La Cinématographie Française (1938)

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fXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXI C^Ért^APHit TECHNIQUE ♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦ E T — RI” 1008 du 25 Février 1938 Publié sous la Direction Technique de A.-P. RICHARD MATERIEL Abonnement spécial aux douze numéros annuels contenant TECHNIQUE ET MA I EHJEL FRANCE et Colonies : 25 ÏP« ÉTRANGER (Union Postale) : 40 ÏP* Autres Pays : 50 fp» Sur l’Application de la Couleur Mon ami et directeur P. -A. Harlé a, dans un quotidien du matin, récemment résumé quelques judicieuses observations sur l’application de la couleur. A celles-ci se joignait une interview de René Clair sur cette importante question. On sait combien ce prestigieux réalisateur aime sortir des sentiers fréquentés par le commun des mortels, et quel sens de l’opportunité le guide dans chacune de ses créations. On peut discuter la valeur de ses œuvres, on ne peut pas sans injustice méconnaître qu’il fut et reste le plus grand et le plus hardi des metteurs en scène. René Clair annonce qu’il n’hésitera pas, le cas échéant, à maquiller la nature, à peindre s’il le faut les arbres du paysage qu’il filmera. Nous applaudissons à cette idée, mais, pour une fois, Clair n’aura pas la primeur de cette novation, c’est fait depuis belle lurette, à l’époque, mon Dieu, où les principaux esthètes de l’avant-garde, ayant pour une fois fait demi-tour, fondèrent contre votre serviteur le club du noir et du blanc. Seul à cette époque le noir trouvait grâce à l ins yeux, seul le noir permettait l’accession aux sommets de l’art. Heureusement, des peintres, des littérateurs, loin de décourager ces tentatives, se donnaient la peine de trier le bon du mauvais et daignaient descendre de l’Olympe pour encourager ces essais. Si la Société Technicolor ou d’autres avaient attendu l’approbation des supporters du noir et du blanc, nous attendrions encore sous l’orme la venue de Vogues 38. On sera évidemment obligé de maquiller fréquemment un paysage, soit que ce dernier n’ait pas les contrastes chromatiques nécessaires, soit qu’il ne soit pas agréable à regarder à l’écran. Nous avons souvenance de certain ibis rose sur un fond de verdure où le vert était mélangé de 50 % minimum de rouge, que nous dûmes, sur ordre, fixer sur la pellicule, malgré nos protestations. La vengeance ne tarda pas, elle s’épanouit sur l’écran où l’on distinguait une longe de veau sur un plat d’épinards. Certain jour, grâce à Tallier (que ne doit on pas à ce précurseur que beaucoup semblent ignorer) nous fîmes projeter aux Ursulines de curieux effets kalédoïscopiques faits sur Kodacbrome, premier modèle par Capstaff. Le seul journaliste qui osa écrire : « Voici une nouvelle forme de l’art » fut René Jeanne; la plupart des cinéastes présents arboraient alors un sourire révélateur de l’opinion momentanée qu’ils s’étaient faite. Plus tard, Bernard Deschamps, l’auteur du film Le Rosier de Madame Husson, tenta sur Keller-Dorian de curieux essais qui étaient à la couleur ce cpie lit Henri Chomette en noir. Ce dernier essaya aussi sa chance ; malheureusement, des événements imprévus l’empêchèrent de continuer. Signalons que les opérateurs Ravet, Chomon, Hubert, Bachelet, Hayer, Gilbert firent sur Keller-Dorian des bandes qui pourraient encore être projetées sans déchoir. Françoise Rosay dans Les Gens du Voyage. Film de Jacques Feyder. Plus récemment, sur Francita, Jean Vallée réalisa Jeunes filles à marier. Les réalisateurs qui vont tenter leur chance, avec un procédé bien au point, se rendront vite compte qu’il importe non de faire réel, mais agréable ; ils interpréteront donc le sujet, ou, pour être plus exact, ils le maquilleront si les conditions du travail l’exigent. Les peintres interprètent, les uns bien, les autres mal. Ce que les uns trouvent bien, les autres le vomissent, témoin cette anecdote : Un mécène avait, l’automne venu, invité dans sa propriété le père Corot et le fougueux Courbet. A l’aube, chevalet sous le bras, Corot, inlassable, courait à l’orée des bois et jetait sur la toile un de ces paysages vaporeux à la « Souvenir de Mortefontaine ». Pendant ce temps, Courbet fumait sa pipe, à la grande indignation de l’hôte qui, n’y tenant plus, osa, un soir, reprocher au peintre son incurable flegme, tandis qu’il faisait un éloge enthousiaste de Corot : « Ah ! s’écria Courbet, vous osez appeler peinture ces paysages à la crème plantés dans la brume. J’aimerais mieux lâcher mes pinceaux que de fabriquer des insanités de ce genre. Demain matin, j’emboîte le pas au père Corot, et nous verrons. En effet, au petit jour, Courbet détale à la recherche de son rival et le trouve installé à quatre mètres d’un talus, ayant devant lui l’orée d’un bois. Sans un mot, il plante avec rage son chevalet, son trépied et se met à peindre le talus. Au déjeuner, Corot avait peut-être fait un tableau de valeur, Courbet, à coup sur avait peint un grand, un pur chef-d’œuvre : « Le Trou à lapins. » Le cinéma des couleurs sera donc comme la peinture : bien interprété par les uns, mal par les autres. Les uns aimeront le paysage poétique de Corot, les autres feront de la couleur de mâle à la Courbet. Le goût, l’individualité, la foi joueront une fois de plus. Facteurs primordiaux de toute activité humaine, ils resteront cette fois encore en tête des éléments de réussite ou d’échec. — ■ A.-P. Richard.