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6 LE COURRIER CINÉMATOGRAPHIQUE
manquons d’idées précises et larges, conçues pour la vision... n'est-ce pas un peu routine ou lésinerie. Les perfectionnements n'ont-ils pas été dirigés surtout du côté industriel ? Le théâtre a connu ces époques-là, où seules les fables populaires et plus tard les adaptations des œuvres antiques l’alimentaient, Et pourtant le théâtre est devenu autre chose : tous les problèmes de la pensée humaine y sont entrés en cortège magnifique ; tous les chocs de la conscience s’y sont produits ; tous les éléments s’y sont heurtés.
Continuons à faire pénétrer la pensée, philosophique ou scientifique, au cinéma, puisqu'il nous permet sans limitation de l'espace et du temps d'aborder et d’évoquer toutes les actions, puisque par la perfection du procédé, il nous permet de tout dire. Arrachons comme l'herbe mauvaise, le parasitisme de l’action inutile, du fait divers, de la petite histoire bébête et plaisante ; le cinéma n’est pas une bibliothèque rose; un art doit éduquer et élever.
Appliquons-nous à être sincères et vrais sans mièvrerie et sans faiblesse, sans cette bassesse qui consiste à flatter les mauvais instincts d'un public qui n’a pas besoin de cela pour applaudir et vibrer et qui, pour l’encouragement que sa présence inlassable nous donne, mérite qu’on lui montre la beauté qu’il cherche à tâtons.
C'est une loyauté du producteur vis-à-vis de luimême et vis-à-vis de ceux qui l’aident de la puissance de leur argent. Trop de capitalistes sont à l’heure actuelle prévenus contre le cinéma ; à tort, généralement, il faut l'avouer ; à raison, quelquefois. L’abus des mises en scènes fastueuses, cachant pour la plupart du temps l’indigence d’un scénario sans force, a permis ou justifié de ruineuses tentatives... Je veux croire qu'il n’y eut pas d'hommes sans scrupules, de brebis galeuses. Défons-nous, ce qui est clair s’énonce simplement, la somptuosité dans la vie est une exception et le chefd'œuvre n’est pas le film où l’on a jeté les millions sans compter, mais l'œuvre humaine et sincère, qui sera applaudie... et amortie dans tous les pays, sans distinction de races.
Créons l’œuvre essentiellement visuelle où tout est image, parce qu'elle est conçue pour cela ; on pense cinéma comme on pense littérature N’imitons pas celuici ou celui-là, telle race ou telle autre; nous ne nous imposerons chez nos rivaux que si nos œuvres sont
. représentatives de l'esprit français dont le prestige est
encore vivace par le monde; ils rejetteraient toute œuvre qui serait un plagiat de la leur.
Nous sommes, dit-on, des créateurs, des novateurs ; restons-le. Tous les procédés nous sont permis, si nouveaux soient-ils, à la seule condition qu'ils soient clairs et intelligibles, et qu'il en soit usé avec tact et mesure. Seules les ficelles malsaines qui poussent frauduleusement à l'émotion doivent être rejetées. Mais souvenons-nous que l’œuvre qui serait celle d’un procédé spécial est une œuvre mauvaise, parce qu’elle excluerait la sincérité.
Et surtout, ayons le sens de l’organisation et de l’économie. Le cinéma, si nous voulons qu'il vive, doit être et rester une affaire. Nos rêves, si nous sommes capables d'en avoir, doivent se réaliser en chiffres et ceux qui ne le pourraient, contentons-nous de la joie de les avoir faits. C’est la plus pure.
Pour les artistes que nous emploierons, il n'y a rien à en dire ici; le cinéma français présente à l'heure actuelle assez d’interprètes consciencieux pour n'avoir que l'embarras du choix; ceux-là savent leur métier et n'ont point besoin de la réclame tapageuse qui précède et entoure certains noms du théâtre, couvrant prétention et fadeur. Les nôtres et vous savez tous ces noms se sont imposés eux-mêmes. Demandons-leur l'intelligence qui est en eux, guidons-les, ils seront pour nous la joie et le succès; ce seront des amis et des collaborateurs sur lesquels nous pourrons compter.
J'aborderai plus tard la question du lancement des films. Là aussi, il y a quelque chose de neuf à faire ; douze ans d’expérience ont mis à ma portée des méthodes nouvelles. Encore une fois n'oublions jamais que le cinéma est une affaire et que les idées neuves d’aujourd’hui sont les idées fructueuses de demain.
Yan D: DYLE