La Revue du Cinema (1947)

Record Details:

Something wrong or inaccurate about this page? Let us Know!

Thanks for helping us continually improve the quality of the Lantern search engine for all of our users! We have millions of scanned pages, so user reports are incredibly helpful for us to identify places where we can improve and update the metadata.

Please describe the issue below, and click "Submit" to send your comments to our team! If you'd prefer, you can also send us an email to mhdl@commarts.wisc.edu with your comments.




We use Optical Character Recognition (OCR) during our scanning and processing workflow to make the content of each page searchable. You can view the automatically generated text below as well as copy and paste individual pieces of text to quote in your own work.

Text recognition is never 100% accurate. Many parts of the scanned page may not be reflected in the OCR text output, including: images, page layout, certain fonts or handwriting.

duire le coefficient Art pour être plus riche de Réalité, et il le supprimerait volontiers, s'il ne devait, du même coup, se supprimer. Cruelle faillite : être le greffier du réel, ouvrir le ciné-œil, enregistrer le plus mécaniquement possible la vie toute pure... ■ Et alors ? Il reste à présenter le plus artistiquement possible, ces éléments du réel, ainsi obtenus et se remettre après à la falsification artistique qu'on a refusée avant. Car cette vision du réel ne peut être l'effet du hasard. Elle nécessite avant tout une mise en forme, donc un style. Sinon, c'est encore de la matière première, romanesque, filmique, etc. Le hasard, certes, est l'ange gardien du créateur. Dans la baignoire d'Archimède, l'encrier de Valéry ou la caméra de Rossellini, il sera le bon génie du génie. Mais on connaît l'exemple célèbre des mille singes tapant durant l'éternité sur leurs machines à écrire sans trouver grand'chance d'écrire quelque jour le Discours sur la Méthode. ■ En art, le réalisme consistera donc à recréer le réel le plus vraisemblablement possible. Car, ne l'oublions pas, il s'agit de nous convaincre, et le vrai n'acquiert de crédibilité que dans la mesure où le maquillage de l'art nous le rend vraisemblable. Il faut même aller plus loin : rien n'est vrai en art puisque chaque événement présenté (paysage, visage, etc.) exprimera une vision personnelle, un point de vue contestable, un choix tout relatif, ce qui suppose une variété considérable de versions tout aussi « vraies », toutes aussi '( fausses « puisque contradictoires. Et cela, quel que soit le support artistique choisi : à chacun sa vérité, et la Réalité s'évanouit devant des réalités qui s'annulent l'une l'autre. ■ Donc, en art, rien n'est vrai, ou plutôt tout est vrai. Car dès l'instant que cette réalité est traduite en mots, en images, c'est son expression qui existe indubitablement aussi fausse (réalistiquement parlant), aussi chimérique, aussi funambulesque soit-elle. Et cette réalité à la seconde puissance devient alors plus vraie que la réalité première puisque, en la « fixant » sur le support artistique choisi, l'artiste lui donne une chance de durer. Ainsi la Joconde : quelques grammes de couleur appliqués sur une toile par un quinquagénaire fort peu réaliste, constituent une réalité plus solide que le sourire de Mona Eisa depuis longtemps poussière. Ainsi la révolte du cuirassé Potemkine : en quoi Eisenstein a-t-il besoin du cachet « ressemblance garantie »?; ■ « Tous les carnets de route rédigés par les guerriers de Troie se sont perdus au détour des siècles. Il ne reste que L'Iliade », écrit Georges Duhamel dans Remarques sur les mémoires imaginaires, dont nombre de réflexions seraient à citer pour l'édification des réalistes, à propos de la primauté de la vérité légendaire sur la vérité dite historique. Oui ou non, doit-on transfigurer le réel ? Lorsqu'un artiste nous annoncera : je vais vous conter une histoire, elle sera toujours vraie pour nous s'il sait nous la conter. Notre terrasse de café, danssatranspositionlittéraire ou cinématographique, n'aura d'existence qu'autant que le transfigurateur aura su lui en donner une. Filtrage différent. Dieu merci ! selon chacun. ■ Si les notes ci-dessus peuvent sembler établir des distinguos subtils entre le réel et la traduction qu'on en donne, c'est que nous sommes dans le relatif, dans le qualitatif. Il ne s'agit pas de dire : « C'est-i-vrai ou c'est -i-pas vrai? », car c'est toujours (et jamais) vrai, sous l'œil de Dieu. Il ne s'agit donc pas d'être réaliste à loo °o, pas plus qu'à 75 %• Il s'agit de recréer d.\ns une forme .\RTisTiQUE un ou des éléments empruntés à la réalité. Le débat portera donc sur des intentions. Dans la simple opération qui consiste à redire ce qu'on croit avoir entendu, de montrer ce 50