Mon Film (January 1931)

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sa parade et l'on comptait encore dans la troupe un quatuor de, sonneurs de trompes de chasse et la fanfate classique des fêtes -foraines, sans oublier queiques s0o'gneurs et dresseurs d'ours et de singes, La ménagerie Rabbas était populaire dans tous les continents. Il y régnait l'harmonie la plus parfaite, mais là sou mission au totale, Le dompteur n'aurait jamais permis que quiconque lui résistât : ses colères étaient brèves, mais terribles. Au demeurant, ex Mer et fidèle époux et bon père de famile, Pourquoi, et sans que rieh ne l'éxpliquât, s'était-il si brusquement attaché à cette fille entrevue un instant sur un pont de navire ? Etnit-ce ce charme pervers, cette féminité animale qui la rapprochait des grands fauves, cette énigme indéchiffrable qui se dégageait de toute sa personne, ou cette sensualité llascive qui attirait de cœur comme dans un tourbillon qui avaient séduit Rabbas ? .Ou n'était-ce pas le désir immodéré de vaincre, de dominer cette nature rebelle comme il triomphait chaque jour des animaux sauvages ? Toujours est-il que le dompteur aväit enlevé Rosetta, puis imposée à sa troupe et que, dépuis cet instant, ses collaborateurs avaient senti qu'un danger venait de s'abattre sur leurs têtes. Une mystérieuse amgoisse étreighait tous les cœurs. EX La douce Nana, qui n'avait que de tendres regards pour Léo, avait l'impression qu'insensiblement le jeune homme échappait à ses-affectueuses avances... Müis, fait plus grave, tous Sans excention s’apercevaieñt que l'humeur de Rabbas n'avait jamais été aussi inégale et due ce n'était qu'à grand'peine qu’il semblait maîtriser de sourds mouvements de rage intérieure. : Ca © La ménagérie Rabbas s'était installée à Neuilly où elle remportait comme à l'ordinaire les plus éclatints succès. La représentation de ce dimanche aprèsmidi-s’annoncait sous les meilleures auspices, Les trompes de <hasse venaient de semer aux quatre vents leurs appels ruivrés ; puis, aux accents de la fanfare, Nana et Lili avaient exécuté un pas de danse di plus gracieux effet pendant que de nain se roulait à leurs pieds en exécutant les fantaisies acrobatiques les plus diverses... Enfin de clown Armand commençi le boniment classique où il était question de grandes chasses africrhines, de courage et d'audace ; puis c'était une chansonnette drôle et un appel au public: « Entrez Entrez !.…. » 0 Lorsque le pitre eût terminé, il s'arrêta haletant pendant que la foûle, gravissant les marches de la baraque, payait les places à Mme Rabbas qui trônait, majestueuse, à la caisse scintillante de miroirs, et s'engouffrait dans la salle. Rabbas parut sur l’estrade, le COrps. moulé dans un dolman qui faisait mieux Tressortir sa puissante charpente. J1 s’approcha du clown et, à brüle-pour « patron » était générale et int : = Décidément, Armand, dit-il, ça ne peut plus coller. Tu n'es pas drôle... tu ne fais plus rigoler... Le pitre n’en croyait Pas ses oreilles. Qu'avait-on à lui reprocher ?.…. Rabbas continuait d'une voix glaciale : __ Viens donc me voir demain... je te donnerai ton compte... avec un peu d’argent em plus. pour les gosses. Puis il disparut derrière une portière, laissant le malheureux clown ‘atterré et tremblani. Rabbas se glissait entre les roulottes. Il s’arrêta devant l’une d’entre elles, gravit les quatre marches de l'échelle et regarda à l’intérieur. — Es-tu prête, Rosetta ? Et, sans attendre la réponse, la porte et entra. Quelques secondes après, les doubles rideaux intérieurs étaient fermés par uñe main impatiente.…. cria-f-il. il ouvrit fe soleil venait À peine de se coucher, et, en attendant la première. représentation du soir, les artistes de la troupe prenaïent chacun dans leur roulotte leuÿ repag. Pietro venait de s'assurer que le mätériel était à sa place lorsqu'un cri lui ar .riva : — Au sécotirs !… At secolirs !.…. fl bondit ét anercut Lili, hagarde, qui se précipita sut lui : — Venez, venez vite tuer. Le dompteur courut jusqu’à la roulotte dit clown et eut le temns d’apercevoir Nana qui luttait désespérément avec Armand paur Qui arracher un revolver. Papa veut 5e Ganter sur le nitre et s'emparer de l'ar me fut pour Pietro l'affaire d’un instant. L'autre, véritable loque humaine, s'était laissé tomber sur sa couchette et prononcat des phrases sans suite en p'eurant pendant que des deux jeunes filles. Tamassées sur elles-mêmes dans un angle de la voiture, tremblaient de-frarxeur. . — Eh ! bien, qu'est-ce qui te prend ? dit Pietro, soudiin. 9 — Ah! exhala le clown. laisser: Pietro, ce ser”it fini. _ Tu m'as pas lé droit de faire ça. dit l'autre imnérieusement. Et tes filles. alors, tu n'y penses pas ? = Mais l’autre continuait : é — Rabbas nous jette à la rue, les petites et moi. on va partir. Et nourtant, les petites sont nées ici, la mère y est morte. Ce n'est pas drôle, Pietro, tu sais. de s'entendre dire ca. pour un homme qui a fait rire le monde depuis plus de vingt ans. 5 Lee Fallait me go PR LP TEE AE DEP SIA PE EEE ER RE 0 1l-tixa le dompteur et reprit d'ume voix plus assurée avec une expression de rage : _— C'est rapport à la Rosetta !.. Pietro continua : 3 _ Rabbas n’est pas un mauvais bougre. Je vais tâcher de le voir... De Et il partit. : Pietro vit en effet Rabbas et il lui fit doucement comprendre que son attitude pour Armand semblait. pour le moins . étrange. Le «patron» se rangea aux conseils ds Pietro. I1 lui promit de garder le clown et de lui donner la surveillance d'un coin dé là méñagerie. Quelques jouts aprés, un matin, sut leur roulotte, Rabbas et sa femme térinmiñaient leur toilette. Mon Film _ J'allais chez toi, dit-il. Nous æ&roné à causer sérieusement. Léo, étonné, régarda son père. Il étrit, pâle et malgré toute sa puissance dé dissimulation, il.ne pouvait cacher une crispation douloureuse de son visage. _— Comme tu es grave, papa, dit le jeune homme. 3 Alors, pour ne pas aller droit au bu, Rabbas parla tout d’abord du clown ATmand. — Mon petit Léo, dit-il, d’une voix qu'il s'efforcait de rendre naturelle, on ta mal conseillé au sujet d’Armand... J'ai vu Pietro. Et que cela te plaise OU mOn, je garde Armand. = Mais, papa. commença l’autre. Babbas ne pouvait plus se comtenir. el Rosetta pâle, les dents serrées, sans soufflé. lis échangaient tous deux leurs imipressions mais on devinnit que Mme Rabbas avait à parler et qu'elle n'osait pas. Enfin, faisant un effort sur elle-même elle se décida. : — Dis donc; Rabbas, dit-elle. Tu n'as rien remarqué au sujet de Rosetta ? Inquiet, le dompteur cherchait un fauxfuyant pour échapper à cet entretien dont il ne saisissait pas le but... Mais sa femme reprenait : — ‘Tu me vois pas que, depuis quelque temps, Léo a changé de conduite ? Rabbas avait pris le parti de se taire... Après tout, s’il fallait qu’une explication eût lieu un jour, autant que cé soit tout de suite... — Tü n'as pas remarqué, reprenait son époüse, que Léo né sort plus ? Rabbas respira. Ïl. ne s'agissait donc pas de dui. Alors, pour né pas persister dans son mutisme : — Eh! bien, tant mieux. Mais non moi je prétends aie Léo est en plein Tomañ. il m'a confié son sécrèt… ; — ÀÂh ! ja petite Nana °. dit l'autre à tout hasard. + — Non ! continua la femme. Tu ne devines pas *. Léo est l'ami de Rosetta…. Rabbas blémit, il rougit brusquement ensuite, puis hurla : — Salété !.… $ Comment ! Rosetta le trompait avec son fils ! Elle osait sous son propre toit ?… Lui qui l'avait tirée dé la fange.. Mme Rabbas assistait avec terreur aux divers. changements de physionomie qüe présentait son mari, sans qu'elle puisse et déterminer il cause. — Tu n'es pas fou de te mettre dans des états pareils. dit-elle, brusquement. Après tout. cette femme... , — Ah ! je vais lui faire voir. moi... Je t'en prié, Rabbas. contiens-toi. Il n’y à pas de quoi se fâcher à ce point. Le dompteur venait de faire un brusque retour. Sur Imi-même. L _ Ne crains rién, je suis calme, dit-il en sortent de la roulotte. I cherchait son fils. Il l'apercut qui s’amusait à taquiner ME des se ee nourrissait Mirza et dont Nana avait la garde. Il s'appreeha et loi touoha l'épaule, PRE -de liaisons chez moi. fallait qu'il déchargeñt son Cœur, toit d'un: COUP. À É : = Et pus, autre chose, Léo. Je dois te mappeler aux convenances: Je ne veux pas Tu as des relations avec Rosetta… Il faut que cela cesse. — Papa, je t’assure.…. _ Tu mens‘! Ta mère m'a répété ce que tu lui avais dit à ce sujet. Alors le jeune homme eut un violent mouvement de rérction. Pour une fois, il osait braver son père. = Mäais je suis libre, dit-il avec pointe d’arrogance: > Je t'impose ma volonté formelle. Tu vas rompre avec Rosetha: Allons ! J’attends la réponse. Et tu sais, continua-t-il, une _c'est un ordre !… L'utre éleva 14 voix : = Obéir ! Toujours obéir ! Mais on n'entend que.ca, ici. fmperturbable, le père continuait : — Je te demande un engagement abso lu ! Ta réponse ? Un sanglot monta à la ‘gorge du jeune . homme : ; — Tü veux savoir la vérité? Eh ! bien, ñotis mous aimons tous les deux. — Tu méns ! hurin Rabbas.… Tu mens Tu n'es qu'uñ voyou. I1 eut alors un terrible geste envers s0n fils mais ses mains retombèrent, pendant que le jeune homme, effrayé, s’enfuyait.…. Tout À son idée, de dompteur se dirigea _vers la roulotte de la fille. Il y pénétra. Elle terminait sa toilette. Ii lui apparut le visage bouleversé, mais elle le défiait du regard. _ Garce !… Garce !.… dit-il, la rage au cœur, garce que tu es !… lle se maîtrisa et, d'une voix lésèrement iromique : : RE _— Mais qu'est-ce qui t'arrive ? C'est sé-. Tieux ?.…. Rribbas ferma da porte, s'approcha de ia femme et la fixà d’un effrayant regard. — Eh ! bien, j'attends. ‘dit-elle. _— Tu es l’amie de mom fils ! Un éclat de rire lui répondit. — Regarde-moi bien, reprit-il. Léo m'a tout dit. ; Elle biaisa : _— Dès le premier jeur que Léo m'a vue, il m'a fait la eemr…. je ne-penvais cepen mm arme Bt arm = me drones ri D ——————— 9 — dant pas lui dire que je t'appartenais ?… Ajors. ce qui devait arriver... est drrivé. Brutalement, il la saisit aux poignets et la renversa sur le sol. à _ Lutte effrayante chez cet homme épris après la brusque révélation d’une odieuse trahison. — Il m'a dit que tu l’aimes, lui crachat-il à la face.. — Oh! tous les hommes s’imaginen$ qu’on les aime, répondit-elle, puis, se reprenant : — C'est ta faute, après tout. Si Îu m'avais laissée vendre mes fleurs à Marseille, je serais tranquille... Si tu veux que je m'en aille. je m'en vais... Elle avait touché juste. Sur Ja plaie encore saignamte de Ce dominateur, elle venait de verser un nouveau poison. Celui de la séparation. Rabbas était abattu. Le grand dutteur qu’il avait touiours été : et devant lequel personne n’osait élever la voix n'était plus qu'un malhéureux homme sans courage et craintif devant cette femme, laquelle a!Jait aussitôt profiter de Ja situation. Rosetta s'était blottie dans les bras du belluaire. Dé ses mains elle lui caressait Jes cheveux et le visage. Puis elle abrita sa tôte dans son cou et demanda : _ Maintenant, il faut que tu m'accordes quelque chose pour avoir éié si méchant... Cynique, elle continua : « Je veux faire un numéro. et les nouvelles lionnes..… Tu Oui ? Rabbas réagit : _ Mu es folle » Qu'est-ce qui te prend ? L'autre soir. tu as bien vu que Sultae était prête à bondir sur toi:!.. Ce sont des charognardes, entends-tu ? Mais elle de berçait doucement, comme un grand enfant et lui murnmurait sa chanson favorite : Voici mon cœur qui veut Mm'aimer ?.… Voici mes bras pour s'y pÂâmer.…. avec Léo veux? Le dompteur, le cerveau engourdi, ve parlait de Léo : __ Alors. ne continue pas avec lui... — Et pourtant ! répondit-elle. J1 m'a dit qu'il se tuerait…. Et, devant le visage crispé de son ami : _?Ne souffre pas Tu sais bien, Mami... Aimes-tu que ie t’appelle Mami. On dit ca chez nous. Mais comme Rabbas ne répondait pas : __ Ecoute, mon grand, il serait prudent que tu t'en aïlles, dit-elle, et elle: questionna, perfide : = Sj tu m'avais pns ton fils... tu ta femme nour moi ? Il hésita l’espace d’une seconde. \ — Trop tard ! dit-elle. Tu es jugé. Elle ne lui ménageait aucume douleur. aucume tristesse, atucume inquiétude. Elle jouait. du diompteur . comme un chat s'amuse avec ume souris. Un incident se produisit alors qui intensifia la torture de Rabhas. Léo frappait à la porte de da roulotte et obtenait de Rosetta, devant je père impuissant à réagr, um rendez-vous dans un oc1f6 … quitterais RES Le dressage des trois jeunes jionnes achetées au capitaine Courle tentait Rabbas. Mais pour rien au monde il n'aurait autorisé Léo à effectuer le travail en public avec Rosetta au surplus ! Depuis l'étrange désir de la jeune fenime, il ne se passait de jour qu'il ne vint voir les superbes bêtes, qu’il avait bapti « Caprice », « Mascotte » et « Beauté ». . Il lui arriva méme de faire venir Ro setta devant les cages et de Jui poser ia quest'on : _—— As-tu toujours envie de faire ton numéro avec elles ? Mais regardie-1es… La femme les regardait sans trouble, puis elle sourit d'une étrange façon et s’en fut. Cependant, si Rabbas était violemment attiré par les lionnes, Pietro éprouvait de son côté le plus vif désir de les affronter. Profitant um jour de l'absence du patron, Pietro osa pénétrer dns la cage, et devant Rosetta, Léo et Armand, il prit contact avec les bêtes et en sortit victorieux, mais avec une longue estafilade au bras. Lorsque Rabbas apprit le fait, il entra dans ume violente colère. C'était au cours d’un repas qu'il premait avec sa femme et Léo. L’incident Jui remettait en mémoire la promesse que Rosetta avait voulu lui arracher de paraitre dans la cage des bêtes in-. domptées, et d'image en image, il en arrivait au jour de la révélation des amours de Léo et de la jeune femme et des scènes qui s’en suivirent. Mme Rabbas venait de quitter ia table. ‘Le dompteur restait avec son fils ; il remit la conversation sur Rosetta : F —. Léo. tâche de rompre avec cette fille, lui dit-il. Mais comme le jeune homme prenait une attitude de défi, le père décidé à tout, eut une phrase malheureuse : — Elle te fait souffrir, mon petit. au-: tant qu'elle me fait souffrir... soudain, il vit Léo chanceler. I1 venait de tenter de se plonger un. COUteau dans le côté. Fort heureusement, la Jame avait glissé sur SOm étui à cigarettes et la blessure était peu profonde. Alors Rabbas comprit tout ce que Rosetta avait semé de catastrophes autour d'elle. Maïgré tout, il ne pouvaitparvenir -échapper à l'emprise de « la garce » et 11 dut tenir sa promesse de la laisser paraltre en compagnie des trois lionnes. Mais ce serait avec personne d'autre que jui qu'elle entrerait dans la cage. (Suite page 14)