La Revue du cinéma (1928 - 1929)

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DU cin£ma aucun film, un baiser sur la bouche qui fut vrai. II y a toujours autour de ce baiser une sorte d'etranglement, de recherche sculpturale, d'appret qui me genent. C'est cet appret qui pourrait constituer la pornographic Une fois lavee, la toile de soie devient une effroyable cotonnade. Or la pellicule, apres mille fauts perilleux, tant au tirage qu'a la projection, doit conserver son brillant, sa nettete, sa virginite. Le Cinema, vierge et chaste dans son essence, vit de purete; il est avide d'extases. II est la nourriture des grands lyriques. Songez a l'admirable « echappee » que Gaston Chelle, autour du Massif du Mont Blanc, nous propose de son avion; songez a la Jeanne d'Arc, de Dreyer, et vous comprendrez que le Cinema peut etre, un jour, l'ascension de votre ame... Oui, vous avez ete deja purifie... L'ecran voit vos larmes. II les seche vite, car c'est un feu blanc, tout blanc... On ne sent plus son poids, on est nuage, on murmure avec ses visceres la chanson de Dufleuve: ]e suis une plume, un duvet un zephyr... ou bien, armant son browning, on vise l'endroit ou, sur l'ecran, apparait la sale gueule de Warwick... Helas! le prix de cette purification est souvent facheux. II est frequent que les amants de Cineme deviennent impuissants. (II y a d'ailleurs des cas exceptionnels dans lesquels l'ecrivain de ces hgnes veut bien qu'on le range, et qui font esperer que le Cinema trouvera un jours ses Maitres. Ceci sans modestie. Fi de ces personnes qui ne pensent qu'a se rendre inexpugnables! Encore un signe dimpuis«ance...) Le spectateur qui repense Greta Garbo, Louis Brooks, Clara Bow et tant d'autres; la jeune fille qui, pour la honte de l'humanite et en justification de tous les emportements, est allee cinq fois fan imaginer entre les cuisses de Ben Hur des deroulements merveilleux; tous ceux qui ont appris dun cuirasse comment on pique du nez dans la mer ; tous ceux qui, dans les Nulls de Chicago, ont senti, dans leur peau, le froid de la police et comme un precipite J'amour et de crime; tous ceux qui, apres avoir vu V Emigrant, ont jure d'etre pauvres, ou qui, dans V/dxille aux Champs, ont goute l'odeur divine des « exterieurs » ; qui, devant la manucure de VAurore, ont compte leurs ongles sales, tous ceux-la se sont retrouves devant la reahte, c'est-a-dire devant le pro gramme de leur existence, un peu honteux, faisant figure de jeunes vieux et prets a lacher un sourire en dents de scie... Amour qui na pas de nom. « Words, Words... » disait M. Fuchspferd qui, a cette epoque, je crois, etait directeur artistique de la Societe bi-hemisphenque des Films Geniaux. (Dans ce monde hors de la raison, les raisons sociales sont innombrables. Ephemeres, d'autre part.) Parlons, puisqu'il nous est si difficile de travailler. Dix sous d'encre, autant de papier. Balayeur a la Banque de France, il vous est possible de distraire vos contemporains et den recevoir un tribut. L'homme de Cinema doit, avant tout, penser a mobihser une fortune, petite ou grande. C'est done une production qui traine apres elle tous les vices de l'argent. Ses conditions d'existence eloignent, ecrasent bon nombre de cerveaux producteurs dune reelle qualite. Elles laissent par contre la porte ouverte au hanneton sans cervelle, a la femme de lit, a l'ambitieux superficiel qui reussira bien a monnayer le facile Mystere! Considerez ce grand homme de Cinema que fut Caran d'Ache. Imaginez-le aux prises avec des commanditaires, des operateurs, des vedettes, des groupes lumineux, des tireurs, des editeurs... Eut-il realise ces admirables morceaux, dune hgne evidente, ou chaque detail est d'une visibihte parfaite, ordonnee, ou plutot il n'y a pas de details; ou tout est dune grace et dune modestie incomparables? II est permis de se le demander... Aunons-nous La Lettre de Napoleon a Murat et surtout Les Duellistes et le Papillon (quel titre!) . Souvenez-vous: un des duellistes est jete a terre, en accent circonflexe au-dessus du sol. L'epee de son adversaire lui traverse le sommet de la fesse. Dans sa fune, l'arme, au dela de la fesse, a transperce un papillon. Un poete chevelu, qui le poursuivait depuis un moment, vient degager 1'insecte... J'ai retrouve dernierement un peu de ce genie, dans VEtroil Mousquetaire, de Max Linder. ...Jeunes gens qui desirez « faire » du cinema, frequentez le Theatre des Piccoli. Vous y trouverez des enseignements precieux, vous y decouvrirez des ficelles qui sont pour ainsi dire les memes que celles de notre travail. M. Vittono Podrecca na pas realise cela en un jour. Poesie animale... Au fond, pourquoi nous en plaindre. La voila, la jungle. N'allez pas la chercher