La Revue du Cinema (1947)

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Le charme, au sens vagae et charmant que prend ce mot dans la conversation, était un des secrets de Lubitsch. Ce petit Berhnois aux traits accentués, quasi orientaux, qu'égayaient des yeux noirs perçants et vifs comme ses gestes, était au fond égoïste et jouisseur mais il se faisait admirablement obéir parce qu'il était bienveillant et toujours prêt et prompt à aider les gens et à manifester son contentement et même son admiration : avec d'autant plus d'élan et d'enthousiasme qu'il ne se trompait jamais sur les hommes. Il savait si bien s'entourer que, croyait-on, il portait bonheur. Le magasin de son père fut déjà pour lui une espèce de petit théâtre où il apprit à observer et à juger les hommes, au moins en surface, et à s'amuser de leurs jeux de grands enfants. Ses études terminées, il prit des leçons de comédie avec l'acteur classique Victor Arnold qui le fit entrer au Deutsches Theater où Max Reinhardt lui donna des rôles comiques dans ses ballets-pantomimes. C'est encore par Arnold qu'il put débuter à l'Ufa dès 1913. La troisième personnalité qui eut une influence bénéfique sur sa destinée fut Pola Negri. Est-ce lui qui a fait la fortune de cette Polonaise rêveuse douée du tempérament passionné de la diva italienne, avec sa brune crinière, ses yeux fiévreux et, en plus, quelque chose de paysan et de vorace dans son visage court aux lèvres brillantes? Ou bien est-ce elle, comme l'a prétendu elle-même cette villageoise promue Vénus moderne, qui l'a « inventé »? Sans doute se sont-ils portés mutuellement chance. Hollj^wood les appela séparément, après avoir été étonnée par cette Du Barry sensationnellement mise en scène; mais ils se rejoignirent peu après et Pola n'a pas inutilement éclairé la route construite par Ernst en Amérique : jalonnée de temples à l'amour et fréquentée par des héroïnes de types divers mais toujours « continentales ». Les femmes de Lubitsch ne sont pas yankee. Quand les producteurs américains l'ont fait venir puis encouragé à rester dans leurs studios, Ernst ne savait pas très bien ce qu'il pourrait faire pour eux, mais eux savaient qu'ils avaient besoin de lui pour fabriquer un produit nouveau. Ainsi Louis XIV invitait, installait et faisait sujets de son royaume les meilleurs fabricants de drap de Hollande comme François I*""" avait attiré en France les grands artistes italiens. Lubitsch fut peut-être séduit par l'Amérique, comme tant d'Européens après la première guerre mondiale, mais il y vint sans doute avec l'idée très nette qu'il pourrait y élargir son horizon. On devine ses conversations avec son scénariste habituel, Hans Kràly, et d'autres amis qu'il emmena ou fit ergager par la suite à Hollywood. Il devait y être question d'un cinéma américain un peu différent de celui que les Américains eux-mêmes considéraient comme le meilleur : puisque les Américains déchiffrent assez mal les vertus que nous leur envions, d'une part, et en raison, d'autre part, des effets d'optique mentale résultant du dépaysement; effets qui expliquent, par exemple, le succès démesuré à nos yeux de La Femme du boulanger aux États-L'nis alors que la majorité des Américains sourient de notre admiration pour Chaplin, Stroheim, Lai gdon, Welles et d'autres artistes qui leur paraissent des gens très ordinaires ou des ratés. A l'appui de ceci et pour nous en tenir aux relations de Lubitsch avec les gens du Nouveau-Monde, nous tenons à citer des passages d'une interview faite par le journaliste et écrivain Jim Tullv (i) à une époque où la réussite du réalisateur alle (i) Dans Vanily Pair de décembre 1926 (The Condé Nast Publications) . 18