La Revue du Cinema (1931)

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sans rien devoir aux intentions particulières à l'esprit qui les a rassemblées. Ces associations de mots représentent alors le don (ce qui est donné) à l'état pur, et doivent, pour être reconnues poétiques, exiger de celui qui les lit l'effort d'interprétation humaine que celui qui les a écrites s'est refusé à laisser paraître autrement que sous forme d'un choix fait parmi la matière offerte assez mystérieusement par le verbe. Si l'on veut, la poésie ne tient plus qu'à une dernière faiblesse dont l'auteur avisé laisse la honte au lecteur. Cette évolution, en invitant à serrer au plus près la matière traitée et à ne plus faire appel qu'aux mots seuls, devait conduire à un stade plus avancé dans lequel les mots seraient élus non plus pour les possibilités d'émotion poétique qu'ils peuvent engendrer, mais pour une signification plus profonde, plus objectivement liée à celle du langage et tenant à la valeur métaphysique du verbe. La physionomie subjective que, sous forme de poésie, ces mots pourront prendre dans un esprit humain, n'importe plus. Ce ne sont plus de simples poires à parfum lançant leur drogue poétique vers les régions obscures de la cervelle. Les mots vont être pris en eux-mêmes, non pas en tant que signes arbitraires servant à la notation d'un concept, mais en tant que morceaux d'une intelligence et aptes à fournir une expression de cette intelligence avant tout contact de celle-ci avec le monde sensible. Les mots se présentent alors avec la réalité, la signification (qui n'a rien à voir avec la signification raisonnable) de l'Esprit, comparables en tous points à la réalité, la signification du monde matériel. J'insisterai plus tard sur ce point. Demardons-nous d'abord ce que va devenir cette poésie qui se détache du langage. Au terme de son évolution, la poésie tenait encore à l'image, à l'image qui fut détrônée pour que le verbe reprit ses droits. Or, une image peut-elle vivre sans le support des mots? et qu'en restera-t-il si les mots, appelés à d'autres tâches, l'abar donnent? Il n'en restera rien dans l'ordre du langage; mais voilà qu'une manière de miracle se produit : une chose nouvelle naît à point pour faire vivre les images privées du support du concept. Voilà le cinéma qui parle par images, et n'a besoin que d'images. Il y a image et image, et l'on pourrait croire que je joue sur les mots. Mais l'image poétique, au point où nous l'avons laissée, était véritablement une image, c'est-à-dire que pour en extraire la poésie, il fallait effectivement la voir. Il fallait que l'on vît « des calèches sur les routes du ciel ». Cela, le cinéma qui le montre sans effort, semble prédestiné à l'exprimer. La poésie, au point d'être abandonnée, semble avoir été amenée en cet état où l'image visuelle la contenant presque tout entière, elle peut changer d'orbite avec le minimum de heurts et quittant le morde des mots graviter désormais à travers l'espace que lui offrent les écrans. Cette coïncidence rappelle si bien les harmonies préétablies qu'on pourrait croire ici à un paradoxe plus ou moins ingénieux. Mais voici des exemples : Les premiers films de Méliès qui, de l'avis de leur auteur, semblaient n'avoir été faits que pour amuser les enfants de la garderie Dufayel, ont montré, vingt ans après leur naissance, qu'ils pouvaient recueillir la poésie à la recherche d'un nouveau giron pour y continuer son existence parasite. Ainsi, à son berceau, le cinéma avait, sans que nul s'en doutât, déjà fait alliance avec la poésie, et cette alliance, à n'être reconnue qu'au bout de vingt ans, échappe au soupçon d avoir été arbitrairement imposée. Et encore : Pourquoi les thèmes surréalistes : vertu active de l'image, recherche de l'insolite dans la vie courante, ont-ils trouvé quand ils ont été portés pour la première fois à l'écran un terrain d'élection si magnifique qu'ils s'y sont pleinement épanouis? N'est-ce pas qu'au point où en était la poésie, le cinéma devait la recueillir? Sans cette explication, il faudrait supposer l'impossible, à savoir que, pour la première fois dans l'histoire, le seul souci du fond (en l'espèce 46