La Revue du Cinema (1948)

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Le débauché crapuleux de Hogarth, recréé et modelé par Val Valentine, puis Sidney GiUiat et Frank Launder, et enfin incarné par Rex Harrisson, a fait place à l'indifférent cynique des années 20 et 30, ignorant les contraintes morales d'une société muable, insensible à la sensibilité des êtres qu'il déçoit, trompe, ruine, avilit, désespère; bien que, tel L'Homme couvert de femmes de feu Drieu La Rochelle, il dit « une bonne nature ». C'est en tout cas ce que dit dans l'histoire son propre père, digne membre conservateur du Parlement britannique. Renvoyé d'Oxford, \'ivian Kenway est expédié en Amérique dans une exploitation de café. Honorable parasite, il n'est pas dupe de son inutilité, au milieu des gens compétents mais obscurs qui sont mal payés pour faire le travail qu'il surveille en jouant au cricket; et bientôt il ne peut s'empêcher de se faire mettre dehors pour le plaisir de tourner en ridicule un président de Conseil d'Administration aussi cynique et aussi immoral que lui et, par surcroît, étant donné ses pouvoirs, bien plus dangereux ! Comme Gilles, héros du même Drieu, il est incapable de s'intégrer dans ime époque transitoire où il est venu trop tard ou trop tôt et il ne trouvera que dans la guerre une fin utile. Sa mort seule servira, pratiquement, à quelque chose. Auparavant, il va de scandale en scandale, couche avec la femme de l'ami qui l'arrête au bord de la misère, mais n'épouse pas cette créature qu'il n'aime pas plus que toutes celles qui sont prêtes à souffrir par lui, car il a le charme de l'être détaché de tout, que nulle barrière morale ou physique n'arrête. Comme Gilles encore, « il acceptait tout de l'être aimé, il acceptait que tout lui vînt de cet être. Seulement, c'était le malheur et non le bonheur. Il pleurait comme un enfant, il retrouvait toute son enfance avec ses dernières larmes. » Le rake, à sa façon, pleure sur luimême quand il doit constater qu'il apporte partout le désordre et la mort. Devenu coureur en auto, peu avant la guerre, il n'échappe à ses créanciers viennois (et ne mange) que grâce à une jeune juive qui a combiné de se marier avec ce citoyen de Sa Majesté pour s'échapper d'une Autriche devenue nazie. Vivian fait le geste qui lui coûte le plus, il l'épouse, à condition qu'elle paye ses dettes à Londres. Conscient de sa générosité et de Ja lâcheté de la petite, il s'amuse cependant à lui jouer l'amour, par désœuvrement, par galanterie, aussi par charité. Il la pousse ensuite au suicide lorsqu'il trouve en la secrétaire de son père la belle, douce et jeune « mère » qui pourrait le sauver. Non, il s'enfuit, disparaît, et la guerre l'emporte ! . . . L'étonnant de tout cela, qui n'est jamais théâtral, ni littéraire, ni « du studio », c'est l'évidente vérité des événements qui se précipitent dans un récit conté sur l'écran avec une hberté et une souplesse comparables à l'accumulation stendhalienne des petits faits vrais. Si la photo (ou le tirage) n'a pas la valeur de celle d'un Toland ou d'un Agostini, ce n'est pas une raison pour mépriser la technique de ce film. Les auteurs du Rake sont au contraire en possession de la technique accomplie du roman cinématographique. Il arrive dans leur oeuvre exactement ce qui doit arriver pour montrer ce qu'ils font voir toujours de la façon la plus heureuse et dans le style le plus direct. Leur montage est si souple que le film boucle autour de trois fois plus d'épisodes, incidents, lieux et gestes qu'on n'en voit dans la plupart des films. Les caractères, outre celui de Vi\'ian, sont tous si réels, si nettement conçus, si bien présentés qu'ils n'ont qu'à se taire ou fort peu à dire pour nous éclairer sur leur pensée, leurs intentions, leur drame. Signalons pour mémoire l'élé 63