La Revue du cinéma (1928 - 1929)

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HARRY LANGDON ou la Maladie du Sommeil « Bombay, 5 decembre. — Le Bombay Chronicle signale un phenomene bolanique extraordinaire. Dans l'ancien royaume de Mysore (Inde) croit un arbre qui s'incline aux approches du soir. A minuit. il repose sur le sol. Vers une heure du matin, il se dresse et, des le lever du soleil, le tronc reprend la position verticale. » Son lieu de naissance, la maison de toujours, je les vois. C'est bien cette grande ville d'attente ou les femmes que Ion evite sont si tendres, ou celles que Ion aime sont deja passees. Harry Langdon caresse de beaux otseaux qui se cassent, emiettent leurs plumes sur le carreau. Dort-il? II roule de pique en pique, pnsonnier des chansons de malheur. Chaque reveil, le ctel lui tombe sur la tete, plus lourd. Je salue en Langdon une victime privilegiee de la maladie du sommeil. Malgre lui, il engourdit les objets, les gens du voisinage, la rue, tout le decor. Le sommeil l'empoigTie par les cheveux, l'enveloppe, le baigne dans son fluide. Harry ecarquille les yeux: il ne reconnait pas son velo, la marguerite qui fleurit sa fenetre, les briques fixant le pli de son pantalon. II tombe encore de sommeil. Se leve-t-il? II dort debout. Perche dans sa mansarde, il ignore l'heure du laitier, les carrioles blanches, les feuilles grasses, les premieres silhouettes qui posent leurs cibles sur le trottoir. II descend l'ecaher qui le releve de la terre au ciel. Mais il ne demeure pas chez les hommes. La durete de son patron, 1'indulgence de l'epouse du demenageur le surprennent. II est pret a s'en excuser. La tendresse et la mechancete fondent sur lui. II passe au milieu des vivants, somnanbule. Le pantin d'Harry Langdon naufrage au sein d'une negresse, echoue sur un banc de square,_s'ensevelit sous la neige. Et apres? Butine par les mouches a sommeil, vaincu, Harry Langdon passe, sans se salir, entre les mains. Qu'espere ce cahcol amoureux, cette face de lune a double menton ? C'est alors que lune de ces rilles malheureuses et soumises, vous pouvez les appeler cent ans, une sceur d'Edna Purviance, une femnae lui demande asile au nom de l'enfant promis. Quel enfant? Un petit Harry, la poupee de Harry, une grande poupee comme Harry. Silence, laissez-le dormir, il attend un miracle. Elles sortent par les fenetres les commeres, les ravaudeuses, les rombieres a mitaines. Surgissent les medecins a trousses, les vieux accoucheurs du froid des faubourgs. Harry rafle les fusils de bois, les trompettes, nos beaux jouets de Noel. II nous desarme pour se defendre. Notre jeunesse volee tombe par sa chemmee, et nous touche a mort. Qui vive? Le man ivrogne. Harry triche, enfile un gant de boxe enorme, compte sur la perspective pour effrayer son ennemi. II tourne, virevolte comme il s'apprit a l'ecole ou les papillons agacent les dieux de platre. Mais 1'adversaire a le reve dans son jeu. On ne sait si son immobilite nait d'un exces de vilesse ou dune lourdeur effrayante de statue. Debout, ce Villiod en manteau noir n'a besoin de bouger. II voit tout, entend tout, cait tout, nul n'en doute. II y a des chambres de crime oil jamais ne perle une goutte de sang. II y a la chambre de Harry Langdon blanc comme la neige, innocent comme l'enfant qui vient de naitre. Harry, mon vieux, dors-tu? M'entends-tu, assez reve. Harry souffle sa lampe au mitan de la chaussee. Les globes electriques s'eteignent. D'autres fument une derniere cigarette, redoutent une guillotine moins froide. Oil sommes-nous? Soudain je retrouve ce petit matin de Londres, pies de Sainte-Marie de Kensington. Un minstrel passa frileusement sur le trottoir. II n'y avait pas ame qui vive et personne dans les rues. PAUL GILSON.