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vent du cinéma... il y en a soixante à qui, avant dix ans, le cinéma aura retiré leur gagnepain. Déjà des concerts de quartiers, qui en tretenaient d’un bout de l’année à l’autre une troupe d’artistes ont fermé leurs portes et résilié le personnel pour passer aux mains d’entreprises cinématographiques. D’autres concerts qui ont résisté ont restreint leurs engagements et « le ciné » occupe une heure de spectacle au détriment des quatre ou cinq « numéros » qu’il remplace et ne nourrit pas.
Le café-concert, qui avait subi les atteintes désastreuses du cinéma, avait cependant conservé sa « bastille » ! La revue de café-concert et de music-hall, ce genre si particulier, propre à l’esprit national, ce spectacle fait d’allusions, de critiques, de mots d’esprit, de rapprochement ingénieux où le dialogue et la « manière » étaient tout, semblait de par sa nature même devoir échapper au film. Eh bien, non, la revue elle-même n’était pas à l’abri du sabotage cinématographique. Paris a vu s’étaler sur ses murs des affiches démesurées, annonçant qu’on allait donner une revue cinématographique avec deux commères, une de jour et une de nuit...
Et rien que cette classification est tout un poème... Dans la salle obscure, pendant que sur l’écran trépident des personnages épileptiques, à l’avant scène, à côté des musiciens aveugles, une commère bonimente... commentant les tableaux successifs... Pourquoi pas un phono? Est-il besoin d’engager une jolie femme, une de ces vedettes que l’on se plaît à admirer sous l’éclat du « plein feu », pour la colloquer dans l’ombre d’une cave et l’obliger
deux heures durant à dévider une « explica tion » fastidieuse?
Est-ce un progrès?
Assurément non! Et je doute que les revues cinématographiques nuisent beaucoup aux revues de nos music-halls.
Mais néanmoins, il faut faire état de cette tentative pour en tirer un enseignement.
Certes, le cinématographe est une invention admirable, un procédé de vulgarisation encore inégalé, mais que l’on n’aille pas prétendre que le cinéma peut et doit remplacer l’art du théâtre dans toutes ses manifestations. La faveur marqué du public pour les spectacles cinématographiques est incontestablement justifiée, mais on reconnaîtra que le cinéma, pour aussi parfait qu’on l’imagine, n’est jamais qu’une « reproduction » qui n’a jamais la saveur de l’original.
Pour les artistes, c’est un concurrent dan gereux qu’ils ont armé eux-mêmes en lui cédant toutes leurs recettes de rire et de comique. Qu’ils prennent garde d’être supplantés par ce nouveau venu et qu’ils avisent à employer les moyens propres à réfréner ses ambitions exagérées.
Le cinéma doit être une des branches de l’industrie théâtrale, il ne doit pas lui porter atteinte et encore moins l’annihiler.
Incontestablement le cinéma assure, à quelques artistes qui se sont spécialisés dans la fourniture des films, des cachets parfois considérables (surtout au début, car je me suis laissé dire que les prix avaient sensiblement diminué) et une publicité qui dépasse la portée des autres procédés de réclame. Mais pour un
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