Le Courrier Cinématographique (Mar 1919)

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10 LE COURRIER CINÉMATOGRAPHIQUE Le Cinéma aux Champs On cherche, actuellement, par tous les moyens, à rendre à la terre tous ceux qui l’ont quittée jadis. La terre, c’est ce qui nous permet de vivre, c’est d’elle que nous vient la nourriture indispensable à notre existence et l’une des causes de la vie chère, à côté dés mercantis et des intermédiaires, est due au petit nombre des cultivateurs. Il est certain que depuis quelques annnées la ville attire les jeunes hommes. Au sortir de l’école, après les années de régiment qu’ils passent nécessairement dans une ville, ceux-ci veulent rester au milieu des plaisirs, dans cette vie factice qui leur plaît plus que la campagne. Ce goût pour la grande ville a fait bien des malheureux, car l’homme sain qui cultive son champ est souvent plus heureux que l’ouvrier qui s’esquinte dans une usine en respirant un air vicié et qui rentre, le soir, dans un taudis où l’hygiène n’est jamais respectée. Pauvres gens! Le Cinéma peut et doit jouer un grand rôle dans ce retour à la terre que les pouvoirs publics cherchent à favoriser le plus possible . Il faut absolument que l’on crée à l’usage des campagnes des cinémas ambulants qui iront de communes en hameaux porter la bonne image et récompenser le cultivateur et sa famille. Ces cinémas ambulants ont été déclarés nécessaires au front pour distraire nos soldats. Ils apportaient un peu de gaieté, un peu d'illusion à ces braves gens qui luttaient pour une Idée, de tout leur cœur, de toute leur âme. Ils étaient uh repos bien employé, un arrêt dans la bataille de chaque jour. Et c'était une détente! Les cultivateurs ne sont pas heureux, c’est indéniable; leur métier est dur, fatigant. Ils sont toujours seuls à pousser la charrue, à semer, à faucher. La femme est au poulailler, aux écuries, aux granges, au lavoir. Ces gens n’ont aucune dlistraction de l'esprit. Le soir venu, ils ne peuvent même pas lire le journal, car ils sont éreintés et il faut une attention soutenue pour lire, surtout quand on ne sait pas très bien, et c’est le cas la plupart du temps. Tout jeune, au sortir de l’école, le fils du fermier a mis la main à la pâte: tour à tour berger, conducteur ou faneur, on a tiré parti de ses jeunes forces et l'enfant, harassé de fatigue, n’a pensé qu’au repos quand il le pouvait et a oublié en quelques mois tout ce qu’il avait appris! C’est l’histoire de tous les illettrés, qui sont encore si nombreux, malgré l'instruction obligatoire! Eh bien, sans prétendre que le film pourrait devenir, dès maintenant, un moyen puissant mis au service de l’enseignement et sans revenir sur ce sujet qui a été étudié par de plus compétents que moi, je suis sûr que le cinéma rendrait à la campagne des services énormes. Tout d’abord, il serait une distraction saine pour des hommes qui n’en connaissent pas d’autres que le café où 0h s’abrutit et où on s'ennuie! Il apprendrait à ces hommes qu’il existe un moyen de Jeur . montrer ce dont chacun rêve toujours, les voyages, les aven” tures, les belles histoires ! Les enfants y puiseraient un enseignement certain, à la condition toutefois que les programmes: soient adroitemen! faits, mélangeant du documentaire au comique et des voyas* au drame. Cela leur permettrait, en outre, de ne pas oublier la lecture, puisqu'ils pourraient lire les sous-titres. Le jour où le cinéma s’introduira dans les plus petites com munes, et c’est possible, on aura certainement trouvé un moy€l de rendre à la terre tous les bras dont elle a besoin. Si le gouvernement tente aujourd’hui un effort nécessallé il ne saurait trop encourager les philanthropes qui prendront à cœur cette mission, car il s’agit bien d’une mission. On ne saurait évidemment, en parcourant des villages, des com munes, des hameaux où les habitants sont parfois méfants € peu disposés à verser quelques sous pour un spectacle, réaliser dés bénéfices. Celui qui partira pour un semblable voyage remplira U beau rôle dont il aura le droit d’être fier. Les pays les plus riches sont ceux qui produisent les den rées nécessaires à la vie, et c’est facile à comprendre, car Les ouvriers, les employés, les bourgeois seront toujours forcé d'en passer par eux. Il faut donc encourager l’agriculture par tous les moyen qui sont en notre pouvoir, et je crois que le cinéma est u? des meilleurs, si nous ne voulons pas mourir un jour, au milieu de toutes les merveilles mécaniques et artistiques que nou° aurons accumulées, faute des légumes et de la côtelette indis pénsables. L'homme, de nos jours, n’est plus un instrument, n’est plus un animal. Il faut donner un aliment à son esprit, à son cel” veau. Si l’homme a besoin d’agir, de dépenser ses forces, il à besoin aussi de réfléchir, de penser. Le Cinéma qui est et qu qui restera toujours un moyen merveilleux de parler au peuple: de lui faire comprendre bien des choses qu’il ignore, de Jui donner une distraction nécessaire, sera, à la condition toute” fois que l’on veuille bien s’en occuper, une des façons les plus faciles de garder l’homme aux champs et même de faire reve” nir celui qui s’en était allé à la ville, attiré par les belles lumières, par les vitrines, par les plaisirs et qui, peu apte ? se défendre au milieu de cet enfer, longe les murs tristement le soir en rentrant d’un travail fatigant qui ne lui rapportt même pas ce qui lui est nécessaire pour vivre sainement. E.-L. FoUQUET. 3