La Cinématographie Française (1939)

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9 ♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦ CIINElWgaSR/lPHIE FR&MQKiSE de ne pas fabriquer le véhicule de divulgation, et s’il le fabrique, sa liberté de réalisation est entière, sous réserve de l’exercice du droit moral de l’auteur. Enfin, l’œuvre cinématographique ne peut être communiquée que directement, par représentation ou plus précisément par projection publique. On le voit, les caractéristiques des deux contrats étudiés, sont proprement antinomiques. Il est intéressant de noter au passage que le droit moral étant attaché à la personne et non à l’œuvre, l’auteur de l’œuvre utilisée en conserve l’exercice fût -ce du chef d’une œuvre qui n’est pas la sienne, mais qui en dérive. Toutefois, la jurisprudence (Arrêté Frémicourt dans l’affaire Bernstein-Pathé) a fort sagement limité l’exercice du droit moral de l’auteur d’une œuvre préexistante. Elle lui a refusé l’exercice de l’action en contrefaçon ou en représentation illicite, témoignant ainsi qu’elle ne lui reconnaît à aucun degré la paternité de l’œuvre cinématographique. Elle a du même coup considéré comme licites toutes les conditions conventionnelles qui permettent à un producteur d’adapter, avec le maximum de liberté, une œuvre littéraire ou artistique à l’expression cinématograh que. Cette jurisprudence hardie est de nature à modifier nombre d’idées communément admises quant à la nature du droit moral, et établit solidement le caractère personnel et non réel de ce droit. Il en résulte que l’auteur d’une œuvre utilisée pour la réalisation d’une autre œuvre dite de seconde main, ne saurait revendiquer la paternité de cette dernière, mais peut exercer son droit moral dans certaines limites, s’il estime qu’une référence à son nom ou à son œuvre dans l’œuvre de seconde main, peut être préjudiciable à sa réputation ou à son honneur. Quelle est, en définitive, la nature juridique de ce contrat que nous avons appelé, faute de mieux, le contrat d’utilisation. Nous serons d’accord avec M. Epp pour dire qu’il n’est pas nécessaire pour le qualifier de faire appel à un droit sui-generis. Il n’est pas douteux, au contraire, qu’il s’agit d’une application du décret de 1 793 dans son esprit sinon dans sa lettre. Que l’on veuille bien se reporter, pour comprendre cet esprit, aux conditions de la création littéraire et artistique à l’époque du législateur de I 793. « Reproduire » n’avait alors d’autre sens que « multiplier ». L’œuvre dérivée ou de seconde main n’existait pratiquement pas. Un roman restait livre et une œuvre musicale, partition. Et l’on ne saurait faire grief à le Chapelier, rapporteur du projet à la Convention, de n’avoir pas prévu que des créations originales du génie artistique ou littéraire pourraient inspirer d’autres créations également originales et par elles-mêmes également dignes de protection. L’esprit de la loi de 1 793 devra, néanmoins, continuer à guider le législateur moderne, car les principes pressentis par le XVIIIe siècle finissant et proclamés par la Convention n’ont rien perdu de leur valeur. Et de même qu’il serait inique de multiplier les matérialisations d’un ouvrage de l’esprit (c’est-à-dire d’éditer) sans autorisation de l’auteur et sans rémunération de son travail, de même personne ne peut s’approprier sans autorisation et sans rémunération le contenu d’une œuvre existante pour réaliser une œuvre nouvelle. En bref, le privilège que concède l’auteur pourrait se définir comme suit : c’est la faculté temporaire accordée à un autre auteur de s’inspirer d’une de ses œuvres pour réaliser une œuvre nouvelle et originale dont le véhicule matériel de divulgation est différent de celui de l’œuvre préexistante. LE PRODUCTEUR EST UN AUTEUR QUI S’ÉDITE LUI-MÊME. Faut-il conclure de ce qui précède que le producteur, n’agissant pas en qualité d’éditeur à l’égard des auteurs d’œuvres préexistantes, ne fait pas acte d’éditeur en d’autres circonstances? Il n’en est rien. Le producteur fait de nombreux actes d’édition, sans qu’il y ait pour cela contrat d’édit.on car le producteur est un auteur qui s’édite lui-même. La notion du «producteur-auteur » apparaît toujours comme choquante aux esprits traditionnalistes, parce qu’ils ne parviennent pas à concevoir que la conception et l’exécution d’une œuvre de l’esprit puissent être le fait de personnes différentes. Or, il est bien certain que le producteur n’écrit pas l’adaptation cinématographique, ni les dialogues du film, pas plus qu il ne participe à la construction des décors ou à l’arrangement musical. Mais, il est tout aussi certain que la conception de l’œuvre cinématographique naît du seul travail de son cerveau. Comment les choses se passent-elles en fait ? Parmi de nombreux sujets, le producteur en choisit un qui lui paraît susceptible d’inspirer une œuvre cinématographique. Cette simple détermination suppose chez un professionnel un travail intellectuel de transposition dont dépend le succès ou l’échec de l’œuvre à créer. Il importe, en effet, qu à la simple lecture d’un texte écrit, le producteur voit, au sens littéral du mot, le film se dérouler dans son esprit comme il se déroulera peut-être un jour sur l’écran. AP rès avoir acquis les droits de l’œuvre, il s’emploiera à choisir les exécutants, de la même façon qu’un peintre choisit les couleurs de sa palette. Tel sujet convient à tel metteur en scène ou ne peut se passer de tel protagoniste. C’est un sujet âpre ou au contraire léger dont les dialogues doivent être confiés à tel spécialiste. L’atmosphère musicale, dont l’œuvre devra être entourée, sera parfaitement réalisée par tel compositeur. C’est à ce stade que l’œuvre nouvelle sort des limbes et conquiert une personnalité. Sa vie propre commence et cette vie, elle la doit au seul producteur. Cette constatation n’est pas affaiblie par le fait que des collaborateurs intellectuels ou artistiques, travaillant sur commande, participent à la réalisation proprement dite du film. Il ne viendrait à personne l’idée de refuser à un compositeur de musique le droit de se dire tel, parce qu’il ne sait pas noter la musique ou orchestrer sa composition. De même un décorateur signe un ensemble dont des artisans et quelquefois de grands artistes ont exécuté les éléments. Il en est cependant l’auteur incontestable et incontesté. Il paraît d’ailleurs équitable d’admettre que le droit moral, dont nous avons vu le caractère personnel, puisse être exercé par des collaborateurs artistiques ou intellectuels, même salariés, mais seulement en ce qui regarde la fraction de collaboration qu’ils ont fournie. Aucun droit ne leur appartient sur l’ensemble de l’œuvre. Le travail d’édition proprement dit commencera avec l’adoption définitive du découpage technique. Et dès lors, l’auteur cède la place à l’éditeur qui va fabriquer le véhicule de divulgation de l’œuvre. Le processus suivi consiste à représenter l’œuvre confidentiellement devant le spectateur unique, mais combien attentif, qu’est la caméra. Vient ensuite le montage du négatif, puis la première copie dite positif standard, c’est-à-dire l’édition princeps du film. La question se pose désormais d’exploiter ce négatif impressionné ou les copies qui peuvent en être tirées. Si l’édition cinématographique était une édition ordinaire, il suffirait, pour rémunérer le travail effectué, c’e vendre des exemplaires de l’œuvre, c’est-à-dire des copies ou même de les louer. Comment expliquer qu’en pratique le prix demandé pour la vente ou la location de ces exemplaires n’ait pas de commune mesure avec leur valeur intrinsèque ? La raison de cette anomalie réside en ceci que la vente ou la location de la copie est vaine si elle n’est pas assortie d’un droit immatériel, celui de la projeter devant un public. Ce droit, c’est celui que confère à l’auteur le décret de ’ 791, c’est-à-dire le droit de représentation et d’exécution publique. Nous nous trouvons ainsi amenés à une dernière constatation savoir qu’en matière d’œuvres cinématographiques, la création d’un véhicule de divulgation ne suffit pas et que l’auteur-éditeur ne peut récolter les fruits de son travail que sous forme de droits d’auteur. En définitive, notre conception peut se résumer comme suit : 1 0 Le producteur acquiert, non en qualité d’éditeur, mais en qualité d’auteur éventuel d’une œuvre dérivée, le droit de s’inspirer d’œuvres littéraires ou musicales préexistantes. Les droits ainsi acquis ne sont ni des droits d’adaptation, ni des droits d’édition. Les auteurs de ces œuvres ont droit à une idemmté, en contre-partie de l’autorisation qu’ils confèrent; 2° Le producteur réunit dans sa personne la double qualité d’auteur et d’éditeur de l’œuvre cinématographique ; 3° S’agissant d’un auteur qui s’édite luimême et ne peut se rémunérer de son travail d’auteur et se rembourser de ses frais d’édition que par la perception de droits de représentation, il est logique de conclure que les redevances versées par les théâtres à l’auteur-éditeur constituent des droits d’auteur.