un programme de cinéma et un programme de théâtre, affichant tous deux Hatnlet, mon choix ne serait pas hésitant. (Le film Hatnlet, créé par la talentueuse Asta Nielsen n'est tiré ni de la pièce de Shakespeare, ni de l'œuvre originale où a puisé celui-ci, c'est-à-dire l'histoire de Saxo Grammaticu8. Il repose sur des documents historiques plus obscurs, soi-disant découverts depuis peu. Ce film n'entre donc pas dans le cadre de mon article; cependant, il montre bien le danger d'utiliser un sujet historique déjà traité dans un chefd'œuvre littéraire, lorsque l'on veut créer un film indépendant.) Je prévois ici une objection : le fait que Shakespeare lui-même, puisait dans des sources étrangères pour les sujets de ses pièces. Par la littérature contemporaine — souvent par une traduction assez défectueuse, ou par ouï dire — Shakespeare apprenait une intrigue, ou le tragique d'une destinée, et plus souvent du domaine de l'histoire que du domaine littéraire. Autour d'un tel fil conducteur, ou même deux ou trois de ces fils, il tramait ses œuvres avec libre invention, sans s'inquiéter d'un texte original, ni de la vérité historique ou de la couleur locale. (Noir Henri IV. Sources : la chronique de Holinshed et un ancien drame. Tandis que la figure classique et inimitable de r'alstalï' est entièrement de Shakespeare.) La question est tout autre lorsque Sjoatrom prend Jérusalem, de Selma Lagerlof, qui est un roman pour tout le public, et le coupe en morceaux pour l'adapter à L'écran. Plus un tel film est fidèle à L'original, plus son propre développement artistique est restreint par les moyens d'es pression appartenant à la forme du roman. 1 . , eu vrc de vient une «traduction « en film. Quand est-ce qu une traduction en une autre langue fct-elle jamais eu en principe la même valeur que l'original? Combien moins satisfaisante doit être encore une « traduction » dune forme d art en une autre! Comme le film vu en général ne peut être servi par de tels procédés, le roman « traduit » est tout autant desservi Même devant les meilleurs films tirés d'oeuvres connues et appréciées sous forme de livres, on se pose spontanément la question: « A quoi sert ce travail? Pourquoi ne pas laisser les livres en paix? » Le cinéma attend son Shakespeare. Il attend les grands esprits qui, doués d'un savoir technique complet, créeront directement pour le film. On annonce de temps à autre que degrands auteurs se mettent à composer pour le cinéma. Mais je ne crois pas que les hommes de la génération Gina PALERME dans Margot disparaissante puissent donner une valeur nouvelle au lilm. Ils ont trop longtemps marché pour mouvoir la meule Littéraire. Us ont vu nuire le m,,, et, comme les vieillards devanl Les jeunes gens, ils peuvent reS8< util au plus une certaine bienveillance d'oncles pour le dernier né d< Ils ne rapprochent pas a\., de vénération et d'humilité. Aussi les scénarios écrits directement pour Le lilm Boni rarement supérieurs à ceux extraits de bon» romans. Mais Les premiers sont pourtant meilleurs en principe, pour la raison susdite. Seulement. me. Ile,., un comparatif. Il existe aussi un SU perlatlf: L'auteur et Le metteur en i .,, une personne. ' ertes, il j aurait alors pin* d'unité dans la con ception et L'exécution; mal». le révère 15 de la médaille, évidemment, est qu'il est plus facile de développer ses dons pour la mise en scène que de se faire naître avec le feu divin, d'où jailliront les idées. En France, pays qui possède le plus grand nombre de ce genre désirable d'auteurs-metteurs en scène, on trouve souvent une bonne technique, mais rarement l'inspiration poétique. Un seul exemple : El Dorado, collection de tableaux d'extrême beauté, visions d'artistes exécutées avec une technique originale et supérieure. Mais, la main sur la conscience, avea-vous trou-. pensées remarquables derrière ce décor remarquable? Ave/ vous decouvert une âme aussi belle que l'est l'enveloppe? Vous ave/ trouvé les inspirations d'un peintre et d'un architecte, mais celle d un créateur spirituel? Un ami m'a dit qu'El Dorado était le plus joli lilm à son gOÛ1 Je demandai ses raisons : .< Il contient tant de visions originales! » « Que dis-tu du sujet? » « Peu de chose, certainement: maison ne voit jamais de sujet de valeur dans les til: Et voilà l'attitude de la plupart des assistants. Le lilm nintéiv-n'amuse que d'une manière superficielle. (Ea majorité des gens m l'ont du ciné-feuilleton et ne goûtent pas même /•.'/ Dorado.) 11 n en peut être autrement, avant que les créateurs eux ■mêmes soient conscients des exigences du Bina et du travail humble et passionné qu'il demande. Ee lilm ne peut se satisfaire d'œuvres laites en intermède. 11 a le droit de réclamer d'autres inspirations que celle provenant de l'esprit de lucre. Quand Le 'grand auteur ne fera pas de scénario en tonte hâte, en un après midi, entre un roman lini et un début de pièce, quand il ne fera plus couper et arranger son m. mus crit par un •• expert •■ en scénario, quand, an , onlrairc. il donnera h meilleur de ses ellolts. quand il aura saisi à fond Les exigences du film, quand il voudra travailler intimement avec un metteur en scène, bon technicien et sensible à L'art, on. ••» meilleur cas. lorsqu'il pourra lui même |OUer le deux l'oie et surinon ter les difficultés de la mise i d alors, le public commence) pecter l'écran et à \ on mémi art est doné de plus de 1 1< a< Les antres.