La Revue du Cinema (1931)

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L'appel au meurtre ne va pas assez loin, si 1 on veut. C'est la poésie, cette poésie-là qu'il faut tuer d'abord. Est-il nécessaire d'insister sur la fausseté de toutes ces prétentions à atteindre le fondamental, l'absolu en partant du plan de l'esprit? Car, comment atteindre quelque chose qui soit véritablement vrai par un mcde d'expression, quel que soit d'ailleurs ce mcde? Chacun sait bien ce qui se cache de labeurs et de truquages immondes derrière tout ce qui se manifeste, surtout dans l'ordre de la pensée. Dès lors, il n'est plus possible de croire à la vérité de ces manifestations. Se manifester, quoi qu'on en ait, procède toujours de l'artificiel, et prête d'autant plus au ridicule que 1 artifice prétend davantage se faire oublier. Je reviendrai là-dessus tout à l'heure. En attendant, un film reste un film. Si l'on vise à l'apostolat, c'est dans un autre domaine qu'il faut aller faire l'apôtre. Je me tiens donc fondé à considérer le Chien andalou comme un film. Un film qui doit précisément sa qualité, sa qualité poétique, à ce que sa poésie ne veut plus être simplement une d str.ction de cerveau oisif, mais souhaite agir, devenir aussi vraie que ce qui peut être vrai. C'est cela qui lui communique cette âpreté, cette vigueur. C'est cela qui est louable quand on l'envisage du côté poétique, et cela même qui devient ridicule, si l'on a la prétention d en faire une réalité. Il se passe ici cette chose curieuse et contradictoire que ce film doit sa vertu poétique à son refus d être poétique, mais que ce serait se laisser prendre au piège qu'il dénonce que d'y voir quand même autre chose que de la poésie. Le dualisme entre l'esprit et la vie est insoluble. Le fond mystérieux par lequel l'image se rattacherait à la chose réelle n'existe pas. Mais on peut faire semblant d y croire. Pour faire œuvre véritablement poétique, il faut même y croire. Pourtant, comme ce ne peut être vrai, on ne se trouve avoir fait qu'oeuvre poétique. C'est l'histoire du Chien andalou. Il met en lumière l'ambition et l'impuissance de la poésie et, par suite, son pathétique. Du même coup, il s'est trouvé exprimer, sans presque l'avoir cherché, la poésie du cinéma. Le cinéma, le cinéma qui ne fait pas de différence entre l'image et la réalité, se trouve idéalement destiné à faciliter la confusion de l'une et de l'autre et, partant, à exprimer 1 essence de la poésie. Et cela reste, malgré qu'on en ait, de la poésie, de 1 irréalité, puisque le cinéma ne peut, bien entendu, être que du cinéma. Ce parallélisme, cet accord entre la nature profonde de la poésie et les moyens d'expression du cinéma explique la réussite du Chien andalou. Reprenons le film pour éclairer ce qui précède : Le thème poétique fondamental : la vertu agissante du concept, de ce qui n est qu'une image, sur ce qui existe véritablement, justifie 1 influence psychique sur le cours des événements (ex : accidents produits par l'effet d'une volonté étrangère, etc.). Ce même thème explique le passage d'un objet à un autre par similitude de leurs aspects formels (fourmis dans la main devenant poils axillaires, devenant oursin dans un creux de sable, etc..) et il n'est plus permis de ne voir là qu un naïf et arbitraire symbolisme. Il explique encore la recherche de 1 insolite dans la vie courante, cet insolite étant interprété, au rebours du dit thème, comme une création d images significatives par la réalité (main coupée au milieu d un cercle oïdinaire de badauds; bicychste fantaisiste dans une rue normale, etc.). L appel à l'insolite permet encore de créer un lien entre des épisodes disparates (rôle joué par la boite du cycliste), grâce à quoi il semblera que les faits de la vie quotidienne peuvent se tendre sur une trame tout autre que celle de la causalité ordinaire. Le passage de l'image à la réalité, de la réalité à l'image se fera en tous sens, de façon si spontanée, si fréquente, qu'on ne saura plus distinguer 1 une de 1 autre. L'œil ouvert sur le monde voit alors s'offrir à lui un panorama infiniment plu; 44