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DV THÉÂTRE AV CINÉMA
II
Du Scénario
(Suite)
Je le répète intentionnellement, le metteur en scène qui ne sert au théâtre qu’à établir la mise en scène et à faire comprendre aux artistes la pensée de l’auteur, joue un rôle beaucoup plus important au cinéma. Les auteurs ont eu le grand tort de se désintéresser, au début, du cinématographe qui leur apparaissait comme une plaisanterie ne pouvant durer que quelques années et ne devant remporter qu’une faveur passagère du public.
Aussi, à l’heure actuelle, maintenant qu’ils sont effrayés de l’essor admirable du cinématographe, ils veulent remonter le courant et rattraper les années perdues. T rop tard ! Les metteurs en scène de cinéma, dont la plupart ont débuté il y a plusieurs années et qui ont suivi de très près les progrès réalisés constamment, possèdent seuls le métier indispensable.
Les auteurs dramatiques savent mieux que personne ce que l’on entend par métier. Deux exemples saisissants nous ont été offerts cette année : Tout à coup, de MM. Guy et Paul de Cassagnac, joué au théâtre Sarah-Bemhardt par la grande tragédienne et par l’excellent comédien Dumény; Ce quil faut taire, de M. Arthur Meyer, interprété par Vera Sergine, cette merveilleuse artiste, et par Dumény, déjà cité, prouvent surabondamment qu’on ne s’improvise pas auteur dramatique. Il faut bien connaître les goûts du public et lui accorder tout ce qu’il demande. C’est un métier qui s’acquiert comme tous les autres par des années de travail.
Au cinéma, l’exemple est encore plus frappant. Je connais un auteur dramatique qui disait textuellement : « Le cinéma, ça n’est pas difficile. Qu’est-ce que c’est qu’un scénario, je vous le demande, j’en pondrai deux tous les matins en mettant mes chaussettes. »
Or, le hasard a voulu que cet auteur dramatique devienne directeur-metteur en scène d’une société de film.
Il s’est alors rendu compte que les scénarios ne se trouvaient pas sous les sabots d’un cheval, et il a dû abandonner son entreprise après quelques mois d’infructueuse tentative.
Un auteur dramatique aurait pu renseigner la commission des auteurs chargée d’étudier
la question du cinéma. Cet auteur est sociétaire depuis longtemps; il est fils et petit-fils d’auteurs, il connaît admirablement le théâtre et le cinéma. Il s’appelle Michel Carré. On ne l’a pas consulté. On ne lui a pas demandé de faire partie dé cette commission ou alors il s’est récusé... mais cela m’étonnerait.
M. Michel Carré, qui s’occupe du cinéma depuis longtemps y a connu et y connaît encore de retentissants succès comme auteur et comme metteur en scène. Il sait, j’en suis certain, toutes les difficultés, tous les écueils que l’on rencontre journellement sur sa route.
Il aurait pu dire que la vente des films en France est tellement insignifiante que nous devons surtout compter sur les goûts des publics étrangers (surtout d’Amérique et d’Angleterre) et qu’il faut savoir ce qui leur plaira. Il aurait dit qu’en Angleterre, il existe une censure et qu’il est facile de prévoir que tel ou tel scénario sera refusé ou accepté.
Il aurait dit également que l’Allemagne n’accepte que tel ou tel sujet.
Il aurait dit bien d’autres choses intéressantes.
Et les auteurs auraient sans doute compris que le metteur en scène doit connaître tout cela, se tenir constamment au courant des moindres changements et satisfaire autant que possible les spectateurs du cinéma et les censures de tous les pays.
Les auteurs se seraient alors rendu compte que leurs scénarios pèchent par bien des points et que l’adaptation de leurs œuvres au cinéma est plus périlleuse encore que celle qui consiste à mettre un roman au théâtre.
Je connais des auteurs qui se sont scandalisés parce que le metteur en scène en avait trop pris à son aise en adaptant leurs pièces. Mais se sont-ils assez inquiétés des pays étrangers, je le répète, les seuls qui nous intéressent vraiment.
Les films français s’exportent beaucoup actuellement et c’est pourquoi nos grandes maisons sont en assez bonne posture sur le marché mondial. Mais pour arriver à ce résultat, il a fallu se livrer à une étude approfondie.
Et les metteurs en scène, seulement, parcequ’ils sont les seuls à s’être contraints à ce travail fantastique, peuvent aujourd’hui faire des scénarios ou des adaptations susceptibles de rapporter à la maison d’édition les bénéfices nécessaires à toute entreprise commerciale.
Dufilm.
{A suivre.)