Cine-Journal (Sep - Oct 1912)

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67 — Psychologie du Cinéma Le succès du cinéma reste incompréhensible à bien des gens cultivés: ils boudent à ce théâtre populaire qui les choque par les scénarios mélodramatiques et les grosses farces. La vérité a qu'il est surtout contre lui d'être un art de reproduction; et les raffinés n'aiment guère ces procédés, notamment que la photographie se mêle de rivaliser avec le dessin ou le phonographe avec le chant. Aussi dissimule-t-on le plaisir qu'on est étonné d'éprouver parfois au cinéma, et je connais plus d'un littérateur distingué qui aime les spectacles de l'écran, mais s'y rend en cachette. Je voudrais essayer d'expliquer ce goût nouveau et chercher quelles raisons peuvent le justifier. * Le cinéma est bien des choses à la fois. D'abord un moyen d'information; et quand il montre des pays inconnus, une rue vivante du Japon, un intérieur hindou, lorsqu'il vous narre par des tableaux un événement récent, il vous donne de tout cela des impressions de réalité qu'aucune autre traduction ne saurait vous apporter aussi précisément. Dans ce sens, il sera un instrument historique incomparable. Il est instructif dans des matières qui échappent à l'observation du public: en raccourcissant le temps il fait assister aux mouvements d'une fleur, au développement d'une plante. Il peut montrer les infiniment petits, le grouillement de la vie microscopique, des microbes. Plus simplement il permet de regarder le « comportement » des animaux, leurs habitudes, leurs actes, leurs gestes, la manière dont ils se nourrissent et luttent. Et déjà ces scènes sortent du cadre des notions élémentaires. Lorsqu'on assiste aux combats féroces que des espèces différentes se livrent sous l'eau tranquille, il est sûr que cela émeut le sentiment et que cela excite la réflexion du spectateur le moins ouvert à la philosophie de la nature. Toutes ces reproductions de scènes auxquelles nous ne pouvons assister et qui sont si éducatives pour les curieux de tous les âges sont bien le domaine propre du cinéma. Je ne sais si c'est de l'art, ni dans quel ordre on peut classer ces spectacles ; mais ils sont intéressants, instructifs et suggèrent — par le mouvement de la vie — des pensées qui dépassent vraiment le champ de la simple lanterne magique. Avec ses scénarios, le cinéma est encore un véritable théâtre. Et ce théâtre est spécial, — d'abord, par les trucs photographiques, qui permettent de produire des scènes irréelles. On peut ainsi faire apparaître et disparaître des personnes, leur faire accomplir des actes impossibles dans la vie réelle, des ascensions, des chutes, les mettre en apparence en présence d'animaux sauvages ou les situer dans les lieux où elles n'auraient pu se trouver. Il y a là des combinaisons susceptibles de traduire les imaginations les plus diverses, depuis la féerie jusqu'à la comédie fantastique. Mais jusqu'ici reconnaissons qu'on n'a tiré de ces moyens que des scènes assez naïves. La projection cinématographique a sur le théâtre r avantage d'évoquer devant les yeux du public des scènes, des sites, des êtres, qu'il serait impossible d'amener sur le « plateau ». Lui seul peut donner des décors authentiques, une villa sur la Corniche, une rue de Londres, une futaie de Fontainebleeau. Et ces cadres ont parfois une couleur, une lumière merveilleuses, auprès desquelles le talent des peintres décorateurs de nos théâtres paraît bien froid. Ici, c'est le cinéma qui est le vrai et le théâtre artificiel. On a le moyen de représenter sur l'écran des spectacles impossibles à réaliser au théâtre, soit à cause de leur danger, soit parce que la succession des images est trop rapide pour la machination d'un théâtre. Ainsi, on a abondamment combiné des fantaisies qui amusent beaucoup le public populaire, une poursuite faite à travers mille obstacles qui sont successivement renversés, — étalages mis à terre, échafaudages écroulés, plafonds éventrés. En vérité, tous ces éléments n'ont encore été employés que dans des scénarios d'un art assez fruste. Mais ce sont des moyens nouveaux, yui étendent le pouvoir de ce théâtre spécial, dont il faut considérer moins ce qu'il a fait que ce qu'il est capable de faire. ** La reproduction cinématographique plaît d'abord dans la mesure où elle est — comme la photographie — une reproduction, c'est-àdire un aspect inaccoutumé qui éveille 1 intérêt de l'esprit. C'est par cela que la photographie d'un être cher que l'on a près de soi demeure captivante. Il y a autre chose. Un paysage peint séduit; et cependant on peut le voir au naturel. C'est ainsi qu'en le composant et par le choix des éléments l'artiste a exprimé sa pensée et ajouté à la nature. Mais le cinéma choisit aussi et un artiste peut s'y révéler. Comme les autres arts, il est donc une expression intellec