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« voix » de la population noire de la ville, lors des prochaines élections.
Il arrive que Hildy Johnson, un des meilleurs reporters du pays, sur le point de quitter son métier pour se marier, se trouve seul avec le prisonnier qui vient de s'échapper; il l'enferme dans un bureau américain, appelle son directeur qui met tout le monde dedans pour essayer de tenir un article sensationnel sur la carence de la municipalité. En même temps le shériff et le maire envoient promener gentiment l'envoyé du gouverneur qui apporte la grâce du condamné, car cette grâce contrarierait leurs plans électoraux. Mais il faut de toutes façons remettre la main sur Williams. Où se cache-t-il? Johnson et son patron ont assez de peine à retarder l'ouverture du bureau américain. Une amie du condamné, Molly, une fille de la rue, refuse de parler; terrorisée par le shériff, elle se «jette par la fenêtre plutôt que de trahir Williams. Le hasard fait que ce dernier donne innocemment signe de vie. Tous les reporters se jettent sur leur téléphone respectif. On passe un cabriolet aux mains de Johnson et de Burns, accusés de complicité d'évasion. Peu après, c'est pour le passer aux poignets du shériff et du maire qu'on devrait leur ôter ce cabriolet... quand le messager du gouverneur, ivre, revient et cette fois refuse de s'en aller sans que quelqu'un ait accepté la grâce de Williams...
Le tourbillon incessant des innombrables combats d'images parlantes était sûrement bien préparé, établi, ordonné dans l'esprit de Milestone quand il entreprit la réalisation de The Front Page. Sur un fond constitué par les continuels appels téléphoniques des reporters à leur journal ou de leur journal, leurs plaisanteries, leurs muffleries, leurs tics, se plaquent brutalement des faits tour à tour comiques, amusants, sauvages ou tragiques jusqu'à vous faire peur ou vous donner la nausée — les uns favorisant singulièrement, par la détente qu'ils apportent, l'acceptation des autres par tous les spectateurs. En dépit de l'immense liberté financière que lui laissa le jeune producteur richissime Hughes, on reste émerveillé quand on voit que Milestone n'a pas eu une défaillance en réalisant cette quantité de plans mouvants, tournants, enchevêtrés, n'existant jamais isolément, mais soutenus par le précédent, entraînés par le suivant; qu'à travers cette abasourdissante succession de paroles cinglantes qui s'échangent le plus souvent sur un rythme forcené, à travers les difficultés des raccords, le morcellement des scènes à la prise de vues, pendant la longueur du travail, il n'a jamais perdu le souffle, aussi peu que ce soit.
La maîtrise de Milestone s'impose tellement visiblement qu'à notre avis, si son film ne suivait pas l'action d'une histoire aussi étonnamment honnête et forte que The Front Page, si finalement il ne nous donnait pas le dégoût du milieu qu'il décrit courageusement, il ne nous intéresserait qu'au point de vue expérimental : en tant que tentative de rajeunissement du cinéma américain. Lewis Milestone, russe d'origine, a d'ailleurs remarquablement assimilé les méthodes parfois rudimentaires du cinéma soviétique — et pour donner une œuvre d'un style nettement différent de celui de son A l'Ouest rien de nouveau, cette fois.
Car précisément il serait regrettable que les metteurs en scène qui s'inspireront de The Front Page prissent son style pour un genre nouveau, une mode artistique. Ce serait mésestimer Milestone que de croire que c'est désormais sa manière cette précipitation, cette brutalité, cette fusillade de paroles (plus rapides que les images). C'est la manière qu'il a adoptée pour tourner la pièce de Hecht et Mac Arthur, parce qu'elle était en somme commandée par
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