Cinéa (1922)

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clnéa ■ IMAGES MOUVANTES II fut un temps — pas encore bien lointain — où « cinéma » était synonyme d'action violente, d'action déchaînée dans un mouvement au r\ thme échc\ clé. Nous nous laissions emporter dans tics plaines sans fin par le galop fou d'un cheval de cow-boy. Les pistolets tenaient une bien grande place, les bandits aux allures redoutables enlevaient les filles trop blondes. Et devant cet assaut d images vertigineuses, nos yeux fatigués s'amusaient follement, mais se lassèrent vite. Alors, nous vîmes des choses bien plue ennuyeuses. Nous vîmes de fausses femmes du monde, des meubles clinquants, des perruques trop frisées et des robes trop somptueuses. Ce fut la vogue des Francesca Bertini, des Lyda Borelli et des Pina Menichelli. Ces Italiennes nous apparurent avec des gestes exagérés, des mimiques excessives, mais nous n'en savourions pas moins — parfois le lent ondoiement d'une démarche ou le balancement d'un corps harmonieux. Les écrans français furent dès lors prodigues des allures théâtrales de Gabrielle Robinne, des stupides grimaces de Prince-Rigadin. Max I.inder (qui n'était pas encore le fin comique actuel), apportait une gesticulation trépidante et sans charmes. Heureusement que pendant ce temps, l'Amérique travaillait. Et lorsque parurent sur nos écrans ces pages lumineuses, franches et hardies, parmi lesquelles je citerai pèle-mèle ; «Peinture d'âme, Pour sauver sa race, lue aventure à NewYork, Marie-les-Haillone,* les noms de Charles Ray, Louise Glaum, William llart, Bessie Love, Douglas Fairbanks, Mary Pickford, nous furent révélés. Ces « stars » nouvelles nous enchantèrent par leur jeu simple, direct, mais aussi par leur amour du mouvement et de l'attitude. Puis, avec les premiers grands réalisateurs tels que Griffith et Thomas Ince, vinrent la perfection techni que, les recherches du beau geste, le maniement des foules. Des films à grand spectacle furent montés, des cités bâties à coups de millions de dollars, des jeux de lumière habilement combinés. Et cela, pour le seul plaisir de nos yeux. Car, en vérité, y a-t-il encore thème plastique plus digne d'être admiré que cette splendide et audacieuse Chute de Bahylone dont tous les éléments sont d'un ordre purement visuel ? Parlerai-je des moments intensément rythmés de la Naissance d'une Nation, des Cœurs du Monde, de la Colère des Dieux, de Civilisation. Et dans un genre moins grandiose mais aussi puissant, de l'angoissante bataille de l'Homme aux yeux clairs, du train en marche dans la partie moderne d'Intolérance, de la brillante chevauchée de la Vierge de Stamboul, de toutes ces visions plus ou moins hardies, mais toujours éminemment photogéniques : les tempêtes, les eaux tumultueuses d'un torrent, les avalanches de neige et les forêts profondes — toutes ces images enfin qui font du cinématographe un art, un art unique et pré LILLIAN GISH dans Le% Deux Orphclih Les noms de certains metteurs en scène devinrent alors célèbres de par leur manière de « voir » et de noua faire « voir » : Maurice Tourneur, Georges Fitzmaurice, Mack-Sennett, Reginald Barker, Allan Dwan, Fred Niblo. Si je n'ai point évoqué encore la silhouette désabusée de Charlie Chaplin, c'est qu'il est plus qu'un réalisateur au sens véritable du mot. Animateur prodigieux, il pétrit, pour ainsi dire, toutes les misères humaines avec le masque de ses artistes, et nous offre l'amère joie de contempler ses œuvres et sa face bouffonne où tout son génie se reflète. La France eut bientôt, elle aussi, ; ses maîtres : Abel Gance, metteur en | scène puissant qui créa des modes d'expression nouveaux et anima avec une science rare les talents de Séverin-Mars et d'Emmy Lynn ; Marcel L'Herbier, Louis Delluc, Léon Poi-i rier et quelques autres. Il né faut pas oublier, non plus, l'admirable série des films suédois, l'âpre et forte mélancolie de leurs paysages, l'immensité de leurs plaines neigeuses, leurs ciels gris et leurs maisons basses. Il ne faut pas oublier Les Proscrits, Le Trésor d'Arne, Le Monastère de Sendomir, La Charrette Fantôme et le grand nom de Victor Sjostrom. Pendant qu'aux Etats-Unis de nou j velles « stars » apparaissaient, le cinéma français manquait d'interprètes : Suzanne Grandais fut délicieuse, Andrée Brabant est charmante, Marcelle Pradot délicate et distinguée. Geneviève Félix, Blanche Montel, Myrga.Signoret, Jaque Catelain, Armand Tallier, Modot, sont dignes j d'être remarqués. Cependant je ne vois que deux merveilleux artistes dont le tempérament, le jeu et la sensibilité puissent égaler le talent d'une Nazimova, d'un Sessue Hayakawa ou d'une Norma Talmadge, — je veux dire Eve Francis et André Nox. Je ne m'étendrai pas maintenant sur la science et l'intensité de leurs expressions, car je vais consacrer < ici même une étude sur l'art du mou t vement et de l'attitude au cinéma. Marianne Alby.