La Revue du Cinema (1947)

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sort, satisfait, rassuré, heureux. Nous devinons l'état d'âme des protagonistes d'Ange, rien qu'à voir les côtelettes intactes, coupées ou disparues dans l'estomac de Herbert Marshall. On a une idée du genre d'ordre qui règne à la cour impériale de Pola Negri ( Paradis défendu ) en voyant son Ministre (Adolphe Menjou) distribuer des billets de banque aux mécontents. Derrière les portes de Lubitsch, — • ces portes qui s'entr'ouvrent, s'ouvrent ou claquent infatigablement, — mille et mille choses se passent que nous apprenons par les domestiques entrant et sortant, par les fleuristes et les beautés professionnelles, ou par des éclats de voix et de rire, un chant, un hurlement, un hoquet, un gargarisme... Et ce « matériel plastique » est si bien manipulé que dans une nuit de noces « il suffit, remarque Alexandre Arnoux, d'un coup de pied dans un vase de fleurs pour que nous n'ignorions plus rien. « Lubitsch ne suggérait pas seulement les faits, les sentiments et les états de choses par des gestes, des objets, des paroles, mais aussi au moyen des mouvements de sa caméra : travelling pour découvrir les pistolets des soldats agenouillés dans L'Homme que j'ai tué ; découverte de l'appartement parisien de la veuve joyeuse que Danilo devrait épouser; mouvements d'approche sournois autour des jolies femmes; fouille des salons, armoires, alcôves... Certes, sa psychologie semble aussi simple et superficielle que celle des opérettes qu'il affectionnait; et l'on doit ajouter que, lorsqu'elle est mise en défaut, elle découvre parfois un vide impressionnant, où risque de tomber en un instant toute notre admiration pour lui; elle est cependant sauvée par la grâce, l'habileté (i) de Lubitsch, son désir charmant d'être un amuseur en utilisant toutes les ressources du décor, du costume, de la musique avec un goiit européen synthétique, dans un monde idéal où le Danube passe non loin des FoliesBergère et même à Monte-Carlo en traversant Heidelberg. C'est ce don étonnamment cultivé et utilisé qui lui a légitimement permis de devenir un des maîtres les plus originaux du cinéma mondial et le réalisateur préféré du public; et c'est bien au public, en effet, que pensait Lubitsch en voulant « divertir à la fois Bernard Shaw et les débardeurs de New York ». Il fut sans aucun doute l'homme de cinéma qui, d'instinct, comprit le mieux les besoins des spectateurs. Lubitsch, consolateur de l'homme moyen, a toujours affirmé et défendu l'idée que la mission du cinéma était de mettre le goût à la portée de tout le monde, de créer un type unique d'humanité, de se faire le paladin d'une internationale des bonnes manières et, si possible, du bonheur. Il ne négligeait rien, au reste, pour répondre aux désirs des publics les plus divers : « Quand on veut produire un film international, il faut satisfaire au goût de tous les pays où il sera vu. » Et « il stylisait Paris ou Vienne, observe encore Alexandre Arnoux, un peu comme l'Italie est stylisée par les contes de La Fontaine ou la fantaisie de Musset ». Mais, avant tout, il lui fallait des personnages romanesques tels que Danilo, — comme, dans le monde de Lucio D'Ambra, s'était forcément formé le royaume de Fantasia. Si l'Israélite est pourvu d'un sens plus profond de l'international, Lubitsch sut le développer et le communiquer à merveille autour de lui grâce aux séductions de la musique et de son optimisme. « Ma politique? répondit-il un jour à un journaliste, c'est celle que j'ai faite dans mes films. » Il n'avait, en somme, de plus haute ambition que de divertir les gens et de les rendre heureux. (i) En français tlan.s le te.xte italien. 40