Le Courrier Cinématographique (December 1917)

LE COURRIER CINÉMATOGRAPHIQUE Un fait-divers La lecture de L'Œuvre est toujours instructive. D'abord, Téry y fait un cours de diffamation. Par les temps qui courent, il n’est pas inutile de prendre des leçons de calomnie k L'autre jour, c’est à moi que Téry s’en est pris. À propos d’un dessin sur l'Italie, paru dans Le Journal, il m'a accusé de ridiculiser nos alliés, lui qui a mené, dans L’Œuvre, une : ca peut toujours servir. Campagne contre l'alliance franco-italienne ! Aujourd’hui, Téry se rabat sur le Cinéma, sa bête noire. — Mais, Téry n’est plus cinéphobe! Vous ne lisez donc pas les échos? 11 a prêté son auto pour lourner un film. Si, je lis les échos; je lis même les faits-divers; et voici celui que je découvre dans L’'Œuvre : Le Cinématographe adoucit les mœurs « Toulon, 19 novembre. — Une bagarre a éclaté entre Jeunes gens, dans un établissement cinématographique, situé faubourg du Pont-du-Laz, « Il y a eu une douzaine de blessés, dont cinq grièvement. « La police a procédé à vingt-cinq arrestations. » Evidemment, si ces jeunes gens avaient été au café, ils ne se seraient pas battus; c’est la faute du cinéma. Il faut supPrimer le cinéma! C'est aussi grotesque que si on lisait ceci : Le gigot adoucit les mœurs « Toulon, 19 novembre. — Une bagarre a éclaté, entre ménagères, dans une boucherie située faubourg du Pont-duLaz. Il y a eu une douzaine de blessés. La police, etc. » Une vieille dame pénètre dans une mercerie, demande deux sous de petit cordonnet, et est mordue par un chien. Evidemment, c’est la faute... de la mercerie! Il faut supprimer les merceries! Le jour où Téry mourra, dans son lit, d’une envie rentrée, ce sera la faute de son lit : ilfaudra supprimer le lit! Espérons qu'avant, nous aurons la satisfaction d'apprendre qu’un rentier est mort subitement, en lisant L’Œuvre, et qu’en conséquence (comme ce ne sera pas la faute de l’anévrisme), on a supprimé L'Œuvre, tout simplement! MARCEL ARNAC,