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CANADA
Quelles sont les possibilités exactes du film français ?
Une nouvelle concurrence : les versions doublées en français de la production d'Hollywood
Montréal. — Le Canada, avec ses 1.244 salles de cinéma, les 925 films qui passent annuellement sur ses écrans et les 42.000.000 dollars canadiens (cinq milliards de francs) de recettes que lui rapportent ces salles, constitue un marché intéressant pour l’exnloitation du film.
Inactif dans le domaine de la production, le Canada dépend presque entièrement d’Hollywood au point de vue approvisionnement. Par l’entremise de compagnies subsidiaires canadiennes, les Américains exercent de plus un contrôle étroit sur un très grand nombre de salles de cinéma dans tout le pays.
Un groupe anglais cependant, celui d’Arthur Rank de Londres, possède aussi de vastes intérêts au Canada dans l’industrie du cinéma. Il y poursuit à l’heure actuelle une active politique d’expansion et se propose d’y distribuer la production anglaise sur une plus vaste échelle.
C’est dans cette atmosphère d’âpre concurrence anglo-américaine qu’en 1930, le premier film français fut lancé à Montréal. Une société d’exploitation et de distribution, la Compagnie France Film fut fondée et une subsidiaire, la Compagnie Cinématographique Canadienne Limitée ouvrit un bureau d’achat à Paris. Le film français connut bientôt dans les régions de langue française une popularité grandissante. Les autorités gouvernementales, universitaires et religieuses s’empressèrent d’endosser la politique d’une société dont l’ambition était de protéger et diffuser par le film la langue maternelle et de contribuer à élargir davantage le rayonnement spirituel de la France au Canada.
En 1939, la totalité de la production française, soif environ 1|0'4 films, passait sur les écrans de 80 salles dans les provinces de Québec Lt d’Ontario et de quelques cinémas de la région anglaise du pays.
Vint la guerre. Les contacts avec la France furent coupés. Pendant cinq ans les distributeurs du film français, se refusant à passer dans leur circuit des bandes américaines doublées en français, n’offrirent à leur clientèle que des reprises. Les recettes naturellement en souffrirent, mais la Société réussit quand même à maintenir ses positions jusqu’à la fin de la guerre.
Dès la fin des hostilités, la Compagnie Cinématographique Canadienne Limitée s’empressa malgré un cours des changes extrèment désavantageux, de s’assurer à Paris des droits sur une centaine de productions tournées pendant l’occupation. Mais la paix n’apporta malheureusement pas avec elle la solution aux nombreux problèmes auxquels ont encore à faire face les exploitants du film français au Canada.
De nouvelles difficultés surgirent qui, en raison de leur importance, risquent de dangereusement compromettre la diffusion des productions françaises au Canada. En voici quelquesunes :
1. On semble mal informé en France des possibilités et des limites du marché canadien.
On ne se rend pas suffisamment compte que non seulement le Canada, au point de vue cinéma, gravite dans l’orbite des maisons américaines mais fiue, de plus, une grande partie de sa population de langue française, entièrement gagnée au film d’Hollywood, ne fréquente jamais les salles où l’on passe des productions françaises.
Cette situation s’est aggravée pendant la guerre en raison de la pénurie de films français et de l’apparition sur de nombreux écrans de films américains doublés en langue française. Les distributeurs français ont donc à lutter en ce moment contre une concurrence qui s’est affirmée non seulement par la qualité de ces super-productions en langue anglaise mais aussi par l’intérêt manifeste des films doublés.
Ajoutons à cela que les productions d’Hollywood, et spécialement celles en couleur, aa point de vue technique et intérêt des sujets traités, ont atteint au cours des dernières années un niveau difficile à égaler. La popularité du film français qui, avant les hostilités, malgré les efforts titanesques de ses animateurs, n’avait réussi à s’affirmer que dans une région assez restreinte du pays, a donc suivi pendant la guerre une courbe descendante.
Il faudra beaucoup de travail et de persévérance pour gagner petit à petit le terrain perdu. Et pourtant, combien de producteurs français s’imaginent encore que le Canada constitue un immense marché qui n’a pas encore été exploité! Partant de ce principe, ils demandent pour leurs films des prix exorbitants qu’on ne peut espérer récupérer.
2. Le taux des changes jusqu’au 1er janvier rendant les transactions commerciajes difficiles.
On allègue en France que le prix de revient d’un film varie entre six et dix fois ce qu’il était avant l’occupation. D’accord. Mais a-t-on songé que le Canada ignore à peu près complètement la hausse générale qui. sévit en France; que les prix des sièges dans les cinémas n’a pas augmenté et que les propriétaires de salles, pour conserver leur clientèle, sont dans l’obligation d’offrir deux grands films à chaque programme accompagnés d’un documentaire et d’actualités?
Roger Pigaut et Lily Baron dans le nouveau film de Jacques de Baroncelli, La Rose de la Mer, d’après le roman de Paul Vialar.
( Sirius .)
Les frais d’exploitation sont donc très éle>B et il va sans dire que l’exploitant n’est pas I mesure de payer les films beaucoup plus cl 1 qu’en 1939.
Si, d’une part, le producteur français redoil de ne pouvoir équilibrer son budget, d’au i! part, l’exploitant canadien ne peut logiquemrj espérer étendre ses activités s’il lui est imp . sible, en premier lieu, de récupérer les p ;j des films qu’il a achetés. La dévaluation ij franc effectuée fin décembre pourra apporj une solution à ce problème.
3. Les accords cinématographiques parti < liers franco-anglais ou franco-américains d;i le domaine de l’industrie cinématographie constituent un obstacle à une plus grande c fusion du film français au Canada.
Certains producteurs français, au lieu de ti J ter directement leurs films avec le distribut r| canadien préfèrent vendre leurs droits à i maisons anglaises pour la distribution dans pays anglo-saxons ou à des maisons ami caines pour la distribution dans le monde tier.
Cette politique est fort compréhensible n il serait de première importance dans l’inti même du cinéma français que dans ces acccj le Canada, ou du moins l’Est du pays, soit ■ servé comme région d’influence française. N’ 1 il pas logique de présumer en effet que ni 5 Anglais ni les Américains n’ont intérêt à pc ■] ser le film français au Canada? S’ils l’expH tent, on peut douter qu’ils ne lui donnent a place d’honneur. Dans certains cas, ils 9 serviront peut-être, comme ils l’ont déjà lll pour mettre la main sur certaines salles d<i région française du pays qui leur ont toujaM été fermées. Puis, lorsque ces salles leur es ront été ouvertes, il y a tout lieu de croire ta le film français sera relégué en deuxième p ;aj et après un certain temps, complètement écr é.i
Pendant ce temps, les exploitants français m ront été privés de certaines grosses productiia françaises et les recettes souffriront en coi quence.
4. L’hésitation dont font preuve certai;q personnalités importantes de l’Industrie C é-i matographique en France à coopérer étreement avec les exploitants canadiens crée écessairement un ralentissement d’enthousia le qui ne peut qu’être préjudiciable à la di u-i sion du film français.
L’ambition qui, jusqu’à cette date, a ainfl les exploitants canadiens dépasse de beauu» les bornes d’une affaire purement commerc e.f, Ils visent non seulement à effectuer des recqefj qui leur permettent d’étendre leurs acthésj mais aussi à faire rayonner le génie frariil dans un pays déjà tellement uni à la France ar» le cœur et par l’esprit.
S’il n’était question que de profits, il y a 1 g| temps qu’ils auraient passé dans le camp anal américain où les possibilités de bénéfice OH beaucoup plus alléchantes. En poursuivant ndant plus de quinze ans leur politique de r is-i tance à toute influence étrangère, ils se nt faits les champions d’une cause qu’ils 0 à cœur de défendre. Ils ont engagé une te qu’ils veulent gagner coûte que coûte, mai ils ne connaîtront le succès complet que si on ur accorde l’appui moral auquel ils ont droi I
Une magistrale partie se joue à l’heure ictuelle sur l’échiquier de l’industrie cim iatographique où des intérêts américains. I nçais, anglais et russes se confrontent. Au c 1rs des années qui viendront, nous assiste ns sans doute à une lutte serrée pour les d erents marchés mondiaux.
L’avenir du film français au Canada lit devenir extrêmement brillant. Il compte ei ai fet des partisans fidèles et nous savons q en France, nombreux sont ceux qui, malgré ut, comprennent la situation telle au’elle e >te et appréciant le travail effectué dans 1 trf pays depuis vingt ans par une Société e i«‘ rement au service des producteurs frai), U*'
Il serait donc déastreux qu’à un momen ou toutes les bonnes volontés devraient s mr pour étendre le rayonnement du film 1 mçais, son succès au Canada soit compromis >ar une politique à courte vue, uns absence en ertains milieux de compréhension de la situ; on et un manque de continuité et d’unité ms l’effort.
Maurice Laure . |
(Article reproduit du Bulletin de la Cha >i'1' de Commerce Française de Montréal.)