La Revue du Cinema (1947)

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toutes les qualités pour exister en tant qu'art, n'est en fait qu'une marchandise qu'on produit, négocie et diffuse selon les règles qui dans notre monde réglementent la production, le commerce et la consommation des denrées en vue d'un profit. On a déjà dit que la liberté d'expression des créateurs devait ainsi, dans cette société précise que nous subissons, s'accommoder d'un cahier des charges, qui comporte noliamnient la transformation nécessaire des œuvres en objet de négoce, la disparition à peu près générale des œuvres du passé et l'obligation de trouver un compromis entre la nécessité économique impérieuse de renouveler le spectacle et celle, non moins impérieuse, d'approcher au plus près des procédés de confection à la chaîne des produits, appelés, par antiphrase peut-être, rationnels. Plus personne aujourd'hui ne peut attribuer à une quelconque nature intime du cinéma, à une vocation particulière l'existence du star sysiem, du re-make, de la loi des séries, et de la destruction, sinon systématique, du moins efficiente, des films hors de rapport. La connaissance, et le goût, du tragique permettent évidemment à Jean Grémillon de mesurer la force dramatique de cette opposition. D'autant qu'il paraît ne pas cesser de l'éprouver. Car, si la liberté d'expression des auteurs de films évolue ainsi dans des limites que chacun peut apprécier à sa guise, et on va jusqu'à comparer ces règlements de fabrication à la contrainte, la divine contrainte, sans quoi n'existe pas de création — , la liberté du consommateur n'est g aère plus favorisée. Aucun choix systématique, aucun ordre logique, chronologique, alphabétique seulement, aucune distinction des genres, des époques, des écoles, voire des personnes, n'est seulement pensable, dans le mode de consommation actuellement seul, ou presque, en vigueur. Les cinéclubs n'atteignent qu'une fraction relativement très limitée du public et leur programmation, comme ils disent, reproduit malgré eux les formes en vigueur dans le monde de la distribution : un programme y comporte nécessairement le grand film et le court métrage, et la succession de ces programmes s'effectue sans ordre ni classement, par définition. Il y a d'ailleurs plus grave encore. Et, bien que président de la Cinémathèque Française, Grémillon le sait plus pertinemment qu'aucun autre. De toute son œuvre passée, celle de la période du muet, rien ne subsiste, sauf quelques photographies et le souvenir que certains de mes aînés peuvent encore en garder. Le jeune violoniste du Ciné Max-Linder, revenu de son service militaire et qui quittait sa fosse d'orchestre pour écrire des sous-titres de documentaires, ne se souciait évidemment pas, en laissant archet et porte-plume pour la caméra qu'il maniait avec Georges Périnal, de la trace éventuelle que laisserait La Cathédrale de Chartres, son premier « court-métrage ». On n'a jamais encore vu un auteur de films « écrire ;> pour la postérité. Le voudrait-il, d'ailleurs... Je n'arrive pas à en faire un argument qui me permettrait de supporter d'un cœur léger la disparition irrémédiable d'une Thérèse Raquin, de Feyder, comme celles de Tour au large et de Gardiens de phare, de Grémillon. Ce que j 'en connais — le sujet, des fragments de musique, des photos, des articles — m'amène à me demander si les qualités de ces films n'étaient pas celles précisément qu'une opinion devenue courante attribue au cinéma italien d'aujourd'hui. 4