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ces jours de fête, l'image passionnément chérie de celle qu'on avait condamnée au plus douloureux exil dut se présenter devant les yeux du jeune roi... Non, Simone, le spectacle, pour qui voulait bien regarder, ne devait pas être réjouissant, mais mélancolique ...
Une fois de plus, Simone admirait son fiancé. Comme ïil était compréhensif, comme il était humain ...
— Je ne vous savais pas tellement admirateur de Marie Mancini... souriaitelle, un peu ironique.
— Mais, Simone, ce n'est pas de l'admiration, ma chérie, c'est de la pitié, une infinie pitié pour cette jeune fille étrangère, transplantée en France, amoureuse, aimée du roi et contrainte à la plus dure punition : l'exil... Perdre à la fois celui qu'elle aimait et sa patrie d'élection, ne trouvez-vous pas que c'était beaucoup de calamités ?
Simone approuvait et se serrait davantage contre François.
À l'hôtel, ils retrouvaient M. et Mme Mathys, accueillants et tendres.
— Que n'étiez-vous avec nous, chère madame ? s'exclamait Simone enthousiaste. Nous avons fait une promenade admirable.
Un sourire très bon flottait sur le visage aux traits réguliers de Mme Mathys. Passant une main fine sur les cheveux blonds de sa future belle-fille, elle assurait :
— Je n'ai pas dû vous manquer, pe
tite Simone, au point de gâter votre visite à Hendaye ?... Ou alors, je ne reconnaîtras plus mon fils : c'est un compagnon de voyage disert, en général ?
— Il n'a pas manqué à ses habitudes, madame ... mais je regrette... pour VOUS ...
Affectueusement, Mme Mathys attirait la jeune fille et l'embrassait :
— N'ayez pas de regrets, petite. J'étais bien contente en vous imaginant, tous les deux. Et puis, je trouve excellent que deux fiancés puissent se parler en tête à tête, confiants et libres...
_. — Tute rappelles, Marie, quand nous
sortions avec ta mère? s'amusait M. Mathys. Comme elle était autoritaire, la pauvre, et quel soin elle prenait de nous interdire toute conversation secrète |... Ah ! les temps nouveaux ont du bon !... assurait l'excellent homme. La jeunesse, autrefois, était bien opprimée... Si, maintenant, elle est trop libre, ma foi... cela s'équilibre, en définitive...
Simone sourit à son futur beau-père. Elle l'aime infiniment, car il a la tendresse compréhensive et généreuse de FranÇois :
— Vous êtes donc partisan de l'émancipation outrancière ? questionne-t-elle.
— Outrancière, non, Mimo, mais j'ai horreur des contraintes que beaucoup de parents croient devoir exercer sur leurs enfants. François, en vous choisissant, ma petite fille a comblé nos væœeux. Mais n'eût-il négligé votre avis, nous n'aurions
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voulu, en aucune manière, lui imposer notre choix...
— Je comprends cela... concède Simone.
Mais, François intervient avec gaîté :
— Eh bien, pas du tout, ma chérie, vous avez tort... Si — Dieu merci, je ne suis pas insensé | — j'avais eu le mauvais goût de ne pas m'apercevoir de vos charmes, le devoir absolu, rigoureux, des miens était de me dessiller les yeux... Il y a des crimes qu'on ne doit pas laisser commettre ...
« Négliger ou nier les mérites exceptionnels de Simone en était un... Mes parents auraient manqué à tous leurs devoirs en ne me rappelant pas sévèrement au bon sens ...
Simone, ravie, tend sa main à François qui pose ses lèvres sur la peau satinée. M. Mathys applaudit ...
La famille, rayonnante, heureuse, traverse le hall de l'hôtel.
L'heure du dîner est proche. Il faut que chacun regagne sa chambre et chan
ge de toilette. Comme ils s'approchent
de l'ascenseur, M. Mathys a un geste fâché :
— Je suis ridicule ... J'ai négligé d’envoyer un mot à mon associé au sujet de l'affaire Durard. Je voulais lui rappeler la date, simplement ...
— Eh bien ! papa, tu n'as qu'à demander une carte-lettre à la caissière. Elle en a certainement. Tu vas écrire ton mot et il partira ce soir...
François s'est dirigé vers la caisse. Il s'apprête à formuler son souhait quand il s'arrête, très gêné. Derrière son bureau, le visage dans ses mains, une jeune fille pleure, à petits sanglots étouffés. François ne voit d'elle que ses magnifiques cheveux sombres, la naissance d'un front marmoréen... Les petites mains crispées aux ongles roses sont d'un dessin ravissant.
Que faire ?
François va s'en aller quand, par un phénomène de télépathie, la jeune désolée découvre son visage et pousse un tout petit cri :
— Je vous demande pardon, monsieur.
— C'est moi, mademoiselle, qui suis confus ...
Mais la jeune fille pose sur François un regard à la fois doux et implorant qui, véritablement, le subjugue :
— Vous avez besoin d'une renseignement, monsieur ?
La voix, volontairement, est respectueuse et distante. Cette enfant souffre d'avoir été surprise dans son chagrin par un étranger ...
— Mademoiselle, je voudrais une car
te-lettre, si Vous en avez une ?
— Voilà, monsieur ...
Sans dire un mot, François paye, remercie et s'en Va. Il sait que rien ne peut être plus agréable à la jeune Espagnole, car, malgré le français très correct de la
caissière, le jeune homme a identifié la sonorité de son parler.
— Sans doute une victime de cette guerre fratricide ... murmure-t-il presque inconsciemment, en rejoignant les siens. |
— De qui parles-tu ? demande Mme Mathys, intriguée.
François ne pense pas commettre une indiscrétion en contant aux siens ce dont il vient d'être spectateur. Quand il a fini, M. Mathys secoue la tête :
.. — Une triste histoire, oui... Ce doit être une réfugiée, certainement. Je ne l'avais jamais regardée, cette petite caissière.
— Ni moi...murmure Mme Mathys.
Mais Simone, de sa voix douce, apprend :
— Moi, je l'ai vue tout de suite, le jour de notre arrivée. C'est une jeune fille de mon âge, à peu près. Elle est ravissante. Elle n'est pas grande, mais très bien faite, très élégante. Et elle a un visage admirable, des cheveux noirs, des yeux de flamme... Tout d'abord on ne voit qu'eux dans sa jolie figure
— Quel portrait... remarque M. Mathys. Simone est vraiment délicieuse. Il y a peu de femmes qui parleraient d'une de leurs sœurs de cette manièreÉTRES
— Ce portrait est rigoureusement exact, assure François, encore sous le coup de son étonnement.
Et Simone a un tout petit pincement au cœur en songeant qu'il n'a point approuvé le compliment que lui décernait l'excellent M. Mathys.
Elle pense aussi qu'elle s'est servie, pour peindre la jeune Espagnole, d’une phrase employée dans l'après-midi par son fiancé « des yeux de flamme». A qui donc les attribuait-il, ces yeux pa
thétiques ? Ah oui ! à Marie Mancini, la
bien-aimée du roi Louis XIV.
François disait éprouver une « infinie pitié pour cette jeune fille étrangère, transplantée en France, contrainte à la plus dure des punitions : l'exil » ...
Alors, sans savoir pourquoi, Simone frissonne et pose sa main sur le bras de François, ce bras sûr et fort qui lui épargnera les embüches, qui la soutiendra, qui la guidera, avec une certitude réconfortante.
— François, quelle belle, quelle captivante promenade nous avons faite ! rappelle-t-elle à mi-voix.
Arraché à quel rêve ? François revient sur terre et, souriant à la blonde Simone, approuve :
— Une très belle après-midi, Mimo ...
CHAPITRE II L'EXILÉE NA MATHYs est un homme de cœur, un père délicieux, un mari modèle. Mais il est extrêmement curieux.
Souvent, avec toute leur affection, sa femme et son fils lui ont reproché gai
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