La Revue du Cinema (1947)

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ses places vides et ses rues grouillantes, d'Ancône avec sa foire de SaintCyriaque, du Pô avec ses larges grèves de sable; paysage sillonné de routes poudreuses où les autos et les humains circulent comme un sang noir, où un distributeur d'essence peut devenir une oasis et un but pour un tas de gens, où une auberge peut contenir l'enfer et le paradis pour notre peuple, à qui le mal apparaît fatal, tout à la fois cause et effet du bien. Sur ce fond passent, inévitables et pathétiques, les ombres dés marchands ambulants et des mécaniciens, des prostituées et des garçons d'auberges, — qui donnent aussitôt vie aux innocentes et exubérantes folies du peuple, à ses élans de générosité, aussi soudains qu'inestimables, à ses désirs obsédants, à ses passions violentes, aux fureurs primitives et aux désastres de ses amours. Toute une humanité misérable, avide, sensuelle, obstinée, esclave de la lutte quotidienne pour l'existence et d'instincts qu'elle ne peut dominer. Une humanité agissant par impulsions subites qui, sans le contrôle de la pensée, éclatent dans un déchaînement où vouloir et prendre se confondent en un même besoin de satisfaction immédiate, — en deçà du bien et du mal. Ces créatures simples et non coupables, même dans le halo du mal, de la passion, de la trahison et du crime, l'auteur du film ne les enchaîne pas à leur malheur. Il ne se contente pas de les suivre avec une commisération détachée mais les enveloppe d'une pitié fière, chaude, sincère, d'une sympathie protectrice et d'une compréhension humaine nées de la patiente et douloureuse recherche des vraies causes du drame. Car ce monde qui souffre, Visconti ne l'a pas regardé avec une froide amertume, comme un moyen d'exercer sa virtuosité technique et de tirer des hommes et des choses une certaine quantité d'effets savants : il l'a ordonné et composé dans une harmonie supérieure ; et il a montré la douleur humaine dans toute sa grandeur. Enfin le miracle d'Obsession est de nous faire assister à la naissance d'un style : style d'une qualité toute personnelle où sont parfaitement assimilées et refondues les influences de culture et les leçons tirées de l'expérience des aînés ; style qui révèle une attitude et ime sensibilité nouvelles, aussi bien dans un don spécial de. percevoir les choses que dans l'art de les recréer pour les représenter. Autant que de la beauté des images, la poésie d'Obsession émane d'un certain « épanchement lyrique » exprimant l'âme des choses et des personnages, — saisie et divulguée tantôt par témoignage direct, tantôt par des allusions ou des correspondances psychologiques, grâce à l'obscure et passive complicité des choses. En effet, à chaque image de son film, Visconti a plongé ses personnages dans une harmonie d'éléments qui prolongent leurs gestes et qui renvoient l'écho résonnant de leurs paroles. Qu'ils éclairent les particularités d'une atmosphère ou qu'ils traduisent l'état d'âme d'un être, ces éléments sont toujours liés aux objectifs intimes et aux motifs dramatiques du sujet; participant ainsi à la composition de tableaux brûlants de vie, ou dominant une scène et prenant une signification symbolique et absolue. Citons la séquence où Giovanna, après la fête, s'endort dans la cuisine encombrée de piles 40