La Revue du Cinema (1947)

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DÉBAT SUR LE RÉALISME Documents : I PHILIPPE FAURÉ-FREMIET Philosophie du Réalisme La tradition platonicienne, liée au Christianisme, nous fait considérer comme très claire l'intuition d'un double mode de l'être : l'idéal et le réel. D'un côté l'inaccessible, l'invisible, le royaume de Dieu, le monde des perfections intelligibles, des merveilles promises mais, actuellement, interdites; de l'autre le sensible, les choses qu'on voit, qu'on touche, qui pèsent et qui écrasent, le quotidien, le réel qui nous réjouit ou qui nous blesse et qui nous tue, le pis aller que nous avons cependant toujours peur de perdre, parce que nous ne connaissons pas les conditions de l'échange, parce que nous ne sommes même pas sûrs qu'il y ait échange. Si l'art a quelque raison d'être, ce n'est pas de nous re-présenter le réel toujours présent, l'obsédant réel à portée de la main, à portée de la vue. S'y hasardc-t-il, il n'offre à nos sens que sordide imitation, doublure morte dont on ne peut rien tirer. Sa valeur est, alors, purement mémoriale ou documentaire. Le portrait des morts ou des absents vaut mieu.x que ri^n; l'image d'une ville inconnue nous fait pressentir ce que nous y pourrions trouver. Le rôle de l'art n'est-il pas plutôt de donner une structure imaginaire à tout ce dont l'homme ne dispose pas, à ce qu'il ne peut atteindre, à ce qu'il ne peut voir autour de lui, à l'irréelle perfection, à V Idéal en un mot ? Notons, avant de poursuivre, que l'homme primitif, dans ses premières manifestations artistiques, n'a nul souci de reproduire ce qu'il voit : la reproduction ne peut valoir la chose, elle est inutile et sans intérêt pour lui. Si le primitif dessine ou sculpte, c'est pour désigner symboliquement la fonction, pour enchaîner ou fortifier l'être dans sa fonction : course, marche, envol, génération. Si le civilisé dessine, peint, sculpte, décrit c'est, dans toute l'immense floraison de l'art traditionnel, oriental ou occidental, antique ou médiéval, pour figurer de façon sensible tout ce que le sensible ne nous donne pas : les Dieu.x, les Mythes, le surnaturel, le Ciel ; l'Homme parfait, l'Homme idéal de la statuaire grecque, le monstre ailé des Assyriens, la danseuse Khmer dépersonnalisée, le (^rist en Majesté de l'art roman, les anges et les apôtres surhumains, les Reines mystiques longues comme des colonnes. Quand le réel s'y mêle, c'est d'une manière complémentaire, comme pour souligner le surnaturel en lui opposant la condition humaine dans ses attitudes fondamentales : le travail, le vice, la souffrance, le malheur. Et c'est ainsi qu'à la base d'un pilier ruiné de la grande abside de Saint-Gilles nous voyons un ouvrier minuscule tordu de douleur, la jambe écrasée entre fût 19