Le Courrier Cinématographique (Mar 1919)

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14 LE COURRIER CINÉMATOGRAPHIQUE L'ART DE CHAALIE GHAPLIN © L'art dé Charlie Chaplin, dit « Charlot ». C’est le Deburau d'aujourd'hui. — Son dernier film : Charlot ne s’en fait Len ep rm pas. Le #2 Charlot ne s'en fait pas, tel est le dernier film interprété par Charlie Chaplin et tourné dans les salles parisiennes. Le titre serait plus exactement : Charlot policeman. Le sujet est très simple. Cela se passe en Amérique. Le vagabond Charlot entre dans une salle où un pasteur protestant est en train d’évangéliser le peuple. Le déclassé est touché de la grâce. Il est surtout séduit par les beaux yeux de la fille du prédicant. Il jure d’être désormais un honnête homme. Dans la rue, à la porte d'un commissariat, il avise une affiche : On demande des policemen. € Voilà mon affaire! » se dit Charlot. Cependant, il hésite quelque peu. De loup. devenir chien de berger, la transition est brusque. Et puis, il est en guenilles; l’accepterat-on? Il se regarde. Il prend le parti de s'éloigner. Mais il s'arrête. Il réfléchit. Il revient sur ses pas. Enfin, brusquenent, il s’élance dans le poste de police. Toutes ces tergiversations si comiques et qui répondent si bien à un débat intérieur sont merveilleusement traduites par l'excellent acteur américain. Le commissaire jette sur le candidat un regard méprisant. Pour l'éprouver, il lui envoie un terrible coup de poing. Charlot encaisse sans sourciller et, aussitôt, riposte vigoureusement. Le commissaire manque de tomber. Mais il est ravi : il avait besoin d’un gaillard résolu : il l’a trouvé. Il désigne à Charlot son poste... « de tout repos », lui dit-il. C’est la rue des Bons-Enfants. Apprenez que cette voie est la plus mal famée de toute la ville. Le gros Nénesse, un colosse, y règne sans.conteste. Il détrousse les paisibles citoyens qui se hasardent dans ces dangereux parages. Il inflige les plus écrasantes défaites aux forces policières mobilisées pour le:mettre à la raison. Chaque Jour, des agents terrassés par cet athlète sont rapportés au poste sur des brancards. Le naïf Charlot ignore le péril. Il se promène sans défiance dans la rue des Bons-Enfants. Nénesse paraît ; il apercoit le nouveau représentant de l’ordre. Il va promptement lui régler son compte. Charlot, qui le voit s’avancer, n’est pas rassuré. Mais il fait bon visage. Comme Nénesse commence à le pousser du coude, Charlot lui décharge un furieux coup de bâton sur la tête. Le géant a le crâne si dur qu’il n’a rien senti. Seulement, il a vu le geste et, pour venger cet outrage, il s'apprête à occire le policeman. Par vanité, il veut d’abord lui donner une preuve de sa vigueur extraordinaire. Il plie en deux un candélabre de bronze. Charlot, qui est un nain à côté de lui, l’observe avec curiosité. Soudain, avec une agilité de chat, il lui grimpe sur les épaules et le coiffe .avec la lanterne du candélabre que le celosse a courbé. Puis, il ouvre la conduite de gaz et provoque ainsi l’asphyxie de son adversaire. Vous pensez si cette victoire donne du prestige à Charlot (1) Paul Gseiz (Démocratie Nouvelle). ES dans le quartier. Les escarpes s’enfuient épouvantés. Les pol cemen passent les menottes au gros Nénesse évanoul et 2 transportent au poste. Mais leur joie est de courte durée: terrible bandit reprend ses sens. Il casse ses chaînes comm£ si c’étaient des liens de paille. Il met en capilotade les agen! qui se ruent sur lui, et il s’évade. Le voici qui se retrouve nez à nez avec Charlot. Alo lieu une de ces poursuites qui sont un des plus fréquents PI? cédés comiques du cinéma. Evidemment, ce moyen est we jusqu'à la corde, et cependant la drôlerie irrésistible Gé Charlie Chaplin parvient à le renouveler. Dans les trucs qué le petit policeman emploie pour échapper à son gigantesquf adversaire, éclate la supériorité de la finesse sur la brutalité et, ce qui ne semble d’abord qu’une exercice de clowns, Pré tournure de leçon philosophique. 54 Naturellement, Charlot triomphe. Il rétablit définitive ment la tranquillité dans la rue des Bons-Enfants. Il épous® la fille du pasteur. Et les anciens apaches, transformés mal tenant en bons bourgeois, vont entendre les sermons de 5°? beau-père. Le gros Nénesse lui-même, en croisant Charlot, lui adresse un grand coup de chapeau. ; J'ai analysé ce film avec quelque complaisance, parce dl rs à À ? à so n$ le talent de Charlie Chaplin se manifeste précisément dà les menus épisodes du scénario. ma Je ne crois pas. que jamais aucun mime ait égalé ce q Nos pères ont acclamé Deburau, dont on parle encore, et ; ee à E CES: Sacha Guitry a choisi comme protagoniste d’une de ses pièce es ; ; ve Mais il ne semble pas que Deburau ait montré autant de v€' que Charlot. En tout cas, il ne reste plus aucun témoignä8° du talent de l’ancien mime, tandis que les films conservé permettront à nos descendants de juger Charlie Chaplin: ; Le cinéma est l’art même de la pantomime. Et Charlo s’est révélé juste au moment où l’écran réclamait un maître geste et des jeux de physionomie. d Ce qui constitue l'originalité de Charlot, c’est d’abor assurément la silhouette qu'il s’est donnée. Elle est excel trique et bouffonne; mais si elle provoque l’hilarité, H. qu’elle reproduit, en l’exagérant, un type assez commun, ce! du gueux qui a des prétentions au chic. Parmi les petites 8€1°! la pauvreté cherche à se dissimuler sous une fausse élégant criarde. Les longs cheveux frisés de Charlot, ses courte moustaches qui lui sortent du nez, son petit chapeau singu lier, ses pantalons à carreaux, autant de détails qui trahiss? le désir d’impressionner. Le veston étroitement sanglé est un subterfuge pour cache! l'absence de gilet et de linge : c’est le dénuement qui obligé notre homme à se donner une taille de guêpe. : Ainsi accoutré, il promène dans l'existence une complèt® indifférence pour les scrupules. C’est une sorte de Panu'£° moderne. Le mensonge, la tromperie, le vol, sont ses péché mignons. Il est intelligent et souple. Il déploie de prodigieust’ ressources d'esprit pour satisfaire ses désirs qui sont, à * dire, bien modestes. Son air gauche et balourd lui est d'u grande utilité pour faire des dupes. Et cela est encore trait fort ingénieusement noté. | Le personnage est donc bien campé : c’est en somme È débrouillard. Type très courant à notre époque démocratidu® aussi bien en Europe qu'aux Etats-Unis. On incline à pardonner ses indélicatesses et jusqu’à ses méfaits en con”