Cinéa (1922)

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16 cinéa avec un millionnaire de Chicago, tandis qu'Owen Moore, L'ex-époux de Mary Pickford, lui, atteignait au comble de l'optimisme, en scénarisant et en filmant sa propre mésaventure matrimoniale. .Mais comment, en dénonçant l'optimisme yankee, ne pas évoquer la figure de son apôtre, Marie Baker Eddy, qui, a la fin du siècle dernier, fondait à Boston la religion de la Christian science. L'église nouvelle est accueillante aux foules, avec sa promesse du bonheur immédiat ! Pour Mary Eddy, le mal physique ou moral est une invention Inventions encore que la maladie, la faim, le dénuement, le remords! Croyez que vous êtes triomphant, parfaitement heureux, parfaitement bon, que tous vos amis «ont sincères, que la vie est admirablement belle et elle sera belle pour vous! C'est l'optimisme mystique, et par centaines de mille les Américains se sont rués vers lui, ont bâti en son honneur des temples par centaines, ont déposé à ses pieds des fonds de propagande par millions. Si bien qu'aujourd'hui, vingt ans à peine après la mort de la prophétesse, trois millions de Christian scientists chantent l'optimisme dans plus de trois cents temples. L'Evangile pessimiste des siècles de persécutions a mis trois siècles pour faire le chemin que l'Evangile optimiste de Marie Eddy a parcouru en trois décades, et les premiers servi teurs du Christ n'étaient que des esclaves et des mendiants, tandis que les néo-chrétiens des Etats-Unis, comptent parmi les gens les plus riches et les plus considérés d'Amérique. Réussite oblige! Mary et Douglas xonlchri.stianscientists pratiquants. V En tournant chez Gharlie Chaplin J'ai connu dans la vie le type même de celui que, depuis quinze ans, Charlie Chaplin immortalise. Il fut mon unique ami. Dès les bancs du collège, il amusa ses camarades pour les farces desquels il fut invariablement puni. Cornet d'encre, boulette de papier mâché, hanneton traînant un fil à la patte ? C'était toujours lui le coupable. Après cinq échecs au bachot, il trouva la situation de gérant dans un journal pour rire. Le lendemain de son entrée en fonctions, il était emprisonné pour un article indécent qu il n'avait pas lu, mais duquel il était légalement responsable. Sa guigne était invraisemblable, hilarante La grippe, la jaunisse, le mauvais rhume le visitaient périodiquement. Transporté à l'hôpital à la suite d'une entorse, il fut par erreurétendu surlatabled opération, où on lui ouvrit le ventre. Il devint chauve après l'application d'une lotion capillaire par un coiffeur en renom. S'étant aventuré sur le fauteuil d'un dentiste, il se vit extraire quatre incisives parfaites par le praticien devenu soudain fou et qui le poursuivit jusque dans la rue en brandissant une pince sanglante. Il ne riait jamais, mais sa vue faisait rire les autres. Il avait une face contractée, des gestes saccadés, une démarche raide. Quand il pleurait, il devenait plus risible encore. Dans quelques circonstances, il se comporta mieux qu'en honnête homme : il prit la défense du faible, respecta la femme d'un ami, paya des dettes d'honneur. Mal lui en prit. Il passa pour une « poire » et on riait davantage. Mais il parvint au haut comique quand, ayant été volé par un pickpocket, il fut arrêté à la place de son voleur, traduit en jugement et condamné. Il ne dut l'application de la loi Bérenger qu'au fait d'avoir fait rire ses juges qui lui dirent : « Allez! Mais ne recommencez plus vos farces! » Comment pouvait-il ne pas recommencer? Il se maria, fut battu et dut se déclarer content. Quelques mois après le passage d'un cirque marocain, il devint père d'un enfant noir. Je l'ai vu promener le petit moricaud. Toute la ville riait. La guerre vint. La destinée voulait que le « comique » fût au premier rang de la grande tragédie. A Charleroi, sur la Marne, à Soissons, à Verdun, il faisait rire au plus fort de la bataille. Il fit rire sa section, son bataillon, les cuistots, le major, le régiment, le général. La mort elle-même lui préparait une fin comique. Son corps, à la suite d'une explosion de mine, fut projeté intact au sommet d'un arbre où, fiché dans une position risible, invraisemblable, il semblait se contorsionner encore pour faire rire. Tant que sa compagnie garda la tranchée, on ne se moqua pas trop, parce qu'il avait été brave et qu'on , lavait connu vivant; mais à la relève, les nouveaux venus s'en donnèrent à cœur joie. Il fut Julot, Gugusse, le spectre du père Dupanloup des chansons de marche grivoises. Il se dessécha, se momifia. Il n'en était que plus drôle. Un matin d'hiver, comme il était blanc de neige, on le baptisa Footit, du nom d'un clown célèbre. Les artilleries adverses semblaient le respecter pour qu'il put faire rire par delà la vie. On ne le descendit de son arbre qu'au jour de l'armistice... (A suivre.) Ferri-Pisani.