Histoire encyclopédique du cinéma : I : le cinéma Français 1895-1929 (1947)

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354 HISTOIRE DU CINEMA se d£rober a la justice et, en proie au remords, ache vent Tun pres de l'autre leur vie en se dechirant. Theme audacieux dont l'audace est encore aggravee par les intentions auxquelles l'auteur a obei et qu'il a clairement exposees dans la preface de la deuxieme edition de son roman : « La critique a accueilli ce livre d'une voix brutale et indignee. Certaines gens vertueux, dans des journaux non moins vertueux, ont fait une grimace de degout, en le prenant avec des pincettes pour le jeter au feu... Je ne me plains nullement de cet accueil ; au contraire, je suis charme de constater que mes confreres ont des nerfs sensibles de jeune fille... Dans Thertee Raquin, j'ai voulu etudier des temperaments et non des caracteres. J'ai choisi des personnages souverainement domines par leurs nerfs et leur sang, depourvus de libre arbitre, entraines a chaque acte de leur vie par les fatalites de leur chair ; Therese et Laurent sont des brutes humaines, rien de plus. J'ai cherche a suivre pas a pas dans ces brutes le travail sourd des passions, les poussees de l'instinct, les detraquements cerebraux survenus a la suite d'une crise nerveuse. Les amours de mes deux hcros sont le contentement d'un besoin ; le meurtre qu'ils commettent est une consequence de leur adultere, consequence qu'ils acceptent comme les loups acceptent l'assaRsinat des moutons ; en fin, ce que j'ai etc oblige d'appeler leur remords consiste en un simple desordre organique, en une rebellion du systeme nerveux tendu a se rompre... Qu'on Use le roman avec soin, on verra que chaque chapitre est l'etude d'un cas curieux de physiologic » En lisant ces lignes qui ont valeur de confession, on devine combien £tait hardie 1'entreprise qui consistait a tirer d'un tel sujet une mouture a I* usage du public habitue! des salles de cinema. Et pourtant, quand le film arriva devant ce public, — ou les gens vertueux, on le sait, ne manquent pas — il ne provoqua aucune « grimace de degout » ; nul ne pensa a le prendre « avec des pincettes pour le jeter au feu ». Et ce ne fut ni avec indignation, ni avec brutalite* que la critique l'accueillit. C'est que Feyder, une fois de plus, avait eu recours non seulement a son habilete, mais encore a son sens remarquable de la mesure et que loin d'appuyer, il s'etait contents de suggerer, et se souvenant que I'ceuvre sur laquelle il travaillait appartenait a cette ecole naturaliste qui avait rendu a la litterature « l'inoubliable service de situer des personnages reels dans des milieux exacts » (i) il avait cree autour de ses personnages l'atmosphere speciale dans laquelle Zola les avait fait vivre, ce qui lui avait permis, quand il en 6tait arrive a Taction elle-meme, de pouvoir, (i) /. K. Huysmans : « A rebours », Preface igo3.