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JEAN DESTERNES
De adaptatione
LA CHARTREUSE DE PARME. Réalisation : Christian Jaoce. Scénario et adaptation : Pierre Véry, Pierre Jarry et Christian Jaque. Dialogue : Pierre Vérj'. Photographie : Nicolas Haver. Décors : D'Eaubonne. Costumes : Annenkoff. Musique : Rossellini. Interprètes principaux : Renée Faure. Gérard Philipe, Maria Casarès, Louis Salou, Lucien Coede), Louis Seigner, Tullio Carminati. (Prcd. André Faulvé-Scalera-Film, Rome. IQ47.)
« Chez Stendhal, dit André Gide dans Le Journal des Faux Mo)i)iayeurs, jamais une phrase n'appelle la suivante, ni ne naît de la précédente. Chacune se tient perpendiculairement au fait et à l'idée. » Est-ce là une indication valable pour un cinéma pur, un enchaînement d'images 'dont chacune apporterait un effet de surprise?
Toujours est-il qu'il n'y a guère d'auteurs moins cinématographiables que Stendhal, malgré ses sujets étourdissants. Car avant tout, c'est un style, et c'est un homme. Avant d'être des récits et des personnages, ses livres sont pour nous Henri Beyle, dit Brûlard, dit Jules Pardessus, Timoléon du Bois, Louis-.ÂlexandreCésar Bombet et toujours Stendhal s'exprimant à travers des intrigues diverses et des figures de son rêve.
Il peut se faire, comme Jean George Auriol le souhaitait récemment, que nous ayions un jour des cinéastes stendhaliens. Xous n'aurons jamais sur l'écran que d'honorables trahisons de Stendhal.
Bien sûr, il convient de lutter contre la manie de médiocriser les chefs-d'œuvre. Mais, si lamentable soit-elle, une adaptation cinématographique laisse intact le prestige d'un bon livre et incite des spectateurs — qui sans cette occasion n'en auraient jamais eu envie — à se reporter à l'auteur, .\insi ne fut-il jamais interdit de reproduire les tableaux du Louvre ou de l'Escurial, quoiqu'il ne reste sur un journal que quelques taches d'encre qui sont bien trahi.son manifeste envers Goya ou Véronèse.
Or non seulement une adaptation de La Chartreuse de Parme amène au roman des milliers de lecteurs — et de relecteurs, mais le moins curieu.x de\Ta, devant les divergences du texte et de l'image, se poser des questions et parfois même y répondre. Il sera invité à réfléchir, aussi peu que ce soit, sur les caractères et leurs mobiles, sur le bien-fondé des simplifications et des interprétations. Le film eût-il été bien plus sacrilège, tous les beylistes devaient cependant se réjouir : 194S serait encore une fort belle année stendhalienne.
« Quoi? me direz-vous. Partir du principe que Stendhal est inadaptable pour entonner aussitôt la louange d'une publicité déplacée !
A cela je répondrai que, si l'essentiel de Delacroix ne saurait se trouver dans un texte de Baudelaire et si le commentaire baudelairien ne remplace aucunement le tableau qu'il décrit, il nous reste à voir ce que nous avons lu. Pour la Chartreuse, il nous reste à lire ce que nous avons vu.
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