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et les spectateurs, ingénument et d'instinct, classaient d'emblée dans cette catégorie tous les acteurs habillés avec recherche, avec la même instir.ctive naïveté qui le portait à rire des comiques ventripotents. »
Vint enfin, parmi ces acteurs, un homme aux moustaches fines, aux fracs impeccables, un « collectionneur de costumes élégants », comme luimême se plaisait à s'appeler, auquel Lubitsch attribue une véritable révolution dans la comédie américaine : c'est Adolphe Menjou (i). « Acteur né, note Lubitsch, très sensible, qui, avec sa propre élégance, apportait sur l'écran américain un style neuf et révolutionnaire à sa façon. En fait, avant lui, l'éîégance était un élément qui pouvait être offensant pour le public... »
Mais cette révolution, pour continuer à l'appeler ainsi, phénomène filmique caractérisé par la présence de Menjou (par exemple, chez Lubitsch, dans Marriage Circle et dans Paradis défendu), Lubitsch l'étendit à ses autres interprètes et, universellement, à toute sa production, si bien qu'il alla jusqu'à transformer l'attitude du public en face du cinéma. Sur l'écran, où les spectateurs étaient venus chercher le comique et l'aventure, maintenant ils pouvaient espérer trouver leur idéal plus commun, prendre modèle sur eux et s'inspirer de leurs toilettes, de leurs mobiliers, les suivre au bal et se gorger avec eux de musique et de luxe.
Lubitsch qui avait le don d'offrir la richesse aux spectateurs, non comme une insulte à ceux qui n'ont rien, mais comme réconfort à ceux qui doutent qu'il puisse exister tant de faste dans le monde; non par mépris des pauvres mais pour les réconcilier avec la vie en leur faisant découvrir une autre planète : fantastique, c'est-à-dire somptueuse et merveilleuse. Sa propre vie justifiait d'ailleurs cet optimisme satisfait : né pauvre, il avait dû travailler avec acharnement pour vivre et, après avoir réussi, il aimait manifester sa satisfaction de faire de l'argent : <■ Chevalier, Mac Donald et moi formons un trio qui a été souvent un des plus « efficaces », et des plus bénéfiques du cinéma américain. »
Il était conscient, donc, de n'avoir pas travaillé en vain et d'avoir mérité son succès : succès dû précisément aux ^•oyages du public dans ce monde joyeux et brillant auquel, selon sa conception de la vie, nous devons tous aspirer.
Le travail avec les acteurs
Lubitsch fut acteur avant d'être metteur en scène (2); et le jeu de ses interprètes se fondit dans le style et le rythme de ses œuvres : il s'intégra dans un mode d'expression qui, sans éviter la réplique vive ni le dialogue spirituel, valait avant tout par le ton, les gestes, les mouvements du comédien pris comme matière cinématographique. Qu'on se souvienne du Parisien (Melvyn Douglas) qui raconte des histoires drôles à l'impassible Xinotchka pour essayer de la dérider. Il commence avec grâce et beaucoup d'assurance puis, à mesure que ses tentatives échouent, il s'inquiète, «s'agite, se trouble, commence à vociférer, furieux, ses calembredaines. Finalement, il perd l'équilibre et choit sur le parquet ! Aussitôt, les rires des voisins, dont il a cherché en vain l'écho chez la belle bolchevique, grossissent de telle sorte qu'ils gagnent celle-ci... Greta Garbo, alors, pouffe de rire à en perdre la respiration. Lui-même ne peut
(1) Celui, avant tout, de L'Opinion publique (A Womau oi Paris), de Chaplin. Voir page 20.
(2) Chez Reinhardt, en 191 1, il joua le second fossoyeur dans Hanilet et Wagner dans Faust.
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