La Revue du Cinema (1947)

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fier d'après des catalogues, s'il suffit d'un film sorti d'une armoire pour jeter lediscrédit sur l'ensemble d'un ou\Tage qu'un peu de prudence aurait mieux protégé (i)^ Après avoir tué ce qui restait de l'armoriai de France au Bazar de la Charité et montré ainsi son incompatibilité d'humeur avec ce genre de société, tandis qu'à l'Exposition de 1900 s'animent les premiers films parlants, le cinéma, — réfugié dans les baraques foraines, près des Boulevards où, jadis, Zecca fut le témoin terrifié et muet sous la Commune des fusillades des \'ersaillais — , voit l'avènement du réalisme annoncé par L'Histoire d'un crime, suite de tableaux \-ivants, procédant des images d'Épinal, des complaintes populaires, du Musée Dupuvtren (2). Dans un décor brossé à la hâte, les bas-fonds s'\ exhalent. Ne nous 5' trompons pas, ce film appartient au fantastique. Il procède du rêve, de l'inconscient, tout comme les courtes \-ues de Georges Méliès. Ainsi, après avoir été, avec Lumière, un merveilleux document sur l'aspect extérieur de la vie quotidienne, après s'être, avec Méfiés, associé à la fable, le cinéma devient le révélateur le plus extraordinaire des fantasmes collectifs. Dès lors, rien ne peut plus entraver son essort. Tandis que Georges Méliès, tout en poursuivant inlassablement ses jeux métaphysiques, s'évertue à demeurer par l'ampleur de ses mises en scène et le soin apporté à leur réalisation, le premier et le plus grand des réalisateurs de son temps — le cinéma voit se confirmer le succès de l'école naturaliste appelée aux plus grands développements. Dans leurs films tirés, d'après les sujets griffonnés en quelques lignes par ceux que l'on appelait alors : les metteurs en scène — ce qui ne correspond plus au terme actuel du mot (3) — les véritables metteurs en scène Brotteaux, puis Nonguet, bientôt assistés de Gasnier, Desfossé, enfin Hatot, revenu au cinéma et qui y introduit Jasset et Feuillade, généralisent la juxtaposition des scènes d'extérieur réalisées en plein air et d'intérieur réalisées en studio, ce qui est le propre de la technique cinématographique jusqu'à nos jours. Ce sont eux qui firent de la poursuite l'élément principal du comique cinématographique auquel Feuillade, à ses débuts, apporte une variante plus subtile chez Gaumont, variante dont Une dame vraiment très bien est un exemple parfait (4). Ce vérisme du décor d'extérieur triomphe chez Pathé et chez Gaumont jusque dans les films de trucage {La Machine volante, igoi ; L'Homme aimanté, 1907), et la féerie, il est à l'origine du passage du réel à l'imaginaire et vice versa, qui donne au Fils du Diable fait la noce à Paris (Pathé, 1906) sa saveur originale et sauve les films de \'elles et de Chomont du Châtelet dont ils procèdent, malgré les apparences, par le caractère de leur inspiration, bien plus que l'œuvre de Méliès. (1) C'est ainsi que Life of an American I-ireinau. retrouvé, vient d'anéantir en une projection tout un échafaudage élevé autour d'un catalogue et de quelques photographies. (2) Zecca fut surtout directeur de production : une espèce de Pommer; tous les témoignages concordent sur ce point, presque tous les films qui lui sont attribués ne sont pas de lui, mais de Nonguet. de \'elles, de Brotteaux. Cela, d'ailleurs, n'exclut pas l'école qui lui est attribuée par la légende dans l'avènement du réalisme; il fut surtout l'homme des forains. (3) C'est ce qui explique la confusion qui fait attribuer à Heuzé, en particulier, tant de films mis en scène par d'autres, comme La Course à la perruque et Les Chiens contrebandiers. Pour les mêmes motifs, il est fort probable que si le sujet du F/Vî du Diable est de Lépine, la mise en scène doit en être de Chomont. (4) Une jolie femme, très élégante, marche dans la rue, provoquant sur son passage les pires catastrophes, chacun s'arrêtant ou se retournant pour l'adinirer. Le rythme est donc lié au déplacement du personnage, mais le gag de la catastrophe est déclanché par contrepoint. 9