La Revue du Cinema (1931)

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Semblables laideurs, il est vrai, ne sont destinées qu'à de rares et fugitives apparitions, au cinéma plus que dans toute autre art, puisque c'est au cinéma que, de toute évidence, la beauté physique et toutes ses dégradations les plus mornes, les plus abjectes et les plus faisandées constituent un élément de première nécessité dans l'élaboration de l'intrigue et la composition du spectacle. De ce fait, les personnages laids, et principalement les femmes, sont refoulés, par une cruelle loi de sélection artistique, dans le domaine, à vrai dire immense, des « mauvais rôles ». Et si l'on rend méthodiquement et monotonement hommage aux beautés princières de l'écran, aux jeunes aurores américaines dépositaires du lourd fardeau des inhibitions obscures de toutes les salles, des jalousies instinctives et stimulantes de la masse compacte de leurs sœurs anonymes, il ne semble pas qu'on soit porté à rendre justice et à rendre hommage aux actrices douées de laideur, lesquelles supportent, le plus souvent, un poids encore plus lourd, celui de concrétiser la méchanceté du monde, d'en incarner les mauvais penchants et les méchantes images. Il faut avoir un grand courage, et peu de vanité, tout au moins aux yeux des simples, pour accepter de projeter sa propre laideur humaine dans le moule subtil ou grossier du personnage antipathique, du rôle odieux ou pitoyable. Cette spécialité n'est pas sans danger. Ce que surtout j'admire dans un tel destin professionnel, c'est l'autonomie morale dont, par contre-coup, les actrices laides doivent user, plus abondamment et plus difficilement que les autres, au sortir de leurs emplois, et les ressources d'énergie individuelle que sans doute la vie leur demande, même si elles ne s'en doutent point. Quelques-unes d'entre elles, par leur génie personnel, un essai remarqué, un revers du sort qui les jette au studio, le coup de maître d'un metteur en scène clairvoyant ou, plus simplement, par la nécessité toujours nouvelle d'équilibrer une intrigue, manifestent soudain un tel éclat, une telle autorité, un prestige si vrai, qu'elles créent facilement, dans les limites de leurs moyens d'expression des personnages-types, thèmes sociaux, prétextes moraux, pivots d'aventures complexes. AsTA NlELSEN donne dès l'abord une terrible impression de déchéance. Ses traits ne sont pas particulièrement accentués ni déformés; c'est plutôt un visage tristement dilaté, sur lequel court sans cesse la marque de la fatigue, l'amertume, la fadeur et la courbature des veilles forcées. Dans La Rue sans joie son rôle de prostituée, qu'elle jouait de bout en bout comme une somnambule de la misère, demeurera une ineffaçable et tragique création. Une certaine lenteur à se mouvoir, un front buté où luttent monotonement quelques idées fixes, un corps lourd de quelques obsessions obscures, une sorte de mutisme brutal et patient font qu une atmosphère très lourde toujours enveloppe ses apparitions, et qu elle passe comme un malheur à travers les films les plus divers, fussent-ils des comédies. Il serait difficile de contester à VALESKA Gert d'être une des reines 26