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provoquer un accident, M. Cormier traversa, aussi vite qu'il le put, les rues laissées libres à la circulation, car, aux abords du lieu du sinistre les voies étaient interdites et gardées par un cordon d'agents.
Il ne s'arrêta que devant la maison des Valory, monta rapidement les deux étages, sonna...
Lucienne l’attendait. Elle vint à Pascal Cormier les mains tendues. Une profonde tristesse était sur son visage.
— Mon pauvre ami!... Quel drame affreux !... Qui m'aurait dit quand elle m’a quittée pour aller faire ses achats... Mais, Pascal, tout espoir ne peut être perdu... des blessées, des commotionnées, sont dispersées de toutes parts... Jean est encore sur place... cherchant passionnément...
M. Cormier s'était laissé tomber, accablé, sur un siège. Aux dernières paroles de Lucienne, il releva la tête :
— Pauvre Denise... murmura-t-il, pauvre petite... Oui, je veux espérer encore... et pourtant... J'ai comparé les heures... je n'ai fait que ça depuis l’annonce de la terrible nouvelle... Elle a dû arriver au magasin bien avant que le sinistre n'éclatât; il a dû l’y surprendre... Prise dans la bousculade... dans l’affolement où chacun a dû perdre son sang-froid... elle n’aura pu sortir... Aucune des personnes chez qui je l’avais chargée de se rendre ne l’a vue... Ah! l'horreur... Et tant de souffrance ...
Lucienne que son mari tenait, heure par heure, au courant de ses investigations, n'avait plus, ellemême, aucune illusion sur le sort tragique de son amie. Elle savait avec quelle foudroyante rapidité une simple étincelle s'était muée en tourbillon de flammes, et que, les sorties bien vite devenues impraticables, les infortunées victimes avaient été asphyxiées, ou brûlées telles des torches vivantes, sans que la fuite leur soit possible.
— Lucienne... demanda M. Cormier, pourraisje vous demander de m’accompagner parmi les blessés ... de m'aider, s’il y a lieu... aux vérifications douloureuses... C’est un pénible service, mais je ne me sens pas en état d'entreprendre, seul, cette affreuse tâche...
Il y avait soudain en lui une faiblesse étrange, et comme une douceur jusqu'alors inconnue.
Lucienne en fut frappée, et cela lui donna pour Pascal Cormier une sympathie qu'avant cette heure elle lui avait refusée.
Au moment où elle allait répondre, le téléphone sonna.
C'était justement le docteur Valory, qui prévenait sa femme du résultat encore négatif de ses recherches en ce qui concernait Denise. Lucienne l’informa de la présence auprès d'elle de Pascal.
— Je me rends à l'hôpital des Soeurs Blanches, où des victimes ont été transportées. Voulez-vous m'y rejoindre tous deux ?... proposa-t-il.,
M. Cormier, dès que Lucienne lui transmit l’indication de Jean, se leva:
— Allons... dit-il, et que le Ciel nous assiste, Croyez-vous vraiment, Lucienne, que l'on puisse encore espérer ?
Lucienne n’osa pas donner des espérances qu’elle ne pertageait pas... Elle eut un geste vague... et ne répondit pas.
Le Film, Montréal, février 1961
Sans plus prononcer de paroles, hélas, trop vaines, absorbés l'un et l’autre par leurs tristes réflexions, évoquant avec une horreur sans nom l’atroce mort de Denise, ils arrivèrent à l'hôpital des Soeurs Blanches, première étape de l’affreux calvaire qu’allait gravir Pacal Cormier.
La catastrophe s'avérait immense, sans précédent dans les annales de la cité niçoise. Des décombres fumants on retirait sans cesse de nouveaux corps calcinés, et, pour la plupart, méconnaissables.
Sur leurs lits de souffrance, des blessés gémissaient.
Depuis deux jours, M. Cormier parcourait les salles funèbres et les salles d’hôpitaux. Nulle part, il n’avait reconnu Denise.
Pour les pauvres victimes dont les restes informes ne pouvaient être identifiés, on soumettait à l'examen des familles des débris de vêtements, ou seulement des objets incombustibles qui étaient demeurés sur elles.
Aidé de Lucienne, M. Cormier avait, aussi exactement que possible, décrit les vêtements de Denise. I1 se souvenait de cet ensemble qui avait eu son approbation : robe et manteau gris, chapeau, écharpe, chaussures et sac couleur feuille morte.
Le troisième jour, on crut retrouver des vestiges correspondant à ces indications. Un morceau de tissus gris échappé aux flammes, sur un corps de femme. Une lanière de cuir fauve incrustée dans le bras, soutenait encore un fermoir de sac calciné.
M. Cormier abandonna toute espérance ..…
\1
rustique d'apparence, mais qu’une parfaite en
tente d’un confort nécessaire rendait extré
mement agréable à habiter, Armand réfléchissait. Ses pensées ne devaient pas être gaies, car un pli de tristesse marquait son visage.
Il songeait à Denise... Denise toujours aimée, Denise longtemps perdue, Denise retrouvée et encore si lointaine...
— Ah! ma Denise... murmura-t-il, que faire pour l’amener à moi 2... Comment la décider à se délier de cette union douloureuse ?
Dans chacune de ses lettres, il disait son immense désir... et dans toutes celles de Denise il comprenait combien, à un éperdu désir de répondre à ses voeux, se mêlait chez la jeune femme, les scrupules d’une rupture dont il lui semblait que ce serait une mauvaise action.
— Denise trop délicate... Denise trop retenue par une reconnaissance soi-disant méritée... Qui donc lui donnera la volonté du bonheur ? Et pourtant, elle m'aime...
Passant la main sur son léger vitement de toile, il sentit, dans sa poche, un crissement de papier... La dernière lettre de Denise... Il ne résista pas
A: sur le seuil de sa petite maison paysanne,
. au désir de la relire...
Ses yeux accrochés aux mots tendres qu'elle contenait, un sourire revint sur le visage d'Armand.
— Oui... elle m'aime... je n'en peux douter... Ah! Denise que le bonheur serait grand si nous étions unis...