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8 LE COURRIER CINÉMATOGRAPHIQUE
nand seul est sauvé. Dans le délire une vision horrible lui trouble le cerveau et, revenu à lui, le comte Ferdinand, que le film nous a montré promené dans les enfers, prêche au peuple étonné la concorde et la paix.
L'Empereur le fait jeter en prison.
À ce moment, nous voyons défiler les troupes nombreuses des nations alliées. (Il est regrettable que ce soient celles-là même que nous avons applaudies à Paris le 14 Juillet dernier.)
On annonce la mort du comte Ferdinand. L'Empereur vient à la prison. Et c’est alors dans une hallucination folle le défilé à travers un monde irréel sous la conduite du Christ, personnage merveilleusement situé dans ce film. Au livre de l’humanité l'Empereur voit la page noire des maudits. Il interroge le Christ. « Repens-toi » lui dit l’homme-Dieu et, agenouillé, l'Empereur reçoit l’absolution.
De retour au Palais celui qui déchaîna la guerre et fut cause de tant de malheurs et de deuils demande la paix. Elle est signée sans que nous sachions comment. Le peuple revient dans les villages qui ne semblent pas avoir soufferts et le travail des champs reprend comme avant la catastrophe.
L'’allégorie est terminée. On attend la conclusion. Il n’y en aura pas.
Cela tient de la note à l’Entente de M. Wilson et de « Au-dessus de la Mêlée » de Romain Rolland.
Une faute a été commise. Il fallait rester jusqu’au bout dans le domaine allégorique.
Mais il y a dans ce film un effort immense et des choses nouvelles qui ont fort intéressé les techniciens.
On a trop voulu prouver. Les tableaux se succèdent trop vite: actions militaires, bombardements, torpillages, luttes d’avions : on n’a pas le temps de les goûter.
On doit néanmoins louer l'effort.
Le défaut de conclure nous laisse songeur. Et nous nous demandons si ce film n’est pas une tentative de propagande pour la paix. La question mérite d’être posée.
En dehors de ces raisons, je suis heureux de constater de réels efforts, mais je crains un peu que ce film n'ait pas près du public tout le succès qu'il mérite.
E. RicHarD LaNEs.
CHAMBRE SYNDICALE DE LA CINÉMATOGRAPHIE
Section des Loueurs
A la suite de la réunion tenue à la Chambre Syndicale, le 16 février 1917, MM. les Loueurs soussignés s’engagent d'honneur à ne pas dépasser, en aucun cas, la réduction de 15 0/0 accordée à MM. les Exploitants en raison des récentes restrictions administratives.
(Cette diminution ne s'applique qu'aux Exploitants qui sont privés par décret ministériel de quatre jours de représentations par semaine.)
Ont signé : MM. Hache, Gaillotte (Etabl. Pathé) ; Costil (Etabl. Gaumont) ; Astaix, Kastor et Lallement (Agence Générale Cinématographique) ; Wall, Deschamps (Union) ; Aubert (Etabl. Aubert) ; Laurent (Maison Harry) ; Bonaz ; Galiment ; Roy ; Harry ; Fred ; Adam ; et Mlle Halley.
Le Cinéma Art social
Dans Le Conseiller Municipal, M. Charles Danier poursuit ses intéressantes études sur le cinéma, art social.
Son article paru dans le numéro du 3 février est des plus intéressants. Aussi ne résistons-nous pas au plaisir de le citer en entier.
M. Charles Danier remonte aux sources mêmes de l’art ; il les étudie avec un soin particulier et un rare talent de philosophe et de psychologue.
Les désirs qu’il manifeste aujourd’hui se trouvent réalisés par un certain nombre de maisons d'éditions étrangères, telles que La London et La Nepworth.
Les maisons françaises suivent le mouvement, avec plus de timidité peut-être ; néanmoins en envoyant chaque semaine les productions nouvelles, on sent que de généreux efforts sont accomplis en ce sens.
Les articles de M. Danier viennent à leur heure, en confirmatur de tout ce que nous avons dit à propos des progrès à réaliser dans l’art cinématographique.
M. Charles Danier écrit :
Les Formes de l'Art
L'artiste conçoit et éxécute. Mais alors que dans la conception, sa puissance créatrice, libre de toute entrave, ne connaît de limites que sa propre défaillance, force lui est, dans l’exécution, de s’incliner devant une nécessité étrangère qu’il ne lui appartient ni de supprimer, ni de négliger. Le génie le plus sublime de la science, maître absolu de ses hypothèses, ne peut se dispenser, dans ses calculs pratiques, de tenir compte des lois naturelles. De même lartiste, prenant en main le pinceau ou la plume, va se heurter aux lois formelles de son art. Dans la création artistique, qui représente comme la lutte entre l'esprit et la matière, celle-ci se trouve transformée, idéalisée ; mais elle résiste de son mieux en sauvegardant son principe, en définissant les moyens de l'artiste. Et c’est elle qui, par sa nature, impose à l’art sa forme et le spécifie. Ainsi, une même conception artistique peut se réaliser sous des formes distinctes, selon la matière en laquelle elle s’incarne ; ainsi le même sentiment peut se traduire en tableau, en chant ou en poème.
Son But
Mais au-dessus des formes particulières de lart plane un but général et unique : c’est toujours, à quelque degré, l’imitation de la vie, de cette vie changeante, nuancée à l'infini, qui s’épanouit dans le temps, et qui en dépit des apparences, se résout presque toujours en mouvement. Nous objectera-t-on les images de la nature au repos ? Il n’y a point de semblables images. Mèmes celles qu’on qualifie de natures mortes perdraient à la fois leur intérêt et leur raison d’être si elles n'étaient animées d’une vie secrète que nous devinons, que nous sentons en les admirant. Contemplez cé paysage endormi ; emplissez-en votre âme ét laissez battre