La Revue du Cinema (1931)

qui ne savent pas. Écoutez alors Paul Baumer brûlant d indignation hurler à son maître : « Nous souffrons du froid, de la faim, de la boue, nous sommes couverts de poux, nous passons notre vie à avoir peur, à voir mourir, à tuer et à attendre la mort, et nous ne savons pas pourquoi nous sommes là ! » Ecoutez-le quand il accuse le vieux fantoche d être responsable de la mort de tous ses camarades, fauchés, broyés les uns après les autres, bouillie hurlante et désespérée ! Le film de Pabst malgré son réalisme et l horreur de certaines scènes n'atteint pas à la puissance du film de Lewis Milestone. Si, à la fin dans l'ambulance croulant sous les obus, le soldat français blessé tend la main vers l'Allemand qui meurt en murmurant : « Camarades... pas ennemis, » j'estime que l'émotion qui se dégage de cette scène et la portée qu'elle peut avoir sur le public reste bien au-dessous que celle du film de Milestone, d une attaque des Français fauchés les uns après les autres par le tir d une mitrailleuse, d'un corps qui tombe devant nous, et s abat comme un sac tandis que les mains et des morceaux de bras coupés par les coups de feux restent accrochés en l'air et dans les fils de fer. Le propre d'un film de guerre est de nous montrer l'inutilité de la guerre autant que son horreur même. Si l'on persuade aux hommes que ce n est pas pour la Patrie, ni par devoir qu'ils se battent, mais rigoureusement pour rien, les hommes réfléchiront peut-être à deux fois avant de partir. Or il est prouvé que le sacrifice de millions de morts, de toute une génération, a été inutile puisqu'on vient encore à l'heure actuelle nous reparler de guerre. Sans aucun doute si vous comparez Westfront 1918 aux autres films « de guerre » NfcRO. Westfront 1918, par G.W. PABST. 51